«Quelle femme portera cette robe-là?» fut la question que le narrateur se posa lorsqu'il aperçut, dans la vitrine d'un magasin à Paris, une robe bleue d'une beauté singulière. L'automne, la nuit et la femme qu'il revêtit de la robe lui font découvrir le visage de la mort. La mort qui, dans ce conte, révèle les traits de l'accomplissement.
Je n'éprouvais aucun regret d'avoir fait une folie quand ayant rapporté la robe chez moi, je l'étalai sur mon lit pour la contempler à loisir. [...]
Parfois, cependant, la robe semblait soulevée par une sorte de désir. Je sentais la soie pleine de frémissements, les grains de corail s'entrechoquaient avec de douces plaintes. Je ne savais pas si c'était la créature absente de la robe qui l'appelait ou la robe elle-même, privée de l'être destiné à l'accomplir, qui se tendait vers la femme ignorée pour laquelle elle avait été créée.
Un soir de pluie, un tourbillon de vent précipita une jeune femme contre le narrateur qui s'était réfugié sous un pont de fer.
D'un geste instinctif, où il n'y avait ni coquetterie, ni provocation, elle s'appuya contre mon épaule. J'étais heureux d'une présence humaine, quelle qu'elle fut. [...]
Et la femme, avec son odeur de mousse et de lac, était de la même matière que la pluie, innocente, inconsciente, cruelle, inexorable, désarmée. Sa main ne se réchauffait pas entre mes mains, son épaule devenait toujours plus froide. Elle laissait la pluie ruisseler dans le creux de son corsage jusqu'à ses seins d'émeraude et de gel.
Il l'amena chez lui et la revêtit de la robe bleue
La femme la reçut comme si le fait de revêtir une aussi rare perfection eut été pour elle une chose toute naturelle. [...] Cette créature inconnue s'était revêtue d'une majesté que je n'aurais pu supposer une heure avant lorsque, ruisselante, elle m'avait rejoint sous le pont de fer.
La métamorphose subie par la femme opéra sa puissance sur le narrateur. Elle et lui se partageaient l'amour le temps d'une nuit. Puis, au petit jour, elle disparut emportant avec elle la robe bleue,
Mais le corps que je tenais entre mes bras semblait venir d'un monde auquel, sans lui, je n'aurais pas eu accès. [...]
La femme coula entre mes bras comme une fontaine fraîche. Elle rejoignit la robe, qui se recomposa autour de son corps nu. Le monde originel des choses reprenait ce que j'avais perdu.
C'est ainsi que le narrateur se rendit compte qu'il venait de faire l'apprentissage de la mort à la fois comme dangereuse et attrayante, fraternelle et souveraine.
La mort me révéla son vrai visage, moins étrange et plus dangereux. Je n'aurais pas imaginé qu'elle cachait tant d'attraits et de beauté sous son masque vénitien d'oiseau blafard. On m'avait enseigné à la craindre et à la détester. Mais dès que je découvris en elle une soeur tendre et puissante comme la nuit, dès que j'aperçus qu'elle était introductrice aux métamorphoses majeures, je cessai de fermer les yeux quand je la rencontrais.
Parfois, cependant, la robe semblait soulevée par une sorte de désir. Je sentais la soie pleine de frémissements, les grains de corail s'entrechoquaient avec de douces plaintes. Je ne savais pas si c'était la créature absente de la robe qui l'appelait ou la robe elle-même, privée de l'être destiné à l'accomplir, qui se tendait vers la femme ignorée pour laquelle elle avait été créée.
Un soir de pluie, un tourbillon de vent précipita une jeune femme contre le narrateur qui s'était réfugié sous un pont de fer.
D'un geste instinctif, où il n'y avait ni coquetterie, ni provocation, elle s'appuya contre mon épaule. J'étais heureux d'une présence humaine, quelle qu'elle fut. [...]
Et la femme, avec son odeur de mousse et de lac, était de la même matière que la pluie, innocente, inconsciente, cruelle, inexorable, désarmée. Sa main ne se réchauffait pas entre mes mains, son épaule devenait toujours plus froide. Elle laissait la pluie ruisseler dans le creux de son corsage jusqu'à ses seins d'émeraude et de gel.
Il l'amena chez lui et la revêtit de la robe bleue
La femme la reçut comme si le fait de revêtir une aussi rare perfection eut été pour elle une chose toute naturelle. [...] Cette créature inconnue s'était revêtue d'une majesté que je n'aurais pu supposer une heure avant lorsque, ruisselante, elle m'avait rejoint sous le pont de fer.
La métamorphose subie par la femme opéra sa puissance sur le narrateur. Elle et lui se partageaient l'amour le temps d'une nuit. Puis, au petit jour, elle disparut emportant avec elle la robe bleue,
Mais le corps que je tenais entre mes bras semblait venir d'un monde auquel, sans lui, je n'aurais pas eu accès. [...]
La femme coula entre mes bras comme une fontaine fraîche. Elle rejoignit la robe, qui se recomposa autour de son corps nu. Le monde originel des choses reprenait ce que j'avais perdu.
C'est ainsi que le narrateur se rendit compte qu'il venait de faire l'apprentissage de la mort à la fois comme dangereuse et attrayante, fraternelle et souveraine.
La mort me révéla son vrai visage, moins étrange et plus dangereux. Je n'aurais pas imaginé qu'elle cachait tant d'attraits et de beauté sous son masque vénitien d'oiseau blafard. On m'avait enseigné à la craindre et à la détester. Mais dès que je découvris en elle une soeur tendre et puissante comme la nuit, dès que j'aperçus qu'elle était introductrice aux métamorphoses majeures, je cessai de fermer les yeux quand je la rencontrais.