Jouvenel Bertrand de

1903-1987


Grand visionnaire de l'écologie, libéral en économie comme en politique ou en culture, ce brillant causeur aux multiples visages a été, avec le groupe Futuribles, l'un des pionniers de la prospective. Mort il y a maintenant un peu moins de quinze ans, il séduit encore, toutes colorations politiques confondues.
source: Cécile Romane

Visite de Jean-François Revel chez Bertrand de Jouvenel

Dans ses mémoires, Le voleur dans la maison vide, Jean-François Revel, apporte un précieux témoignage sur certains aspects controversés de la vie et de l'oeuvre de Bertrand de Jouvenel.

«J'avais devant moi, écrit Revel, l'un des fondateurs mondialement connus de la science politique contemporaine, le précurseur d'une réflexion originale sur l'avenir, l'auteur de livres fondamentaux et classiques, dont les titres vigoureux et concis étaient gravés dans tant de mémoires : Du pouvoir, De la souveraineté, De la politique pure, L'Art de la conjecture. Et j'avais aussi devant moi celui dont une légende persistante faisait le modèle du personnage de Colette, Chéri. Je dis bien légende, car Chéri était achevé quand Bertrand de Jouvenel rencontra Colette, mais légende qui devait se transformer en demi-vérité ; la romancière éprouva pour le jeune Bertrand une inclination qui semble bien être allée jusqu'à la chute. Non sans drames : Colette, en effet, était la seconde femme du père de Bertrand, ce personnage considérable de la IIIe République que fut Henry de Jouvenel, sénateur de la Corrèze, ministre, ambassadeur, l'une des têtes pensantes et influentes du Parti radical, alors pivot du système. Adorateur et adoré des femmes, adepte du maternage sinon du matriarcat, certes, Bertrand devait l'être toujours.»

Oubliant ou ignorant qu'il était reçu chez Léon Blum et qu'il avait autant d'amis dans les partis de gauche que dans les partis de droite, on le range parfois, avec mépris parmi les collaborateurs et les fascistes. C'est là, pour Revel, une réputation imméritée. «Sous l'Occupation, il est chargé par les services de renseignement français, où il est entré en 1939, de surveiller les milieux de la collaboration. Une vieille amitié avec Otto Abetz, l'ambassadeur du IIIe Reich en France occupée, lui en rend l'accès facile, ce qui ne manque pas de lui forger à lui-même une réputation gênante et imméritée de collaborateur.»
Jean-François Revel, Mémoires – Le voleur dans la maison vide, Éditions Plon, 1997, p. 433.

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