Poète flamand d'expression française, né le 21 mai 1855 à Saint-Amand-sur-Escaut (Belgique). Il fait ses études de droit à l'Université de Louvain et s'inscrit au barreau de Bruxelles en 1881 où il a peu de succès. Dès le collège Sainte-Barbe à Gand, il avait commencé à écrire des vers. Très tôt, il abandonne sa toge d'avocat et consacrera désormais sa vie à la poésie. Entre sa première oeuvre Les Flamandes et l'oeuvre du poète cinquantenaire Toute la Flandre, il fait de grands voyages et séjourne à Paris et Londres, en Espagne et en Allemagne. Il traverse une grande crise psychique qui touche presque à la folie. La trilogie de Verhaeren : Les soirs, Les Débâcles, Les flambeaux noirs décrit l'histoire de son âme en détresse. « Un poète s'est trouvé qui, comme un médecin, a suivi obstinément les symptômes de son mal jusque dans la douleur la plus lancinante, et qui, du processus d'une inflammation nerveuse, a su faire un poème immortel.» [S. Zweig, p. 54) Lorsque le malade atteint à la guérison, il devient le poète lyrique de la vie moderne et chante la foule, les villes, les usines, le progrès, la démocratie, l'Europe. Lorsque l'homme atteint à sa pleine maturité, il construit un poème cosmique empreint de métaphysique et de religion. Son lyrisme universel tente de faire la synthèse du monde où il découvre Dieu dans l'humanité. C'est l'heure de l'affirmation joyeuse de la vie et de l'espoir dans un avenir harmonieux: « Nous apportons, ivres du monde et de nous-mêmes, Des coeurs d'hommes nouveaux dans le vieil univers» (« La ferveur» dans La multiple splendeur). Pacifiste durant la première guerre mondiale, il meurt accidentellement dans la gare de Rouen (France) en 1916 après avoir donné une conférence en faveur de la paix.
«Émile Verhaeren n'est à proprement parler ni un poète anarchiste, ni un penseur anarchiste et certainement pas un anarchiste dans le sens stricte du terme, mais il a manifesté très clairement sa sympathie à l'égard du mouvement anarchiste, voire pris son parti de diverses manières à partir des années 1890 jusqu'au début de la première guerre mondiale. En témoignent ses contacts réguliers avec bon nombre d'auteurs et d'artistes anarchistes, les contributions importantes livrées en faveur de la cause anarchiste dans les périodiques libertaires les plus divers, le message transmis dans ses poèmes et dans ses recueils les plus célèbres, comme Les Villes tentaculaires ou Les Villages illusoires. Convaincu du rôle que le poète pouvait jouer dans la lutte contre les injustices sociales et les systèmes d'exploitation politiques, il s'est engagé à collaborer à la réalisation d'une société harmonique future. Le fait que des artistes anarchistes (songeons à Signac scandant tous les matins Le Forgeron avant de se mettre au travail) se soient reconnu dans ses textes l'a certainement confirmé dans sa vocation de contribuer effectivement au «grand changement». Cruciale était la manière dont l'art était , selon lui, en mesure de participer de façon autonome aux transformations à venir, à savoir par l'intermédiaire de la thématique abordée, du programme narratif proposé mis principalement par l'innovation dans les modalités d'expression poétiques. Mais si cette subtilité formelle n'a pas été vraiment perçue et pleinement appréciée par le mouvement anarchiste, l'acte subversif et utopiste dont il l'avait investie a profondément influencé les mouvements d'avant-garde. En grande partie grâce à Verhaeren , les adeptes du futurisme, de l'unamisme et de l'expressionnisme ont constaté l'existence d'une relation entre la révolution artistique et la révolution sociale: les innovations dans les modes de perception et d'expression artistiques sont en effet susceptibles de transformer les consciences humaines et de créer des visons du monde alternatives.» (David Gullentops, «Anarchisme et avant-garde chez Émile Verhaeren» dans B. Meazzi, J.-P. Madou et J.-P. Gavard-Perret (dir.), Une traversée du XX° siècle: arts, littérature, philosophie, Université de Savoie, 2008, p. 151-152)
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Émile Verhaeren
Provinciaal Museum Verhaeren