René Dubos ou le juste milieu

Jacques Dufresne

Conférence prononcée en janvier 2003 au cercle René Dubos de Paris. L'auteur a choisi ce titre, propre à rebuter les natures excessives, parce qu'il résume parfaitement la vie et l'œuvre de René Dubos, caractérisées avant tout par le juste milieu. Juste milieu entre l'Europe et l'Amérique, entre le passé et le présent, entre la science et la poésie, entre la ville et la campagne, entre la notoriété et la solitude, entre l'éternel et le devenir. L'expression juste milieu évoque aussi la justice et l'harmonie dans le milieu de vie, dans l'environnement, deux préoccupations majeures pour René Dubos.

Il y a une expression qui revenait constamment dans sa conversation: «Savez-vous pourquoi?» Il la prononçait lentement d'une voix légèrement chantante, dans un français devenu méditatif à force de résister à l'influence de l'anglais. Savez-vous pourquoi j'ai accepté votre invitation avec tant de joie? Parce qu'elle me ramenait à une obligation que je m'étais assignée en relisant Dubos, il y a quelques années: tout mettre en oeuvre pour empêcher que le souvenir de cet homme ne s'enfonce davantage dans l'oubli. Nous l'avons rencontré fréquemment ma femme et moi. Nous l'admirions, nous l'aimions. Nous lui devons beaucoup. Au moment où il est mort, les circonstances nous ont empêchés de nous recueillir comme nous aurions aimé le faire. Votre invitation nous permet de renouer le fil rompu en 1982.
En ce qui a trait à René Dubos, la question de l'oubli et du souvenir, dont je veux vous entretenir, a été soulevée récemment par Jean-Paul Escande dans un article de Science et Vie (1) sur la découverte des antibiotiques par René Dubos. «Qui aujourd'hui connaît René Dubos? Qui a oublié Fleming? Dans les deux cas peu de monde...» écrit Jean-Paul Escande. Il a hélas! raison. Selon une enquête maison menée sur Internet, la notoriété de Rachel Carson en tant qu'écologiste est vingt fois plus grande et celle d'Alexander Fleming, en médecine, dix fois plus grande que celle de René Dubos, alors que le rapport inverse serait plus conforme à dimension réelle de chaque personnage.
Pour ce qui est du grand public, René Dubos y est réduit à sa célèbre maxime, «Penser globalement, agir localement», qu'on attribue généralement à quelqu'un d'autre.

