L'expérience de L'Orégon
L'Oregon a abordé cette question de la façon suivante. Environ un millier de citoyens de cet État, réunis dans 50 assemblées locales, ont uni leurs efforts pour établir une liste de priorités parmi les 1,600 interventions médicales qui leur étaient présentées.
Il se sont d'abord entendus sur un principe fondamental: l'Orégon offrirait des services limités à tous les pauvres. Précisons ici qu'aux États-Unis le système de protection est mixte: assurance privée pour ceux qui peuvent payer les primes et Medicaid pour les autres. La question qui se pose dans tous les États est la suivante: faut-il admettre tous les pauvres au Medicaid, quitte à limiter les services offerts? Faut-il plutôt offrir toute la gamme des services à un nombre restreint de pauvres? L'hypothèse qu'on puisse offrir toute la gamme des services à tout le monde est partout exclue. On comprend qu'il en soit ainsi quand on sait que dans des hôpitaux comme la clinique Mayo, un examen vraiment complet comporte plus de 900 tests.
Une fois admis le principe qu'on n'offrirait pas toute la gamme des services, il restait à dresser la liste de ceux qui seraient retenus. C'est la tâche que les 1,048 citoyens - que l'on peut considérer comme des députés - se sont assignée, avec l'aide des experts qui leur fournissaient des données précises sur l'efficacité des interventions étudiées.
Ils ont réussi à classer les 1600 interventions étudiées par ordre de priorité. Les citoyens de l'Oregon ont accordé plus d'importance aux mesures préventives qu'aux mesures curatives. Par exemple, les mesures de prévention et de dépistage du Sida sont au sommet de la liste, tandis que les traitements dans les derniers stades de la maladie sont relégués au bas de la liste. De manière analogue, les soins prénatals l'emportent sur les transplantations d'organes. Quand la liste aura reçu sa forme définitive, il restera au parlement à tirer la ligne après la 500e ou la 1000e intervention selon les ressources qu'il sera en mesure d'allouer à Medicaid.
L'exercice auquel on s'est livré en Orégon concernait exclusivement la santé. Ne serait-il pas souhaitable que l'on susciter au Québec un exercice semblable qui porteraient sur l'ensemble des priorités?
Ce serait la seule façon de ramener les dauphins à leur premier rôle qui est d'offrir des services, non pas à leurs conditions d'abord, mais à celles des citoyen qui en assument le coût.