Café
Grain du caféier, arbuste aux feuilles persistantes croissant en pays tropical. Il y en existe plus d'une variété : "On en cultive deux espèces: le Coffea arabica, appelé simplement Arabica, et le Coffea canephora, qu'on surnomme Robusta. À la fin du XVIIe siècle, les premiers plants d'Arabica, originaires du Yémen, ont été embarqués sur un navire de la compagnie des Indes occidentales pour être transplantés à Java (le port d'embarquement s'appelait Moka, d'où l'appellation d'une variété populaire d'Arabica). Quant au Robusta, qui provient du Zaïre, sa culture par les colonisateurs remonte à la fin du XIXe siècle." (Michel Groulx, Café à la carte, Cybersciences - lien supprimé)
On se sert des grains récoltés pour préparer, après torréfaction et infusion, une boisson parmi les plus appréciées dans le monde.
Description d'un naturaliste québécois du 19e siècle:
"Le café (...) est un petit arbre de 12 à 15 pieds qui appartient à la famille des Rubiacées. C’est dire de suite que ses fleurs sont peu remarquables. Il y en a un grand nombre d’espèces. Celle que l’on cultive pour le commerce est le Coffea arabica, à feuilles assez petites, opposées, toujours vertes; il se charge d’une profusion de fruits, d’un rouge brun à la maturité, d’une apparence assez attrayante, mais ayant peu de chair, par contre portant deux grosses graines dont on connaît l’usage et la saveur.
Le café, originaire de la Haute-Éthiopie, était en usage de temps immémorial en Arabie, et dans les pays voisins, lorsqu’au commencement du XVIIe siècle, il fut introduit en Europe. Au commencement du siècle dernier, un capitaine Duclieux en prit trois pieds dans une serre à Paris où l’on cultivait la précieuse plante, pour les transporter à la Martinique. Deux sur les trois périrent dans la traversée, et c’est de ce seul pied survivant qu’est venu tout le café qu’on cultive aujourd’hui dans toute l’Amérique. Sa diffusion fut si rapide dans l’Amérique tropicale, que dès 1776 on évaluait à 33 millions de livres la quantité que la seule partie française de St-Domingue exportait en France.
Le café ne peut prospérer dans un climat où le thermomètre descend au dessous de 10 degrés; il préfère un sol un peu humide et s’accommode très bien du penchant des collines.
Semé de graine, après 15 à 18 mois il peut être mis en place, où on l’espace de 7 à 8 pieds entre chaque plant, et après quatre ans, il commence à donner du fruit. Lorsqu’il a atteint 8 à 10 pieds de hauteur, on l’étête, afin de forcer la tige à émettre des branches latérales en plus grand nombre, lesquelles sont d’ordinaire les plus fructifères.
Comme la plupart des plantes tropicales, le caféier porte des fleurs toute l’année, mais c’est particulièrement au printemps et en automne qu’il donne les plus fortes récoltes.
On cueille les fruits à la main, et on les expose au soleil pour les débarrasser de leur pulpe, mais il faut avoir grand soin de remuer les tas pour éviter la fermentation, ou bien on les fait macérer dans l’eau pendant 24 ou 48 heures, pour les faire sécher ensuite.
Il en est du café comme de plusieurs autres productions de la nature; le terrain, le climat, la température, ont sur sa qualité une grande influence. Le plus estimé vient de Moka, les quatre autres qui à la suite se disputent la préférence, sont celui de Java, celui de Bourbon, celui de la Guiane et celui de la Martinique ou des autres Antilles."
Léon Provancher, Une excursion aux climats tropicaux: voyage aux Iles-du-Vent, St-Kitts, Névis, Antigue, Montserrat, la Dominique, la Guadeloupe, Ste-Lucie, la Barbarde, Trinidad, Québec, J. A. Langlais, 1890, 364 p.
Le café
Il est une liqueur, au poète plus chère,
Qui manquait à Virgile, et qu'adorait Voltaire ;
C'est toi, divin café, dont l'aimable liqueur
Sans altérer la tête épanouit le coeur.
Aussi, quand mon palais est émoussé par l'âge,
Avec plaisir encor je goûte ton breuvage.
Que j'aime à préparer ton nectar précieux !
Nul n'usurpe chez moi ce soin délicieux.
Sur le réchaud brûlant moi seul tournant ta graine,
À l'or de ta couleur fais succéder l'ébène ;
Moi seul contre la noix, qu'arment ses dents de fer,
Je fais, en le broyant, crier ton fruit amer,
Charmé de ton parfum, c'est moi seul qui dans l'onde
Infuse à mon foyer ta poussière féconde ;
Qui, tour à tour calmant, excitant tes bouillons.
Suis d'un oeil attentif tes légers tourbillons.
Enfin, de ta liqueur lentement reposée,
Dans le vase fumant la lie est déposée ;
Ma coupe, ton nectar, le miel américain,
Que du suc des roseaux exprima l'Africain,
Tout est prêt : du Japon l'émail reçoit tes ondes,
Et seul tu réunis les tributs des deux mondes.
Viens donc, divin nectar, viens donc, inspire-moi.
Je ne veux qu'un désert, mon Antigone et toi.
À peine j'ai senti ta vapeur odorante,
Soudain de ton climat la chaleur pénétrante
Réveille tous mes sens ; sans trouble, sans chaos,
Mes pensers plus nombreux accourent à grands flots.
Mon idée était triste, aride, dépouillée ;
Elle rit, elle sort richement habillée,
Et je crois, du génie éprouvant le réveil,
Boire dans chaque goutte un rayon de soleil.
[...]
Jacques Delille (1738-1813)
Source en ligne: Florilège. Anthologie hypertextuelle de la poésie française
Voir aussi: Café (Guide des aliments, Service Vie)
"Il est peut-être sorti des cafés et des brasseries plus d'œuvres mémorables que des bibliothèques, ces vastes tombeaux. Je connais un homme de science qui va y écrire ses articles de biologie et je sais qu'un philosophe y a conçu et en partie rédigé des études importantes. C'est que le café offre au rêveur et au méditatif la solitude modérément bruyante qui nous convient le mieux. Et puis le café est un endroit où on se sent libre, souvent plus libre que chez soi. On s'y réfugie également contre l'isolement et contre la promiscuité du ménage. Le café est aussi le lieu idéal pour les disputeurs, les discoureurs, les teneurs de cercle, les prêcheurs d'esthétique. L'âme des jeunes gens y est plus docile, s'y plie mieux à la bonne parole. Toutes les révolutions littéraires ou politiques sont nées au café." (Remy de Gourmont, "432. Autres poètes, autres bustes (16 juin 1911)", Épilogues - Réflexions sur la vie - 1905-1912, Paris, Mercure de France, 1913)
Une institution en France: le café parisien
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