Oubli et progrès

Il faut ramener René Dubos à l'avant-scène, par respect de la vérité et de la justice, mais aussi parce que l'enracinement intellectuel et spirituel, sans lequel les écologistes continueront de s'agiter inutilement à la surface des pollutions, passe nécessairement par cet homme qui a toujours su s'appuyer sur le passé le plus lointain pour proposer et amorcer les changements les plus profonds . Dois-je rappeler que tout changement profond, durable, a pour condition un tel enracinement? Le miracle grec au Ve siècle avant Jésus-Christ s'explique par le souvenir d'Homère, le poète du remords national, d'Hésiode, le poète de la Justice perdue et de Solon, l'homme d'État, mais aussi le poète de la justice retrouvée. À la Renaissance, les Européens ont éprouvé le besoin d'aller puiser force et inspiration dans le passé le plus lointain et le plus riche, un peu comme un oiseau migrateur se gave de sucre avant de traverser la mer. Il s'agissait pour ces Renaissants de se préparer à traverser l'Océan de la modernité. Nous parvenons épuisés au terme de cette traversée et nous devons immédiatement refaire le trajet en sens inverse, en dépensant, chemin faisant, beaucoup d'énergie pour réparer les torts que nous avons causés à la nature ; cela suppose une métamorphose consistant à passer de la science conquérante à la science réparatrice, et de l'égocentrisme du consommateur à l'altruisme du contemplatif.
Trop de gens prétendent encore pouvoir relever ce défi en continuant de tourner le dos au passé. Nous les retrouvons bientôt épuisés, les ailes engluées, ramenés sur la plage par la marée noire.
Dans les sciences et les techniques l'oubli n'est pas une faute morale personnelle, c'est une conséquence inéluctable du progrès. Victor Hugo l'avait bien compris:
«Un savant fait oublier un savant; un poète ne fait pas oublier un poète. Le progrès, but sans cesse déplacé, étape toujours renouvelée, a des changements d'horizon. L'idéal, point. Or le progrès est le moteur de la science; l'idéal est le générateur de l'art. C'est ce qui explique pourquoi le perfectionnement est propre à la science, et n'est point propre à l'art.
«L'art marche à sa manière; il se déplace comme la science; mais ses créations successives, contenant de l'immuable, demeurent; tandis que les admirables à-peu-près de la science, n'étant et ne pouvant être que des combinaisons du contingent, s'effacent les uns par les autres. Le relatif est dans la science; le définitif est dans l'art» (Victor Hugo, Shakespeare).
Succession ininterrompue de déracinements, le progrès détruit lui-même les conditions de la pensée et de la liberté qui pourraient permettre à l'homme de le maîtriser un jour. Comme Jacques Ellul l'avait prédit, et comme les faits l'ont prouvé, l'accélération est l'une des lois du progrès technique, une autre de ses lois est l'expansion dans tous les domaines. Il s'ensuit une accélération de l'oubli et une généralisation de l'amnésie.
L'oubli dont René Dubos est victime illustre cette amnésie générale, particulièrement manifeste aux États-Unis, une amnésie à laquelle ne survivent que quelques vedettes dont on ne retient le nom que pour mieux oublier ce qu'elles ont vraiment accompli. La plupart de ceux qui font référence à Darwin ou à Einstein n'ont vu ces noms que sur des posters.
Au même moment, les livres se multiplient. Désormais, un titre chasse l'autre à un rythme accéléré, dans les librairies et même dans les bibliothèques. Je faisais récemment la recension d'un ouvrage collectif sur la gouvernance écrit par d'éminents politologues américains de la dernière cuvée. Je n'y ai pas trouvé la moindre allusion à l'un des deux ou trois grands maîtres de la science politique contemporaine, Bertrand de Jouvenel. Les mots ont changé, me direz-vous. Ce qu'on appelait pouvoir au temps de Jouvenel s'appelle aujourd'hui gouvernance. Oublier Bertrand de Jouvenel parce qu'il employait le mot pouvoir serait aussi insensé que d'exclure Platon d'un traité sur Dieu parce que Platon l'appelait le Bien. La raison de l'oubli n'est pas le changement de vocabulaire, mais la mécanique du progrès, qui envahit aujourd'hui le monde de la recherche comme elle a envahi les usines au XIXe siècle.
René Dubos a résisté de façon exemplaire à cette mécanique. Immédiatement après avoir découvert les antibiotiques, il s'est empressé de terminer un livre sur Pasteur. Son premier souci n'a pas été de déclarer: «Me voici, je suis celui qui vient de découvrir le plus prodigieux médicament de toute l'histoire de la médecine, donnez-moi vite le prix Nobel et accordez-moi une retraite bien méritée.» Non, son premier souci a été de porter ombrage à sa propre gloire en rendant hommage à son éminent précurseur, comme en d'autres circonstances il avait donné une part du crédit de sa découverte à son patron, Oswald Avery. Dubos se plaisait à raconter comment Avery l'avait recruté pour lui permettre de vérifier l'hypothèse prometteuse qu'il avait à l'esprit depuis le début de sa
carrière.

Reconnaître pour connaître

«Lorsque Dubos le rencontra, Avery essayait de fabriquer un sérum pour traiter la pneumonie lobaire, une maladie mortelle. Il n'avait pas réussi à décomposer la capsule des polysaccharides qui entoure et protège les pneumocoques virulents de type III, mais pressentait que toute substance détruisant cette capsule et dénuée d'effet secondaire soignerait la pneumonie lobaire.
«Dubos avait de quoi tirer parti de cette rencontre: il expliqua à Avery comment il isolait les microbes qui digéraient la cellulose – également un polysaccharide – et Avery lui exposa ses difficultés concernant la capsule des pneumocoques. Audacieux malgré sa jeunesse, Dubos affirma: Je pense pouvoir découvrir un germe capable de décomposer cette capsule et en extraire l'enzyme active. Enthousiasmé par cette promesse, Avery lui obtint une bourse; Dubos lui fut reconnaissant sa vie durant de lui avoir donné une chance de travailler dans un hôpital, alors qu'il ne connaissait rien à la médecine et qu'il venait d'une station d'expérimentation agricole.» (2)
Dans l'appartement des Dubos à Manhattan, c'est le Don Quichotte du Greco qui occupait la place centrale. J'ai été étonné d'apprendre cela car Dubos m'était toujours apparu comme un disciple d'Aristote, comme un homme du juste milieu. J'oubliais qu'il avait été un intrépide redresseur de torts, notamment en ce qui a trait à Pasteur, dont on avait déformé la pensée en exagérant l'importance qu'il attachait à l'étiologie spécifique, à la petite cause isolée d'où viendraient tous les maux. Pasteur était ainsi devenu le symbole d'une médecine hémiplégique, sacrifiant Hygée à Panacée, négligeant les facteurs environnementaux. Dubos a révélé le vrai Pasteur, plus équilibré, plus hippocratique.
«Pasteur eut même l'audace intellectuelle d'affirmer que ces vues concernant les rapports entre l'état physiologique, et la résistance à l'infection sont valables aussi pour les maladies les plus graves, par exemple pour la tuberculose. «Si vous placez cet enfant dans des conditions de nourriture et dans des conditions climatériques convenables, très souvent vous le sauverez, et il ne mourra pas phtisique.»
Il alla même jusqu'à suggérer que l'état psychique pouvait influencer la résistance aux microbes. «Combien de fois la constitution du blessé, son affaiblissement, son état moral […] n'opposent qu'une barrière insuffisante à l'envahissement des infiniment petits!» (3)
Dubos avait le souci du juste milieu au cœur même de ses entreprises quichottesques. Il ne perdait jamais Sancho de vue. Voyez comment il ramène vers le centre l'opinion relative à Pasteur. C'était là son attitude fondamentale dans sa vie de tous les jours comme dans ses travaux théoriques. Il aimait évoquer le destin d'Hygée et de Panacée, les deux filles d'Esculape, le dieu grec de la médecine. Elles représentaient à ses yeux les deux pôles de la médecine: Panacée, le médicament, la causalité linéaire, l'action mécanique et Hygée l'hygiène, l'art de vivre, la causalité complexe, environnementale.

