Le regard poétique de Baudelaire sur la mort est celui du salut. Un bienfait pour le pauvre. Un lieu où il pourra se reposer et se restaurer. Un de rêve et d'aventure, de lumière et d'extase. Pour les âmes qui souffrent, la mort n'est pas un mal, mais une libération. Pour les esprits qui rêvent, la mort est l'ouverture à des mondes inconnus.
C'est la Mort qui console, hélas ! et qui fait vivre ;
C'est le but de la vie, et c'est le seul espoir
Qui, comme un élixir, nous monte et nous enivre,
Et nous donne le coeur de marcher jusqu'au soir ;
A travers la tempête, et la neige, et le givre,
C'est la clarté vibrante à notre horizon noir ;
C'est l'auberge fameuse inscrite sur le livre,
Où l'on pourra manger, et dormir, et s'asseoir ;
C'est un Ange qui tient dans ses doigts magnétiques
Le sommeil et le don des rêves extatiques,
Et qui refait le lit des gens pauvres et nus ;
C'est la gloire des Dieux, c'est le grenier mystique,
C'est la bourse du pauvre et sa patrie antique,
C'est le portique ouvert sur les Cieux inconnus !
Charles BAUDELAIRE (1821-1867)
(Recueil : Les fleurs du mal)