Syndrome d’immunodéficience acquise. Il frappe autant les hétérosexuels que les homosexuels. Relativement contrôlée en Occident, cette grave maladie virale fait des ravages en Asie et en Afrique où le nombre des femmes* séropositives et des enfants atteints par le virus est très élevé. Afin d’évoquer la profondeur des drames vécus, rappelons le récit rapporté par Lazare Kolyang (Quotidien Mutations). La population d’Éfok, localité située dans le département de la Lékié au Cameroun, a vécu un après-midi de cauchemar le jeudi 12 mars 2006. Une dame, appelée affectueusement «Ma Marie» et séropositive depuis longtemps, a décidé d’abréger ses jours en mettant le feu au matelas sur lequel elle était alitée depuis quelques mois. Deuxième épouse d’un foyer où cohabitaient trois femmes, cette dame avait quitté le ménage pour s’établir seule, loin de son fils resté avec son père. Elle avait été traitée à l’hôpital central de Yaoundé où elle était arrivée dans un état très avancé de la maladie. Son état continuant de se dégrader, elle avait quitté l’hôpital pour se retrouver à Éfok, village du père de son enfant, où sa belle-sœur et sa belle-mère veillaient sur elle. On avait dû renoncer à l’envoyer au domicile de son ancien mari, pressenti pour l’accueillir, à cause de l’opposition de la coépouse.
STATISTIQUES
Ne disposant pas de statistiques fiables à l’échelle mondiale, on se limitera à une étude comparative des taux ajustés de mortalité par sida et par suicide dans les régions urbaines du Canada* de 1996 (Statistique Canada, Indicateurs de la santé, no 1, 2002). Ainsi, le taux de mortalité par sida sur 100 000 personnes est à Vancouver de 20,6, à Montréal de 13,2, à Toronto de 10,5, à Calgary et à Ottawa de 4,1 et à Winnipeg de 2,4. Le taux de mortalité par suicide est à Montréal de 14,6, à Calgary de 13,8, à Winnipeg de 11,2, à Toronto de 8,3 et à Ottawa de 4,8. Un nombre de cas individuels indiquent le lien qui existe de fait entre le suicide et le sida, mais les données nous manquent pour vérifier le nombre de sidéens qui se suicident seuls ou qui demandent de l’aide pour le faire. En 1999, la Société canadienne du sida (SCS) a demandé la légalisation de l’aide au suicide et de l’euthanasie volontaire active, pour les personnes en phase terminale d’une maladie chronique. En revanche, elle souligne que la prévention du suicide et l’aide aux personnes vivant avec le VIH-sida demeurent des priorités. Par conséquent, un soutien approprié doit être donné à ces personnes et à leurs proches. Cette demande est en accord avec le principe d’autonomie* et le droit à l’autodétermination. Il n’est pas juste d’obliger à continuer de vivre ceux qui ne le désirent plus. Ils devraient avoir le droit de quitter ce monde lorsqu’ils se rendent compte que la qualité de leur vie n’existe plus ou lorsque leur douleur ou leur souffrance sont trop grandes. (VIH/SIDA et droit, vol. 4, no 4, été 1999). Le 6 février 2001, la cour supérieure de justice de l’Ontario a rejeté la requête de Jim Wakeford ayant pour objet de faire déclarer inconstitutionnels les articles du code criminel qui interdisent le suicide assisté*. Wakeford est un Torontois qui vit avec le VIH-sida et qui milite aussi pour le droit de consommer de la marijuana à des fins médicales (VIH/SIDA et droit, vol. 6, nos 1-2, 2001).