L'épidémiologiste

En 1975, Ivan Illich, de regrettée mémoire, publiait la Némésis médicale, un brûlot qui devait, combiné avec plusieurs autres critiques du même genre, ébranler momentanément la médecine Panacée de l'époque. Quelle était la principale source d'Illich, qu'est-ce qui donnait à son livre un poids dont l'establishment scientifique devait tenir compte? René Dubos et ses travaux sur la tuberculose. Voilà encore notre Don Quichotte en train de miner sa propre gloire. Tout le monde autour de lui et dans le grand public idolâtrait déjà une médecine moderne dont les seules grandes réussites étaient l'asepsie et les antibiotiques. La tuberculose allait bientôt disparaître, quelques années après la découverte de la streptomycine. Tous, savants et ignorants, en ont conclu que c'est la streptomycine qui l'avait éradiquée. Tous sauf René Dubos qui a dit, en substance: «Mais non! Observez bien la courbe de la tuberculose depuis 1850 jusqu'à nos jours et vous constaterez qu'elle a connu un déclin continu au point qu'il devient très difficile de prouver que la streptomycine a eu un impact, fût-il infinitésimal. Le déclin de la tuberculose, devait conclure Dubos, s'inscrit dans l'histoire naturelle des maladies, et s'il existe une cause humaine dans ce cas, c'est du côté de l'hygiène et de l'amélioration des modes de vie qu'on la trouvera et non du côté des antibiotiques.» (4)
A-t-on déjà vu un chercheur d'or exploiter si mal son filon? J'ai comparé Dubos à Don Quichotte. En tant que chercheur d'or c'est à son contemporain Charlie Chaplin qu'il faudrait le comparer. C'est la justice et la vérité nues qui lui importaient, non le bon filon. Mais, je le répète, cet idéaliste avait horreur de l'excès en toutes choses. Vers 1978, je devais le présenter à un groupe de jeunes médecins québécois qui m'avaient demandé de l'inviter en leur nom. Pendant le dîner qui a précédé sa conférence, il a noté que ses hôtes avaient été ébranlés par la critique de la médecine, dont il était lui-même le grand responsable, à un point tel qu'ils doutaient de l'utilité de leur profession et s'y engageaient avec un inquiétant scepticisme. Vers la fin du repas, Dubos s'est tourné vers moi pour me dire: «Ne soyez pas surpris si je dis le contraire de ce à quoi vous vous attendez. Ces jeunes médecins sont désespérés, j'ai le devoir de leur redonner confiance en leur profession.»

«N'en faites pas une théorie»

