« Les récits de résurrection parlent aujourd'hui à ceux qui espèrent dans la foi. Ils corroborent et précisent l'enseignement chrétien révélé dans la résurrection de Jésus, aident à mieux percevoir qui est Jésus, qui est Dieu. Ils font savoir ce que n'est pas la mort, qui, sans la résurrection de Jésus, sans ces récits qui en sont la conséquence, resterait à jamais, selon le mot de Baudelaire*, "le portique ouvert sur des cieux inconnus". Ils ouvrent enfin à la vie dans l'espérance qui fait attendre la résurrection et la création nouvelle inaugurée dans la résurrection de Jésus ». (op. cit., p. 203)
Les récits de résurrection des morts ne présentent aucune théologie de la mort, mais le sens commun s'y exprime avec grande simplicité et franchise. La mort est un fait réel : les gens de la maison de Jaïre annoncent au chef de la synagogue la mort de son enfant (Mc 5, 35); les rires moqueurs qui répondent à la déclaration de Jésus : « L'enfant n'est pas morte, mais elle dort » soulignent encore que l'enfant est bien morte; Luc d'ailleurs ne s'y trompera pas et ajoutera « sachant qu'elle était morte » (Lc 8, 53). Jésus, à Naïm, croise le cortège funèbre, et rien n'indique, comme dans le récits païens analogues, que le fils de la veuve n'était pas réellement mort. Lazare était au tombeau depuis quatre jours lorsque Jésus arrive à Béthanie. Tabitha enfin est morte des suites d'une maladie, et lorsque Pierre arrive à Joppé, les amis de la défunte lui ont déjà prodigué les soins funèbres et parlent d'elle au passé. On ne peut rien contre la mort, telle est la conviction des gens de la maison de Jaïre qui, sans ménagement pour un père affligé, déclarent : « Ta fille est morte; pourquoi déranges-tu encore le Maître » (MC 5, 35)? Le reproche voilé que Marie adresse à Jésus va dans le même sens : « Si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort » [Jn 11, 32); on peut continuer la pensée de Marie en ajoutant « Mais maintenant que peux-tu faire? » Et ce manque de foi dans la puissance de Jésus contraste avec l'attitude de Marthe qui, exprimant la pensée théologique de l'auteur principal du quatrième Évangile, ajoute après son reproche : « Mais je sais que tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te l'accordera » (Jn 11, 22). Marthe exprime ainsi déjà l'attitude chrétienne face à la puissance d'intercession de Jésus. Les amis chrétiens de Tabitha, qui après son décès envoient deux hommes en délégation près de Pierre, ne semblent attendre de lui peut-être qu'une visite de réconfort; leur requête en effet n'indique pas clairement leur intention: « Viens chez nous sans tarder » (Ac 9, 38).
Si la mort est un fait réel, contre lequel tout effort purement humain se brise, rien pourtant dans ces récits n'indique qu'elle soit la conséquence du péché comme la spéculation juive de l'époque et le Nouveau Testament le reconnaissent en général. (4) On ne peut pas déduire du texte, en effet, que Jaïre, se prosternant aux pieds de Jésus et le suppliant de venir imposer les mains sur son enfant, ait eu conscience que la maladie de sa fillette était conséquence de son péché. Luc, de son côté, dit que Tabitha est morte après une vie passée à faire des bonnes oeuvres et l'aumône (Ac 9, 36). La mort est donc représentée comme un fait réel, inéluctable, douloureux pour les familiers du défunt. C'est cette mort, banale parce que quotidienne, douloureuse parce qu'apparemment sans signification, révoltante quand il s'agit d'enfants innocents, que les récits de résurrection présentent comme vaincue par la puissance de Jésus. Ils annoncent en fait ce qui n'est pas encore advenu et révèlent partiellement ce que n'est pas la mort.
[La mort] n'est pas éternelle. « L'enfant n'est pas morte, elle dort ». Elle dort parce qu'elle va être réveillée par la parole puissante de Jésus. De même les chrétiens décédés ressusciteront lors de la venue du Seigneur (1 Th 4, 16; 1Co 15, 52), lorsque Dieu viendra demeurer avec son peuple (Ap 21, 3). Rêve insensé apparemment, qui suscita la moquerie des premiers auditeurs grecs du message de salut, les sarcasmes de Celse et de Porpyhre dans l'Antiquité, l'indifférence de beaucoup de gens aujourd'hui. On peut convenir que le scénario de la fin des temps, tel que décrit dans les synoptiques, les épîtres de Paul aux Thessaloniciens et aux Corinthiens et emprunté à l'Apocalyptique juive, est d'apparence mythologique, mais la vérité exige-t-elle pour être vraie d'être exposée en de savants traités rationnels? La révélation contenue dans ce scénario apocalyptique de la fin des temps affirme seulement que le Dieu créateur est tout autant devant nous que derrière nous, qu'il est 'celui qui ressuscite les morts et appelle à l'existence ce qui n'est pas' (Rm 4, 17).