ÉTUDES
On a pu dire des décennnies 1980 et 1990 qu’elles ont été celles du développement de la «culture du sida». Ainsi, au début des années 1990, on a pu écrire: «Le sida est sans conteste devenu aujourd’hui la maladie de notre fin de siècle. Par ses associations avec le sang, le sexe et la mort, il traduit les représentations de la société actuelle quant à ses fondements ontologiques et ravive en même temps les figures discursives attachées aux épidémies antérieures, telles la peste et la syphilis, qui avaient eu, elles aussi, une valeur symbolique et réflexive à leur époque» (J. J. Lévy et A. Nouss, Sida-fiction. Essai d’anthropologie romanesque, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 1994, p. 13). Autour de cette pandémie, toute une œuvre romanesque a été créée dont les auteurs sont des sidéens. La littérature du sida, trempée de chair et de sang, de combat et de désespoir, est traversée par une sensibilité éthique*. En effet, le désir de vivre s’exprime dans la recherche d’une sexualité libre de toute contrainte et donc dangereuse pour la santé, tandis que le choix de mourir peut s’imposer pour nier la dimension fatale de la mort. «La mort volontaire apparaît une option possible, sinon inéluctable, vécue consciemment et sans dimension tragique, activement ou passivement, offrant l’accès à une fin plus sereine ou plus digne, comme elle peut aussi s’inscrire dans un rituel de mort où la personne atteinte, mais aussi son compagnon choisissent la mort volontaire comme moyen d’échapper à la maladie, comme une forme de guérison et une «force de la relation amoureuse qui transcende la fatalité» (p. 99-100). Le sida ouvre sur la possibilité de l’avènement d’«une nouvelle conscience identitaire, vécue et énoncée sous le signe du risque et du tragique». La logique de la catastrophe apocalyptique se dessine comme l’envers d’un message d’espoir: la noirceur du passé [ou du présent] promet la lumière du futur» (p. 184). Le progrès médical et la transformation des mentalités face au sida sont des promesses sur fond de catastrophe et de ruine, de fragmentation et de destruction des corps, d’enfer médical, de honte* et mélancolie*.
Dans La vie, le désir et la mort. Approche psychanalytique du sida, Marie-Françoise Brunet-Bourdin repère «la spécificité des réactions psychiques des patients siédéens et notamment, leur faculté toute particulière par rapport à des sujets atteints d'autres maladies mortelles (ici, le cancer généralisé) d'opérer des clivages qui vont leur permettre de survivre si l'on sur-active la pulsion de vie qui trop souvent avec le temps s'estompe au profit de la pulsion de mort.» (Préface de Claude Lorin, op. cit., Paris, L'Harmattan, «Psychologiques», 2001, p. 13)
PRÉVENTION
Le 1er décembre 2007, la journée mondiale de lutte contre le sida fut consacrée au thème «stop sida. tenons notre promesse». «Nous intervenons dans tous les champs de lutte contre le VIH, de la prévention à la distribution des anti-rétroviraux en passant par la prévention de la transmission mère-enfant », explique Michel Brugière, directeur général.
Si cet accès aux anti-rétroviraux s’avère vital, l’association développe également un plaidoyer permanent auprès des autorités sanitaires pour faciliter la prise en charge des malades. En Tanzanie, par exemple, un projet d’aide aux orphelins du sida a commencé avec beaucoup de difficultés au début des années 1990. Les activités de la mission, et notamment le programme de prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant pour les femmes enceintes, sont aujourd’hui citées en exemple dans le pays.
UNE NÉCESSAIRE VOLONTÉ POLITIQUE
Un programme VIH/sida se construit dans la durée et évolue en fonction du contexte politique et sanitaire, national et international. Année après année, les équipes ont démontré auprès des autorités sanitaires la faisabilité de programmes réputés complexes auprès des populations les plus marginalisées. Notre approche est de mettre en lumière le caractère d’urgence de santé publique que constitue cette pandémie et de faire en sorte que la lutte contre le sida soit considérée comme une priorité nationale en termes de financements et de ressources humaines.
TRAITEMENTS : PRIORITÉ À L’APPROVISIONNEMENT ET À L’ACCÈS
« Aujourd’hui, les traitements antirétroviraux posent deux questions : leur approvisionnement et leur accessibilité par les patients », résume Michel Brugière. « Il faut faire en sorte que les centres de santé disposent à tout moment de médicaments de qualité car il n’y aurait rien de pire que de devoir interrompre un traitement au bout de plusieurs mois. Ensuite, il est indispensable que la prescription des anti-rétroviraux et la prise en charge des malades soient réalisées au plus près des populations. Nous avons donc le projet de développer cet accès gratuit aux traitements dans les centres de santé périphériques puisque pour l’heure, ils sont surtout réservés aux grandes villes comme Phnom Penh au Cambodge, Bukoba en Tanzanie, ou Rangoon en Birmanie ». Cette perspective ouvrirait la porte des soins à de nombreuses populations isolées.»(http://www.medecinsdumonde.org/fr/thematiques/lutter_contre_le_sida)