Ses proches ont dit de lui qu'il était très attentif à autrui. Je puis en témoigner, mais je dois préciser qu'il s'agissait moins chez lui d'une vertu morale que d'une caractéristique de son intelligence. C'était un observateur plus intéressé encore par les rapports humains que par les rapports entre les bactéries. C'est à son contact que j'ai découvert l'étonnement devant la vie dont parle Aristote. «Ma femme et moi, disait-il, nous n'allons pas souvent au théâtre, le théâtre de la vie est tellement plus intéressant que le théâtre de la scène.»
Avant chacune de mes rencontres avec lui, je me promettais de ne pas ouvrir la bouche pour bien profiter de sa présence. Mais il réussissait toujours à déjouer mes plans – ce qui, je l'avoue, n'est pas un exploit – et à me faire parler de choses qui l'intéressaient et l'amusaient. Ce n'était pas de sa part un effort d'attention, ni un effet de sa sollicitude: il avait tout simplement plus de plaisir à apprendre qu'à enseigner, ce qui est, les moins modestes d'entre nous en conviendront, la meilleure méthodologie du travail intellectuel que l'on puisse
imaginer.
Un jour, lors d'une réception en son honneur, la maîtresse de maison se lance dans un long récit sur la façon dont son grand-père chassait les rats de leur maison de campagne en tapant sur des casseroles! Dubos l'écoutait avec le plus grand intérêt. Je dois préciser que cette hôtesse était une femme jolie et fort intelligente, mais ce n'était pas l'unique cause de l'intérêt de Dubos. Il était fasciné par le fait qu'une telle femme raconte une telle histoire comme un fait qu'elle avait observé. À la fin du repas, il lui a dit, avec un aimable sourire: «N'en faites pas une théorie!»
Depuis ce jour, cette expression fait partie de mon vocabulaire. Dubos lui-même n'a jamais fait de théorie. Il avait de l'admiration pour les grands théoriciens, ce qu'était Jacques Monod à ses yeux, mais s'estimant démuni de leur puissante faculté d'analyse, il se gardait bien de les imiter. Il n'a pas fait de théorie au sujet de ses observations sur la tuberculose, si bien que pour la majorité des anthropologues et des historiens de la médecine, c'est à Thomas McKeown que reviendra le mérite d'avoir le premier démontré que l'évolution de la santé et de la maladie dépend plus des déterminants environnementaux, au sens large du terme, que de la médecine. Ce n'est qu'au début des années 1960, plus de dix ans après les travaux de Dubos sur la tuberculose, que McKeown écrira que la première cause de l'amélioration de la santé de ses compatriotes, de 1838 à nos jours, n'aura pas été la médecine curative, mais des facteurs comme le contrôle de la croissance démographique, l'amélioration de la nourriture et l'assainissement de l'environnement.

Dubos et le biomimétisme

L'automne dernier, David Suzuki, le meilleur journaliste scientifique au Canada anglais, a fait à la télévision une série d'émissions fort intéressantes sur ce que j'appelle la science réparatrice, cette science plus soucieuse de la complexité que de la causalité linéaire, cette science qui cherche un modèle à contempler plutôt qu'une ressource à extraire. Suzuki y fit l'éloge de plusieurs chercheurs d'avant-garde ayant tous en commun le même respect de la nature et le même souci de lui demander un remède à des maux causés par une science moderne qui s'en était trop éloignée. Le plus connu de ces chercheurs, Janine Benyus, est l'auteur d'un ouvrage remarquable dont le titre est déjà une théorie: Biomicry. Elle y invite les architectes à imiter les guêpes pour construire des édifices légers ou à s'inspirer de la structure des feuilles pour fabriquer des édifices auto nettoyants. Suzuki présentait ces idées avec enthousiasme, sur un ton prophétique, comme de grandes innovations. Pourquoi payer des techniciens en écologie pour faire les prélèvements nécessaires à l'analyse d'un écosystème quand on peut s'en remettre aux abeilles pour une telle tâche? Pourquoi utiliser du plastique, cet excrément du pétrole, pour reprendre le mot de Normand Mailer, pour fabriquer des fils beaucoup moins résistants que ceux qu'une certaine araignée tire des mouches qu'elle dévore?
Le biomimétisme! Voilà un autre domaine où l'on se souviendrait de Dubos comme d'un pionnier s'il s'était donné la peine de faire la théorie correspondant à sa pratique, et si la science américaine était mieux enracinée dans son propre passé. La découverte des antibiotiques résulte en effet d'une observation attentive de la nature et d'un désir de l'imiter, de la mimer. Dubos était agronome de formation. C'est la terre vivante qui l'intéressait. Il avait même déclaré qu'il ne travaillerait jamais dans un laboratoire, mais un beau jour de mai, raconte l'une de ses biographes, alors qu'il était assis dans les jardins du mont Palatin à Rome, il délaissa les engrais pour lire un article de Sergei Winogradsky, un microbiologiste russe qui s'intéressait aux sols. Winogradsky y déclarait que les microorganismes devaient être étudiés dans leur milieu naturel, en compétition avec d'autres bactéries et non pas dans l'environnement artificiel des cultures de laboratoire. Dubos affirma plus tard que sa carrière de chercheur était née à cet instant, à la lecture de cet article. Il adhéra à cette pensée écologique et décida d'étudier la microbiologie, malgré le peu d'attraits qu'avait pour lui cette discipline.» (5) Telle est l'intuition, grande et simple à la fois, qui mit Dubos sur la piste d'une enzyme capable de détruire la capsule protectrice du pneumocoque, premier pas vers la découverte des antibiotiques. Il avait auparavant découvert dans le sol des microbes capables de digérer la cellulose. Or la capsule protectrice du pneumocoque ressemblait beaucoup à la cellulose.
Mais, pour la suite des choses, voici l'aspect le plus intéressant de cette découverte: la bactérie en cause ne produisait l'enzyme efficace contre la capsule que dans certaines conditions. Il s'agissait de sa part d'une adaptation d'une espèce, d'où l'appellation d'enzyme opportuniste qu'on lui réserva.

