[Poème reçu via Françoise Ruban, France.
Avec notre profonde reconnaissance]
Parfois je suis pleine de voix anciennes
le moment vient on entend Son pas
on ne voit rien dans le miroir qui n'y soit déjà
on croit vivre longtemps l'immédiat
alors qu'il file à vive allure
Et ce ciel terriblement vivant qui nous guette
par-dessus les étoiles sans jour et sans nuit
elle prie
muettes les lèvres remuent
Où s'ouvre donc cette porte
qui ne referme que sur soi?
O lumière! Est-elle dehors est-elle dedans?
peut-être l'avait-elle un intant entrevue quand la brèche s'entrebâillait?
Les jours se suivent de si près en la souffrance
à peine un peu de nuit pour séparer
et les nuits s'emboîtent si étroitement aux nuits
les jours entre elles s'effacent.
La jeunesse en secret la visite
alors qu'elle se débate et halète
aborde l'autre rive
une icône en main.
Aux bouts d'une longue table
deux hommes qu'elle ne sut aimer
l'accueillent sur le seuil
et disposent sur son front
le baiser fraternel et glacé qui scelle leur complicité
La tombe de ma mère conduit les pas
vers le plus haut silence
peut-être que le miroir du souvenir
n'est ni mémoire ni souvenir
peut-être que les larmes d'un instant de peine
ne frémissent pas sous la chaleur d'un baiser
peut-être n'y a-il pas de mystère
sous cette dalle
où se penche le bouleau
peut-être que mes lèvres ne savent plus prier
et l'image s'est assombrie dans le passé
de douleur sous la solitude
peut-être éclatera-t-il mon coeur d'un mal encore plus aigu
peut-être que la lumière usée de ses yeux
ne pénêtre plus en mon âme
tu es la malheureuse telle étais-tu vivante
peut-être me pardonneras-tu
Tatiana Roy
Ne restera qu'un peu de vent