Buenos Aires, 10 décembre 2006
traduit de l’espagnol (Argentine) par Pedro Vianna
en harmonie avec l’auteure
In « Orage/Tempestad », recueil bilingue de l’auteur
Publié à Paris, octobre 2009
© Tous droits réservés
publié avec l'autorisation de Cristina Castello
Cratère du ciel
Cristina Castello
Le monde est un pays de morts
Qui marchent vers leurs funérailles
Les visages des gens sont des suaires
Avec des yeux rouillés et des rêves à genoux.
Stries de soleil, rosée évaporée,
Ce sont les enfants que l’Empire effeuille vers la mort
Toutes les cinq secondes, toutes les cinq secondes
Dans tous les feuillages de tous les confins.
Le capitalisme est un poulpe affamé de pleurs hérissés
C’est un cratère du ciel assassin de moineaux
Il m’ébranle cet outrage de lis déflorés
Qui ameutent mon âme et défient le Suprême
Mais les dieux anthropophages n’entendent point
Et ma soif interpelle les miracles
Et l’arcane répond par d’autres crimes
Et les anges gardiens se soumettent au système
Mais viendront les Purs de la planète
Pour démolir les olympes de cruauté,
Pour inventer des villes sans échafauds,
Pour vider les bibliothèques de leurs livres
Et lire Bachelard, Zola, John Donne
À San Telmo, sur le Pont Neuf ou à Beyrouth
Ils viendront délivrer les musées de leurs grilles
Pour que La Liberté guidant le peuple fonde l’équité
Et que le cri de Guernica extirpe l’horreur.
Ils viendront multiplier les pains et l’amour
Pour donner à manger à l’affamé
Pour donner à boire à l’assoiffé de lumière
Pour inventer des frontières sans plafond,
Pour que Noirs, Blancs, Jaunes, Métis
S’ébaudissent sur la lande comme des argiles abreuvées
Et dansent au rythme d’une boîte à musique
C’est ainsi, rien qu’ainsi, que le monde sera un pays d’innocents
Et que s’ouvrira enfin, couvrant l’Infini,
Un bouquet d’arpèges pour tatouer l’avenir.