Dubos et l'écologie populaire

Il conviendrait également d'ajouter le nom de Dubos dans la généalogie de l'hypothèse Gaia, en raison de l'ensemble de son oeuvre, et plus particulièrement de ses travaux sur la symbiose, la résilience. En 1976, la revue Science publiait un article de Dubos intitulé: «Symbiosis between Earth and Humankind». Dans La Terre est un être vivant, James Lovelock range cet article de Dubos parmi les lectures conseillées.
Revenons à l'élément du curriculum de Dubos le plus important pour l'avenir: l'écologie. Dans le domaine de l'écologie savante, la prééminence de Dubos, est incontestable, mais son rôle dans l'écologie populaire n'est pas négligeable. N'oublions pas que pendant la période d'émergence de l'écologie populaire, Dubos avait une chronique dans le New York Times. C'est lui qui a fait bon accueil à un ouvrage radical de Murray Bookchin, Our Synthetic Environment (pseud. Lewis Herber) paru six mois avant Silent Spring, chez Alfred A. Knopf.
Selon l'écologiste québécois Pierre Dansereau, ce qui a ouvert l'ère écologique aux États-Unis vers le milieu de la décennie 1960, ce fut une émission de télévision où René Dubos expliqua «que dans ses efforts pour limiter les méfaits des émanations corrosives, l'industrie automobile dépensait plus d'argent dans la recherche de techniques pour améliorer l'émail des carrosseries que pour protéger les poumons humains.»
Au cours de la décennie qui a suivi ce choc médiatique, Dubos lui-même aurait eu des raisons de croire que, soutenu dans sa cause par la crise du pétrole, il avait réussi à infléchir le progrès de l'industrie automobile dans la bonne direction. Les petites cylindrées japonaises avaient commencé à envahir le marché mondial, contraignant les fabricants de Détroit à cesser de confondre voiture personnelle et autobus personnel. Mais depuis, comme chacun sait, les mégalomanes de l'automobile ont pris leur revanche, non seulement contre les Japonais, mais aussi contre les écologistes et les médecins: ils ont imposé au monde ces véhicules utilitaires tout terrain et tout puissants qui échappent aux normes environnementales réclamées par René Dubos parce qu'ils appartiennent à la catégorie des camions. Près de la moitié des véhicules vendus aux États-Unis ces dernières années étaient de tels monstres, qui n'ont même pas l'avantage de bien tenir la route et sont par là plus dangereux que les petites voitures.
Telle est la puissance du trou noir de l'oubli. Que reste-t-il dans la mémoire publique américaine du choc provoqué par René Dubos, et à la même époque, par le Printemps Silencieux de Rachel Carson? N'exagérons pas l'oubli. On trouve les noms de Carson et Dubos dans toutes les chronologies sur l'environnement ou sur le mouvement écologique contemporain.
Ma crainte cependant, c'est que René Dubos ne soit réduit à un nom, parmi des centaines d'autres dans de telles chronologies et qu'on éloigne ainsi les gens de la vue d'ensemble qui fait de lui un être de tout premier ordre. La plupart des personnes que l'on trouve dans ces listes n'ont fait qu'une grande chose dans leur vie: un livre ou une découverte. Toute la gloire de Rachel Carson, par exemple, provient du son livre Silent Spring. Aldo Leopold, qui figure en première place sur la liste des fondateurs du mouvement écologique, a certes été un excellent savant dans son domaine et un homme de grande culture, mais a-t-il en outre à son crédit une découverte comparable à celle des antibiotiques ou une contribution équivalente à la pensée de Dubos sur la santé et les systèmes de santé?

