La question de l'être ouvre le débat philosophique prégnant dans la trajectoire d'Antigone: de la définition du Bien et du Mal à la confrontation du libre-arbitre et de la prédestination, des lois écrites et orales, du divin et de l'humain. L'auteure ne revient pas sur les interprétations amplement commentées de Hegel* ou de Hölderlin* pour se consacrer davantage à l'approche singulière de la philosophe espagnole Maria Zambrano, La Tumba de Antigona dans Senderos, Barcelona, Antropos, 1989, p. 201-265. La théorie philosophico-poétique de Zambrano se fonde sur ce que celle-ci appelle la «vocation Antigone». Le prologue de la pièce est une occasion d'énoncer sa filiation avec les auteurs à «vocation Antigone» à savoir Kierkegaard* et Hölderlin. Assisterait-on ainsi à une christianisation de la figure d'Antigone, surtout par son insistance sur l'espérance? Ou s'agit-il d'un humanisme ? Antigone est la soeur de tous les morts sans sépulture, mais aussi de tous les humains. Stéphanie Urdician découvre dans la figure d'Antigone la «sorrorité universelle». Antigone, ma soeur et notre soeur!
Maria Zambrano rejoint également Heidegger* pour qui l'Être est un lieu de questionnement pour l'homme lorsqu'elle lit dans le sacrifice* d'Antigone la naissance de la conscience. Son Antigone de lumière accède à la vérité par le truchement de la métaphore de la clairière, la Lichtung (clarté, clairière) heideggerienne, lieu de manifestation de l'Être. Zambrano est sur la bonne voie puisque la reprise mythologique (grecque) constitue, selon Heidegger toujours, un retour aux origines, un passage obligé pour atteindre la clarté. Dans La Tombe d'Antigone, l'héroïne s'érige en symbole de la re-naissance de l'Homme (elle fait renaître Oedipe*) et de la Femme* (nacer por si misma: naître pour et par soi-même, au féminin).
Un message d'espérance identique affleure dans l'Antigone de José Bergamin (La Sangre de Antigona, Firenze, Alinea Editrice, 2001, p. 30) qui se déclare: «dans l'attente de mourir, comme si mourir était une renaissance bienheureuse». La clôture de La Sangre de Antigona invoque la solitude du personnage dans la mort. Mais une touche lumineuse laisse prédire que tout n'est pas terminé:
ANTIGONE: Vierge, comme la lumière et comme la lumière solitaire. Pure comme sa voix, comme le nuage, comme le vent... Et comme le coeur vide et ténébreux de la flamme, op. cit., p. 38)
Le sacrifice n'est pas vain car la flamme finale éclaire et sauve le geste jusqueboutiste du personnage. C'est la même conviction qui anime l'Antigone de Henry Bauchau:
Le vrai fond chez Antigone, c'est l'espérance. l'espérance en l'Homme. Elle n'attend pas l'Homme idéal ni l'Homme nouveau. Elle espère dans les hommes tels qu'ils sont, s'ils veulent faire l'effort de changer... Et s'ils ne veulent , ne peuvent pas? Elle espère encore. (Journal d'Antigone [1989-1997], Arles, Actes Sud, 1999, p. 484).
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Emil Teschendorff «Antigone et Ismène»
19° siècle
Un message d'espérance identique affleure dans l'Antigone de José Bergamin (La Sangre de Antigona, Firenze, Alinea Editrice, 2001, p. 30) qui se déclare: «dans l'attente de mourir, comme si mourir était une renaissance bienheureuse». La clôture de La Sangre de Antigona invoque la solitude du personnage dans la mort. Mais une touche lumineuse laisse prédire que tout n'est pas terminé:
ANTIGONE: Vierge, comme la lumière et comme la lumière solitaire. Pure comme sa voix, comme le nuage, comme le vent... Et comme le coeur vide et ténébreux de la flamme, op. cit., p. 38)
Le sacrifice n'est pas vain car la flamme finale éclaire et sauve le geste jusqueboutiste du personnage. C'est la même conviction qui anime l'Antigone de Henry Bauchau:
Le vrai fond chez Antigone, c'est l'espérance. l'espérance en l'Homme. Elle n'attend pas l'Homme idéal ni l'Homme nouveau. Elle espère dans les hommes tels qu'ils sont, s'ils veulent faire l'effort de changer... Et s'ils ne veulent , ne peuvent pas? Elle espère encore. (Journal d'Antigone [1989-1997], Arles, Actes Sud, 1999, p. 484).
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Emil Teschendorff «Antigone et Ismène»
19° siècle