Darwin et Mendel, deux passionnés de la vie
Il se trouve que les deux plus grands personnages de la biologie moderne, Charles Darwin, le père de l'évolutionnisme et Gregor Mendel le fondateur de la génétique, furent avant tout des passionnés de la vie et de ses manifestations, chez qui le regard analytique était intimement lié au regard contemplatif.
Charles Darwin (1809-1882)
Mendel (1822-1884)
Il se trouve que les deux plus grands personnages de la biologie moderne, Charles Darwin, le père de l'évolutionnisme et Gregor Mendel le fondateur de la génétique, furent avant tout des passionnés de la vie et de ses manifestations, chez qui le regard analytique était intimement lié au regard contemplatif.
Mendel était un jardinier et ce jardinier était fasciné par la façon dont on peut accroître la variété des plantes et améliorer la qualité des fruits au moyen de greffes et de croisements.
Darwin appartenait plutôt au type explorateur et nomade. Attiré par les formes sauvages de vie, il notait passionnément la variété de ces dernières pour en souligner ensuite l'unité : ressemblance entre le merle d'Amérique et le merle d'Europe qui tapissent de la même boue le fond de leur nid, ressemblance entre le cheval et un mammifère depuis longtemps disparu.
Mais le nomade et le sédentaire, le jardinier et l'explorateur étaient avant tout attirés par la vie, qu'ils aimèrent au point d'être distraits par elle des disciplines théoriques qui eussent fait d'eux, dès leur jeune âge, de véritables apprentis savants, alors qu'ils ne furent à ce stade de leur vie que des amateurs passionnés.
De tout temps, il a existé des enfants qui n'ont semblé avoir d'intelligence que pour les poissons, les plantes et les oiseaux auxquels ils s'intéressaient à l'exclusion de tout autre chose. Darwin était l'un de ces cancres. Si bien que son père, qui avait entrevu pour lui une brillante carrière dans les sciences, dut se résigner à en faire un pasteur de campagne, condition qui devait lui permettre de satisfaire sa curiosité. « Tu n'es bon qu'à chasser, à attraper des chiens et des rats. Tu seras une honte pour toi-même et ta famille » disait de lui son père, le docteur Robert Waring Darwin. Cet enfant irrécupérable eut besoin de l'intercession de ses protecteurs les plus influents pour convaincre son digne père de le laisser partir sur le Beagle qui entreprenait sa deuxième expédition scientifique, laquelle dura cinq ans et conduisit Darwin jusqu'aux îles Galapagos, via le Cap Horn. A son retour, Darwin n'aura pas besoin, pour poursuivre ses travaux, de la charge de pasteur que son père avait prévue pour lui.
Vers la même époque, Mendel était recalé à Vienne à des examens qui lui auraient permis d'entrer dans l'enseignement supérieur. Voici le jugement de l'examinateur :
« Le candidat semble ne rien savoir de la terminologie technique... Il nomme tous les animaux en allemand familier et évite la nomenclature systématique. Bien qu'ayant étudié diligemment, il manque de connaissances, et même le peu qu'il sait, il ne le sait pas assez clairement ».
Johann Mendel était né à Heinzendorf-Sur-Odrau, petit village de la Hongrie, pays qui était alors rattaché à l'Autriche. Après des études secondaires pénibles - à cause de la pauvreté de ses parents, des paysans, il avait dû commencer très tôt à donner des leçons pour les payer - il entre au monastère augustinien de Brno où il devient prêtre quatre ans plus tard pour se consacrer ensuite, pendant de longues années à l'enseignement des sciences dans les petites classes. Mais la botanique faisait partie de la tradition du monastère de Brno et les jardins y étaient magnifiques. Johann Mendel (Gregor depuis son entrée en communauté) ne pouvait se greffer sur un milieu qui lui convenait mieux. Son père l'avait initié au jardinage, à l'art de la greffe plus précisément. Le monastère mit d'autre part à sa disposition un local où il put rassembler animaux et plantes. Ce sont surtout les plantes qui suscitaient son intérêt et parmi ces dernières, les petits pois.
Il nous reste à voir comment le regard objectif s'associera au regard émerveillé pour que la théorie de l'hérédité pousse dans les jardins de Mendel et que l'idée de la sélection naturelle émerge des collections et des notes de Darwin.