Trop de titres de gloire

Dans le cas de Dubos, la tentation de l'oubli aura été d'autant plus grande que ses titres de gloire étaient plus nombreux que ceux de la moyenne de ses homologues. Fleming n'a excellé que dans un domaine et Dubos a commis l'erreur d'exceller dans plusieurs domaines, y compris celui d'une culture générale dans un monde qui avait déjà commencé à idolâtrer la spécialisation. Comment voulez-vous qu'on lui pardonne ensuite d'avoir dépassé Fleming dans le seul domaine où ce dernier pouvait faire sa marque? «L'envie a l'éblouissement douloureux», disait Victor Hugo. Dans le cas d'un être qui rayonne intensément depuis plusieurs sommets en même temps, l'éblouissement est particulièrement douloureux. René Dubos s'est-il trompé de siècle, aurait-il dû vivre à la Renaissance?
Mais comme la notoriété n'était pas son premier souci, il a été heureux au XXe siècle dans la métropole du pays des spécialistes ; et si reconnaissant de l'accueil qu'il y reçut qu'on ne sent chez lui aucune amertume causée par les petites mesquineries envieuses que sa culture européenne ne pouvait manquer de lui attirer. Erwin Chargaff, son collègue à l'Institut Rockefeller, fut moins magnanime que Dubos. Il est d'une extrême sévérité pour ses collègues américains, qu'il traite d'hyper spécialistes étroits et barbares, prêts à se vendre à la puissance militaire ou pharmaceutique qui leur permettra de s'enrichir le plus rapidement possible.
Dubos n'appartenait pas à cette catégorie d'immigrés qui se reconnaissent plus de droits que d'obligations à l'égard du pays qui les accueille. Il était homme à s'effacer délibérément devant un collègue, si c'était là, à ses yeux, une façon de se montrer reconnaissant à ses hôtes.
Il était philosophe, si l'on entend par ce mot un ami du savoir qui tire un tel plaisir de son activité intellectuelle qu'elle est à elle-même sa récompense. Certes, en raison de son manque d'intérêt pour l'analyse et de son aversion pour la théorie, nous ne devons pas nous attendre à trouver dans son oeuvre l'équivalent de la Critique de la raison pure ; mais il est philosophe, si l'on veut bien accepter dans cette confrérie, à côté de ceux qui troublent leurs eaux pour les faire paraître profondes, ceux qui les purifient pour les rendre transparentes. Il écrivait dans le style simple et clair de ses compatriotes français du XVIIIe siècle, avec une affection particulière pour ce qu'il appelait les paraboles. Qui donc a dit que la clarté française avait émigré aux États-Unis au début du vingtième siècle? René Dubos l'avait accompagnée. Peut-être a-t-il souffert sur le plan littéraire de devoir pratiquer deux langues simultanément. Il n'a sûrement pas souffert d'avoir fait des efforts en deux langues pour dire clairement ce qu'il concevait encore plus clairement.
Si Montaigne mérite le titre de philosophe, Dubos le mérite pour les mêmes raisons et quelques autres. Mais Dubos n'était pas sceptique au même degré que Montaigne, pas de la même manière en tout cas. C'est Lewis Thomas, l'auteur du Bal des cellules qui sera le Montaigne américain. Au contact de Dubos, Lewis Thomas avait pris goût à la culture européenne et quand il a découvert Montaigne, toujours grâce à Dubos, il l'a étudié à l'américaine, avec une ferveur naïve. «Montaigne, écrit Thomas, devient notre ami dès les premières pages des Essais; et notre ami à mesure que nous avançons dans la lecture de l'œuvre.» Ce que l'essayiste américain aime le plus chez l'essayiste français, c'est son humanisme sans illusions sur l'humanité, et sur lui-même: «Je n'ay veu monstre et miracle au monde plus exprès que moy-mesme... Plus je me hante et me connois, plus ma difformité m'estonne, moins je m'entends en moy!».
On a pu reprocher à Montaigne d'être un diplomate de la vérité. Dubos ne mérite pas ce reproche. Son sens du juste milieu qui peut le porter à des compromis comme on en trouve dans les Essais, le rapproche plus d'Aristote que de Montaigne. L'homme dans l'œuvre de Dubos a une place bien circonscrite dans la biosphère et il en est de même pour la biosphère dans l'ensemble du cosmos. De nombreux savants américains, dont le physicien Fritjof Capra, ont réclamé une réforme du curriculum universitaire telle que la première année pour tout le monde serait consacrée aux sciences de la vie. Quel est le premier auteur qu'il faudrait mettre à ce programme? René Dubos, sans l'ombre d'un doute, l'auteur de Célébrations de la vie et de L'homme et l'adaptation.
En se souciant ainsi de trouver le point d'équilibre entre l'Europe et l'Amérique, Dubos risquait de déplaire aux uns et aux autres. En ne se souciant aucunement des frontières entre les disciplines lorsqu'il parlait de l'homme, il courait d'autre part le risque de se voir rejeté par les spécialistes de chacune de ces disciplines: anthropologie, histoire, psychologie, philosophie. Ce qui ne manqua pas de se produire. L'homme et l'adaptation et L'homme interrompu sont d'excellents ouvrages d'anthropologie, invalidés dans bien des milieux parce que l'auteur n'était pas anthropologue. Dubos est un double apatride, un penseur sans pays ni discipline.
Triple apatride devrais-je dire, car la troisième patrie de ses homologues c'était l'avenir, ou si l'on préfère, un présent tourné vers l'avenir. Or c'est en se tournant vers le passé que Dubos préparait l'avenir. Fréquemment dans son oeuvre il fait allusion au plus lointain passé, à l'homme des cavernes, à la Chine ancienne. Les prodigieuses facultés d'adaptation de l'être humain le fascinaient et l'inquiétaient en même temps. Il suffirait, se plaisait-il à répéter, de quelques années d'apprentissage à un homme des cavernes pour devenir astronaute. Et il se demandait ensuite, avec angoisse, quel serait le prix à payer pour ces prodigieux écarts dans les comportements auxquels l'accélération de l'histoire soumet les êtres humains. Ce qui l'amena à s'intéresser aux rythmes biologiques. Il m'a raconté qu'il avait usé de son influence pour permettre à un jeune biologiste américain de faire les premières recherches en chronobiologie. Nouveau titre de gloire.

