L'Encyclopédie sur la mort


Testament de Ramon Sampedro (Extraits)

Ramon Sampedro

Ce testament a été publié dans le quotidien El Païs le 5 février 1998 sous le titre «Ramon San Pedro dénonce dans son testament la passivité de la société face à l'euthanasie». Nous reproduisons ici le texte en français tel qu'il figure dans Jean-Luc Romero*, Les voleurs de liberté, Florent Massot, 2009, p. 229-232.
À Messieurs les juges, aux autorités politiques et religieuses,

Vous venez voir les images d'une personne qui soigne un corps atrophié et déformé, le mien, et je vous demande: quel sens a pour vous le mot «dignité»?

Quelle que soit la réponse que vous dictera votre conscience, pour moi, la dignité n'est pas cela. Ce n'est pas cela, vivre dans la dignité!

À l'instar de quelques juges et de la majorité de ceux qui aiment la vie et la liberté*, je crois que vivre est un droit et non pas une obligation. Néanmoins, j'ai été obligé de supporter cette situation pénible pendant 29 ans, quatre mois et quelques jours.
Je refuse de continuer!

[...]

Je me suis adressé à la justice pour que mes actes n'aient aucune conséquence pénale pour qui que ce soit. Cela fait cinq ans que j'attends. Et comme pareille apathie s'apparente à une farce, j'ai décidé de mettre fin à cette situation de la manière que je considère la plus digne, la plus humaine et la plus rationnelle.

Comme vous pouvez le voir, j'ai à côté de moi un verre d'eau contenant une dose de cyanure de potassium. Quand je l'aurai bu, j'aurai renoncé - volontairement - à ce que je possède le plus légitime et privé: mon corps. Je me serai également libéré de l'esclavage humiliant de la tétraplégie.

Cet acte de liberté - posé avec l'aide d'autrui - vous le nommez suicide assisté*, aide au suicide.

Néanmoins, moi, je considère cette aide comme nécessaire et humaine. Elle me permet d'être maître et souverain du seul bien qu'un être humain peut réclamer comme étant le sien, c'est-à-dire son corps et ce qui l'accompagne: la vie et sa conscience.

[...]

Vous pouvez châtier ce prochain qui m'a aimé et qui a fait preuve de cohérence dans son amour, en m'aimant comme lui-même.

[...]

Pour ce qui est de la conscience, elle m'incombe à moi seul. Je revendique donc l'acte et l'intention.
Date de création:-1-11-30 | Date de modification:-1-11-30

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