«Philippe est sur le point de nous quitter. Encore quelques jours, quelques semaines, quelques mois et la mort aura accompli son oeuvre. Devant un tel destin, une interrogation hante notre esprit. Est-il possible qu'un être si fort soit vaincu par une maladie sournoise.? Est-il possible qu'une intelligence si brillante s'éteigne aussi rapidement? Est-il croyable qu'un esprit se taise sans qu'il nous renseigne sur son passé, ses expériences de vie, ses oeuvres éducatives, sa vie amoureuse et surtout sur l'événement de sa mort? [...] Lors d'une récente visite chez lui, je lui ai proposé de nous livrer ses dernières pensées, le témoignage ultime de la vie riche et diversifiée qu'il a vécu notamment avec Céline, la compagne de sa vie. Le défi était de taille [...] Il est rendu à la phase terminale. [...] À ma grande surprise, il a accepté de relever le défi, à condition que Céline l'accompagne...» (Gérard Arguin)
La maladie est l'occasion pour les amis, les collègues, les parents de redire leur amitié et leur attachement. Je dois avouer, pour ma part, que ce fut la grande découverte de ma maladie. Toute la chaleur humaine qui m'a été témoignée par mes collègues avec lesquelles j'ai lutté pour faire advenir dans nos milieux de travail respectifs un monde plus équitable et charitable...
Ce sont des étudiants et étudiantes qui se souviennent de leur professeur de philosophie d'autrefois, des jeunes chez qui j'avais essayé d'éveiller l'esprit à la vie intellectuelle. C'est également l'amitié que viennent me témoigner les anciens compagnons et compagnes de pastorale: ensemble nous avions cherché à découvrir les exigences de l'Évangile et de la foi en Jésus-Christ.
C'est aussi mille attentions de toute nature: un peit travail manuel que je n'ai plus la force de réaliser; un livre, un article, un document laissé au passage et qui rejoint mes intérêts et mes préoccupations; une course dans un magasin à ma place; une bouteille de vin de qualité supérieure et qui agrémente le dîner; un disque prêté dont les accords font vibrer l'âme et adoucissent les souffrances; un coup de téléphone pour prendre des nouvelles ou rappeler un souvenir, un événement heureux.
C'est une réunion sociale des frères et soeurs et de leurs conjoints qui se rassemblent, une dernière fois, pour une fête d'adieu à celui qui va bientôt les quitter et l'assurent de leur soutien indéfectible et de leurs prières pour le moment crucial de la mort.
C'est tout le personnel médical qui, chaque jour, apporte au malade avec chaleur et générosité des soins et des services professionnels d'une qualité remarquable.
Cet extraordinaire défilé, c'est la communion des saints, le cortège de ceux et celles qui partagent la même foi et la même espérance finale: la foi en la résurrection des morts.
Voilà la communion des saints: vivante, concrète pendant ma maladie et qui a nourri mon espoir.
[...]
Mourir dans la dignité, c'est d'abord conserver une qualité de vie, un bien-être physique, une conscience éveillée. Sous une forme négative, je dirais que mourir dans la dignité, c'est le contraire de l'angoisse, d'une agonie plus ou moins contrôlée; c'est la maîtrise de l'inquiétude pour rétablir la paix de l'âme. Retrouver le calme par une ré-appropriation de la réalité spirituelle de moi-même au cours des derniers mois. Comme ma tâche ultime, la plus essentielle.
En effet, j'ai repris avec un réel plaisir la grande lecture des psaumes et de la Bible*. Le temps consacré à ces lectures constitue mon temps le plus précieux. J'ai également renoué, après de nombreuses années, avec la fréquentation des sacrements. C'est à l'église de Cap-Rouge que j'ai vécu ma dernière semaine sainte, la plus belle depuis les années de mon grand séminaire. Par la suite, mon frère Richard m'a donné l'onction des malades. J'étais entouré de mes trois enfants et de Céline. Je suis maintenant prêt, en ce moment même. à accueillir la mort. Je dis donc au revoir à tous ceux et celles que j'ai connus et aimés. «Que nous soyons tous réunis, un jour, dans la communion des saints.»
Je vois alors le Seigneur m'envelopper de son long manteau et m'emporter dans un grand mouvement, en me disant: «Viens, c'est le moment. Je t'accueille parmi ceux qui vivent désormais leur foi en moi». (Philippe Bergeron et Céline Poulin, Le couple face à la mort. La mort du couple, Éditions Paulines, Presses de l'Université du Québec, 1994, p. 44-45 et 47)
Ce sont des étudiants et étudiantes qui se souviennent de leur professeur de philosophie d'autrefois, des jeunes chez qui j'avais essayé d'éveiller l'esprit à la vie intellectuelle. C'est également l'amitié que viennent me témoigner les anciens compagnons et compagnes de pastorale: ensemble nous avions cherché à découvrir les exigences de l'Évangile et de la foi en Jésus-Christ.
C'est aussi mille attentions de toute nature: un peit travail manuel que je n'ai plus la force de réaliser; un livre, un article, un document laissé au passage et qui rejoint mes intérêts et mes préoccupations; une course dans un magasin à ma place; une bouteille de vin de qualité supérieure et qui agrémente le dîner; un disque prêté dont les accords font vibrer l'âme et adoucissent les souffrances; un coup de téléphone pour prendre des nouvelles ou rappeler un souvenir, un événement heureux.
C'est une réunion sociale des frères et soeurs et de leurs conjoints qui se rassemblent, une dernière fois, pour une fête d'adieu à celui qui va bientôt les quitter et l'assurent de leur soutien indéfectible et de leurs prières pour le moment crucial de la mort.
C'est tout le personnel médical qui, chaque jour, apporte au malade avec chaleur et générosité des soins et des services professionnels d'une qualité remarquable.
Cet extraordinaire défilé, c'est la communion des saints, le cortège de ceux et celles qui partagent la même foi et la même espérance finale: la foi en la résurrection des morts.
Voilà la communion des saints: vivante, concrète pendant ma maladie et qui a nourri mon espoir.
[...]
Mourir dans la dignité, c'est d'abord conserver une qualité de vie, un bien-être physique, une conscience éveillée. Sous une forme négative, je dirais que mourir dans la dignité, c'est le contraire de l'angoisse, d'une agonie plus ou moins contrôlée; c'est la maîtrise de l'inquiétude pour rétablir la paix de l'âme. Retrouver le calme par une ré-appropriation de la réalité spirituelle de moi-même au cours des derniers mois. Comme ma tâche ultime, la plus essentielle.
En effet, j'ai repris avec un réel plaisir la grande lecture des psaumes et de la Bible*. Le temps consacré à ces lectures constitue mon temps le plus précieux. J'ai également renoué, après de nombreuses années, avec la fréquentation des sacrements. C'est à l'église de Cap-Rouge que j'ai vécu ma dernière semaine sainte, la plus belle depuis les années de mon grand séminaire. Par la suite, mon frère Richard m'a donné l'onction des malades. J'étais entouré de mes trois enfants et de Céline. Je suis maintenant prêt, en ce moment même. à accueillir la mort. Je dis donc au revoir à tous ceux et celles que j'ai connus et aimés. «Que nous soyons tous réunis, un jour, dans la communion des saints.»
Je vois alors le Seigneur m'envelopper de son long manteau et m'emporter dans un grand mouvement, en me disant: «Viens, c'est le moment. Je t'accueille parmi ceux qui vivent désormais leur foi en moi». (Philippe Bergeron et Céline Poulin, Le couple face à la mort. La mort du couple, Éditions Paulines, Presses de l'Université du Québec, 1994, p. 44-45 et 47)