L'Occident écologiste

Son sens de l'équilibre lui avait-il fait pressentir que plusieurs de ses collègues américains chercheraient du côté de l'Orient une tradition où la science moderne serait compatible avec la religion? Sans chercher à nier les vertus du bouddhisme à cet égard, il y fera au contraire souvent allusion, il prendra courageusement la défense d'un Occident injustement méprisé à ses yeux sur ce plan. D'où ces pages radieuses dans Les dieux de l'écologie, sur l'Arcadie et sur l'Europe cistercienne, deux des moments du passé où l'humanité s'est rapprochée de l'idéal d'harmonie avec la nature. Existe-t-il un meilleur exemple de médecine environnementale efficace que l'éradication de la malaria en Europe par l'assèchement des marécages, oeuvre des moines cisterciens? Portés par la même inspiration, les cisterciens ont donné au paysage européen ce visage souriant, si humain dont il ne s'est pas encore complètement départi en dépit de toutes les agressions dont il a été l'objet.
Dubos était extrêmement sensible à la différence entre les cultures. Il se passionnait pour les histoires de chocs culturels vécus par les Américains à leur premier contact avec l'Europe. Alors, racontez-moi quel a été ce choc culturel dans votre cas. «Depuis que j'ai vu toutes ces vieilles maisons de pierre en Europe, lui ai-je répondu, l'Amérique m'apparaît comme un immense terrain de camping. Ici, même les maisons sont des automobiles.»
Il reste quelques vieilles maisons de pierre au Québec, il en reste beaucoup plus en tout cas que dans la plupart des États américains. Peut-être est-ce là ce qui nous rapproche de l'Europe et de René Dubos. C'est sans doute ce qui explique pourquoi il a reçu ici un accueil particulièrement chaleureux, pourquoi aussi il est venu si souvent. Ce ne sont sûrement pas les honoraires en dollars canadiens qui l'incitaient à traverser la frontière. Au cours de la décennie 1970, il a été l'un des intellectuels étrangers les plus recherchés et les plus aimés au Québec.
Je me souviens d'une promenade avec lui dans le Vieux Québec. Nous regardions ensemble les vieilles maisons de pierre. «Il faudra, me dit-il, qu'à l'avenir la médecine s'intéresse davantage aux symboles.» Il a toujours attaché autant d'importance à l'environnement humain symbolique qu'à l'environnement naturel, ce en quoi il était demeuré plus Européen qu'Américain. Contrairement à l'Américain Aldo Léopold, par exemple, il a toujours pensé que l'intervention humaine avait souvent des effets bénéfiques, pour la nature elle-même. Rien ne l'amusait plus que ce passage de l'un des romans de François Mauriac où il présente la forêt des Landes comme une merveille de la nature alors qu'elle est le parfait exemple de l'aménagement à la manière européenne.
Voici de nouveau le juste milieu. Il avait horreur des excès en toute chose. En cela il était extrêmement français. «Tout ce qui est exagéré est insignifiant.» Ce mot de Talleyrand résume parfaitement son œuvre. Il est tout à fait dans l'ordre des choses que sa notoriété n'ait rien d'excessif. Il a voulu qu'il en soit ainsi. Quelques heures avant sa mort, il a demandé qu'on lui fasse entendre les cloches des églises de France, et non les trompettes de la renommée. La place publique avait toujours été équilibrée dans sa vie par sa retraite à Garrison, sa maison près de la rivière Hudson. C'est là que, pour parler de la nature, il a trouvé aux antipodes du romantisme, européen ou américain, des accents qui rappellent ceux de Virgile et de Méléagre.
«J'ai traversé de nombreux printemps et les souvenirs vivaces que j'en ai ne pourront jamais atténuer le miracle de contempler une fois de plus la résurrection de la Nature. J'ai toujours le souvenir de l'odeur du riche sol des fermes de l'Ile de France, fermentant aux premières chaudes journées de l'année. Je suis toujours ébloui par les fleurs extraordinaires qui apparaissent subitement du désert dans la garrigue méditerranéenne ou dans le Sud-ouest américain. Durant les premiers jours d'avril dans la vallée de l'Hudson, je suis toujours émerveillé par les bourgeons rouges dressés des érables des marais, par le plumage chatoyant des rouges-gorges bleus, par les trilles surnaturels des oiseaux, par le roucoulement des colombes et par les merles aux ailes rouges.» (6)