La nouvelle création, la fin du règne de la mort, n'est pas une utopie pour le chrétien qui perçoit dans l'histoire la fidélité de Dieu,qui croit en Jésus 'premier-né d'entre les morts'. La résurrection de Jésus garantit la fidélité de Dieu; elle est une promesse qui tend vers son accomplissement. Elle vise par delà Jésus lui-même vers la révélation à venir de la gloire de Dieu qui 'sera tout en tous' (1 Co 15, 28). Les récits de résurrection, nés de la foi en la résurrection de Jésus, annoncent à leur tour que l'ère messianique fut inaugurée par la venue de Jésus et la souveraineté à venir de Dieu sur le mal et sur la mort. Ils sont des signes que la mort n'est pas éternelle, que les hommes ressusciteront au dernier jour.
Cette espérance en la vie future 'ne tombe pas du ciel' par enchantement, 'ni ne monte au ciel par enthousiasme, mais jaillit de l'événement de la Résurrection du Christ, comme une aurore et un gage de son avenir' (5), elle jaillit aussi des récits de résurrection qui anticipent dans la vie terrestre de Jésus comme signes, les conséquences de sa venue future. La vie future est déjà présente pour celui qui croit : ' Je suis la vie... quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais'. À l'affirmation de la résurrection annoncée dans les récits, vient se superposer maintenant cette déclaration étrange que le chrétien ne mourra jamais (Jn, 11, 25). Il ne s'agit pas de la mort biologique, car Jésus vient de déclarer que celui qui croit, quand même il mourrait, vivra, il n'est donc pas soustrait à la mort terrestre mais assuré de la vie à venir. La mort, dont le chrétien ne meurt pas, peut être ce que les targums et l'Apocalypse nomment « seconde mort », la perdition éternelle. Mais cette seconde mort, la perdition éternelle est déjà présente, selon l'évangile de Jean, dans la vie d'ici-bas : « qui ne croit pas est déjà condamné » (Jn 3, 18). Jésus veut donc affirmer que le chrétien ne meurt pas à la vie éternelle, mais qu'il continuera de vivre, quand bien même il mourrait, de la vie eschatologique reçue dans la foi. [...] La mort biologique perd alors sa note tragique pour celui qui a l'espérance de revivre, et de continuer après sa mort la vie éternelle qu'il a reçue ici-bas dans la foi. Telle est la réponse finale que l'auteur principal du quatrième Évangile apporte au fait énoncé dans les récits que la mort est un fait réel, inéluctable, contre lequel se brise tout effort humain. Dans la foi qui espère, la mort terrestre est vaincue; dans la foi, la mort qui espère, la mort terrestre est vaincue; dans la foi, la mort qui est perdition éternelle, la seconde mort, est à jamais vaincue.
(4) Sur le lien entre le péché et la mort, voir S. Lyonnet, Les étapes du mystère du salut selon l'Épître aux Romains, 1969, p. 55-81.
(5) Moltmann, Théologie de l'Espérance, p. 227) parle de la notion paulinienne d'Esprit qui ne tombe pas du ciel ni remonte par enthousiasme.
Si la mort est un fait réel, contre lequel tout effort purement humain se brise, rien pourtant dans ces récits n'indique qu'elle soit la conséquence du péché comme la spéculation juive de l'époque et le Nouveau Testament le reconnaissent en général. (4) On ne peut pas déduire du texte, en effet, que Jaïre, se prosternant aux pieds de Jésus et le suppliant de venir imposer les mains sur son enfant, ait eu conscience que la maladie de sa fillette était conséquence de son péché. Luc, de son côté, dit que Tabitha est morte après une vie passée à faire des bonnes oeuvres et l'aumône (Ac 9, 36). La mort est donc représentée comme un fait réel, inéluctable, douloureux pour les familiers du défunt. C'est cette mort, banale parce que quotidienne, douloureuse parce qu'apparemment sans signification, révoltante quand il s'agit d'enfants innocents, que les récits de résurrection présentent comme vaincue par la puissance de Jésus. Ils annoncent en fait ce qui n'est pas encore advenu et révèlent partiellement ce que n'est pas la mort.