Notes

1) Jean-Paul Escande, Qui a découvert les antibiotiques, les Cahiers de Science et Vie, Paris, Avril 2000.
2) Carol L. Moberg et Zanvill A. Cohn, Pour la Science, édition française de Scientific American, juillet 1991.
3) René Dubos, Le microbe et le terrain.
4) Voir Rene Dubos, Tuberculosis, Man and Society. Settle, Brown, Boston, 1952.,
5) Carol L. Moberg et Zanvill A. Cohn, Pour la Science, édition française de Scientific American, juillet 1991.
6) Les dieux de l'écologie, Fayard, coll. Écologie, Paris, 1973.


Les trois principes de l'écologie: la spécialisation, l'adaptation, la coopération
«En étudiant les sols, Dubos fut séduit par ce qu'il appelait la "nécessité philosophique" des trois concepts qui façonnèrent sa vie scientifique: selon le premier, le recyclage de la matière organique résulte du travail d'un nombre considérable de microbes, qui accomplissent chacun un nombre limité de tâches bien définies. Selon le deuxième, les microorganismes ne digèrent pas indistinctement n'importe quelle nourriture: ce sont des goûteurs exigeants et très spécialisés, mais leur variété est telle qu'on peut souvent isoler un type correspondant à une substance nutritive particulière.
Enfin quand Dubos étudia des mélanges complexes de micro-organismes, il découvrit que la croissance et le comportement des uns agissaient sur ceux des autres, et que l'environnement déterminait également leurs diverses activités. Il élargit ensuite la notion d'interactions écologiques en élaborant une théorie où les microbes et les hommes, puis les hommes et les planètes interagissaient.»

source: Carol L. Moberg et Zanvill A. Cohn, Pour la Science, édition française de Scientific American, juillet 1991.

NDLR.: Les mots spécialisation, adaptation et coopération pour désigner les trois principes sont de nous dans ce contexte. On les retrouve évidemment en plusieurs endroits dans l'œuvre de Dubos.

Il y a ensuite la proposition que faisait René Dubos juste avant de mourir, au cours d'une conférence internationale : considérer que tout problème d'environnement pose cinq sous-problèmes qu'il avait appelés l'ensemble des cinq E: problèmes Économiques, Énergétiques, Écologiques, Esthétiques et Éthiques.
source: Un Autre regard sur la Santé

 

Vers demain... par hier
Le premier chapitre de la Genèse parle de la domination de l'homme sur la nature. La règle bénédictine, quant à elle, semble inspirée davantage par le second chapitre, où le Seigneur place l'homme dans le jardin d'Éden non comme patron, mais plutôt comme gestionnaire. Dans toute l'histoire de leur ordre, les moines bénédictins ont multiplié leurs interventions dans la nature, en tant qu'agriculteurs, bâtisseurs et chercheurs. Ils ont provoqué de profondes transformations du sol, des eaux, de la flore et de la faune, mais d'une manière assez sage pour que leur gestion de la nature restât le plus souvent compatible avec le maintien de la qualité de l'environnement.
En ce domaine précis, les cisterciens jouèrent un rôle social de premier plan, parce qu'ils établirent leurs monastères dans des vallées boisées et dans des régions marécageuses infestées de malaria, donc difficilement habitables. Avec l'aide des laïques, ils défrichèrent les forêts et drainèrent les étangs, transformant ainsi des zones pestilentielles en terres cultivables qui devinrent des foyers de vie saine et prospère. Ils acquirent une telle renommée dans la lutte contre la malaria par la destruction des marécages qu'ils reçurent mission d'assécher la campagne romaine.
Bien entendu, les cisterciens n'étaient pas motivés par le désir de créer des terres cultivables. Leur choix de lieux retirés pour l'adoration de Dieu s'explique certainement aussi par une attitude mystique envers la nature. Saint Bernard se montra sensible à la beauté du site lorsqu'il décida d'établir à Clairvaux son monastère cistercien.
«Cet endroit a beaucoup de charme, il apaise grandement les esprits lassés et soulage les inquiétudes et les soucis; il aide les âmes en quête de Dieu à se recueillir, et leur rappelle la douceur céleste à laquelle elles aspirent. Le visage souriant de la terre y prend des teintes variées, la bourgeonnante verdure du printemps satisfait notre vue, et ses suaves senteurs flattent notre odorat... Et si la beauté de la campagne me charme extérieurement par sa douce influence, je n'en éprouve pas moins des délices intimes, en méditant sur les mystères qu'elle nous cache.»

René Dubos, Les dieux de l'écologie, Fayard, coll. Écologie, Paris, 1973.

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