[La mort] n'est pas éternelle. « L'enfant n'est pas morte, elle dort ». Elle dort parce qu'elle va être réveillée par la parole puissante de Jésus. De même les chrétiens décédés ressusciteront lors de la venue du Seigneur (1 Th 4, 16; 1Co 15, 52), lorsque Dieu viendra demeurer avec son peuple (Ap 21, 3). Rêve insensé apparemment, qui suscita la moquerie des premiers auditeurs grecs du message de salut, les sarcasmes de Celse et de Porpyhre dans l'Antiquité, l'indifférence de beaucoup de gens aujourd'hui. On peut convenir que le scénario de la fin des temps, tel que décrit dans les synoptiques, les épîtres de Paul aux Thessaloniciens et aux Corinthiens et emprunté à l'Apocalyptique juive, est d'apparence mythologique, mais la vérité exige-t-elle pour être vraie d'être exposée en de savants traités rationnels? La révélation contenue dans ce scénario apocalyptique de la fin des temps affirme seulement que le Dieu créateur est tout autant devant nous que derrière nous, qu'il est 'celui qui ressuscite les morts et appelle à l'existence ce qui n'est pas' (Rm 4, 17).
La nouvelle création, la fin du règne de la mort, n'est pas une utopie pour le chrétien qui perçoit dans l'histoire la fidélité de Dieu,qui croit en Jésus 'premier-né d'entre les morts'. La résurrection de Jésus garantit la fidélité de Dieu; elle est une promesse qui tend vers son accomplissement. Elle vise par delà Jésus lui-même vers la révélation à venir de la gloire de Dieu qui 'sera tout en tous' (1 Co 15, 28). Les récits de résurrection, nés de la foi en la résurrection de Jésus, annoncent à leur tour que l'ère messianique fut inaugurée par la venue de Jésus et la souveraineté à venir de Dieu sur le mal et sur la mort. Ils sont des signes que la mort n'est pas éternelle, que les hommes ressusciteront au dernier jour.
Cette espérance en la vie future 'ne tombe pas du ciel' par enchantement, 'ni ne monte au ciel par enthousiasme, mais jaillit de l'événement de la Résurrection du Christ, comme une aurore et un gage de son avenir' (5), elle jaillit aussi des récits de résurrection qui anticipent dans la vie terrestre de Jésus comme signes, les conséquences de sa venue future. La vie future est déjà présente pour celui qui croit : ' Je suis la vie... quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais'. À l'affirmation de la résurrection annoncée dans les récits, vient se superposer maintenant cette déclaration étrange que le chrétien ne mourra jamais (Jn, 11, 25). Il ne s'agit pas de la mort biologique, car Jésus vient de déclarer que celui qui croit, quand même il mourrait, vivra, il n'est donc pas soustrait à la mort terrestre mais assuré de la vie à venir. La mort, dont le chrétien ne meurt pas, peut être ce que les targums et l'Apocalypse nomment « seconde mort », la perdition éternelle. Mais cette seconde mort, la perdition éternelle est déjà présente, selon l'évangile de Jean, dans la vie d'ici-bas : « qui ne croit pas est déjà condamné » (Jn 3, 18). Jésus veut donc affirmer que le chrétien ne meurt pas à la vie éternelle, mais qu'il continuera de vivre, quand bien même il mourrait, de la vie eschatologique reçue dans la foi. [...] La mort biologique perd alors sa note tragique pour celui qui a l'espérance de revivre, et de continuer après sa mort la vie éternelle qu'il a reçue ici-bas dans la foi. Telle est la réponse finale que l'auteur principal du quatrième Évangile apporte au fait énoncé dans les récits que la mort est un fait réel, inéluctable, contre lequel se brise tout effort humain. Dans la foi qui espère, la mort terrestre est vaincue; dans la foi, la mort qui espère, la mort terrestre est vaincue; dans la foi, la mort qui est perdition éternelle, la seconde mort, est à jamais vaincue.
(4) Sur le lien entre le péché et la mort, voir S. Lyonnet, Les étapes du mystère du salut selon l'Épître aux Romains, 1969, p. 55-81.
(5) Moltmann, Théologie de l'Espérance, p. 227) parle de la notion paulinienne d'Esprit qui ne tombe pas du ciel ni remonte par enthousiasme.