La rivière Saint-Maurice : un code d’éthique qui demeure un vœu pieux

Jean Mailhot

Qu’Il est difficile de penser globalement pour agir localement !

Les usagers de la rivière Saint-Maurice sont préoccupés depuis plusieurs années par la cohabitation des utilisations. Des démarches ont été entamées dès 2019 dans le but d’adopter des mesures permettant une cohabitation responsable. À l’été 2021, la Ville de Shawinigan a présenté un projet de code d’éthique pour les usagers de ladite rivière, énonçant les bonnes pratiques à respecter.

Force est de constater que la Ville a accouché d’un avorton édenté qui maintient le statu quo anarchique de l’utilisation des eaux de la rivière Saint-Maurice. Le sens civique, on l’a ou on ne l’a pas. Les comportements délinquants de beaucoup d’usagers font peine à voir : un manque flagrant de respect envers les citoyens utilisateurs de la rivière, l’environnement, la faune et les citoyens riverains. Ces facteurs sont identifiés depuis plusieurs années. De nombreux intervenants les dénoncent régulièrement dans les différents médias : vitesse, alcool, moteurs bruyants, musique forte, vagues de haute intensité accélérant l’érosion des berges, circulation à proximité des berges, vagues narcissiques irrespectueuses des moyens plus calmes de navigation, p. ex. canot, kayak, pédalo, planche à pagaie, etc. Les zones identifiées par la Ville et favorisées pour certaines activités ne sont pas respectées.

Dans sa mollesse, la Ville de Shawinigan ne fait pas mieux que d’envoyer un sondage visant, soi-disant, un code d’éthique bonifié en 2022. En fait, on veut faire bonne figure et on protège ses amis de la marina. Après tout, on ne peut détruire ce que l’orgueil a fait bâtir, même si nous n’en n’avions pas les moyens. Parce que pour dépenser, Shawinigan est championne, mais pour se serrer la ceinture, c’est un concept totalement méconnu. D’ailleurs, la Commission municipale du Québec, dans son rapport remis en avril 2021 de son audit de performance (articles 32, 37, 51, 55, 69 et 84) sur la gouvernance et la gestion financière de la Ville de Shawinigan, n’a-t-elle pas mentionné que la Ville n’avait pas de gouvernail financier et qu’elle ne savait pas où elle allait?

Et les sanctions dans tout ça? Et la police que fait-elle? L’heure n’est plus aux tergiversations et aux discussions oiseuses. Beaucoup de villes et municipalités ont eu le courage politique de prendre les décisions qui s’imposent pour protéger cette cohabitation nautique de même que l’environnement et la faune. Trois‑Rivières, entre autres, a limité des activités à certaines zones de la rivière. Des sacrifices seront demandés, mais ils sont nécessaires pour sauvegarder notre joyau qu’est la rivière. La police ne peut tout faire et ne peut être partout. On doit lui donner les outils qui permettront de gérer les comportements nautiques délinquants.

Comme tout citoyen qui se veut responsable, je me permets certaines suggestions : pour l’alcool, le problème est vite réglé, car l’alcool est déjà interdit dans les embarcations nautiques. Pour le bruit, une limite aux décibels émis par les embarcations est facile à implanter; de plus, à la marina de Grand-Mère, il est clairement indiqué « Pas de bruit après 21 h ».  On dirait que ce sont uniquement les sourds qui conduisent les embarcations nautiques. D’autant plus que la musique jouée à tue-tête fait rarement l’unanimité des auditeurs. La vitesse aussi est facile à réglementer et l’application de sanctions peut suivre avec un minimum de surveillance. Rappelons que le Ministère des transports du Québec a voté, vers la fin de 2020, une loi qui recommande une vitesse maximale de 30 km∕h pour les véhicules hors route qui circulent à moins de 30 mètres d’une habitation et de 50km∕h s’ils circulent à moins de 100 mètres d’une habitation (Loi sur les véhicules hors route 2020, chapitre V, article 27.1). Ce serait un bon début. De plus, l’obligation de circuler au large des rives et d’emprunter un trajet perpendiculaire pour se rendre au large peut aider à contrer l’érosion. Ces mesures sont autant de points positifs qui aideraient l’environnement.

Le code d’éthique proposé par la Ville ne fait pas sérieux et les auteurs ne semblent pas vouloir régler les problèmes actuels; pour certains d’entre eux, ils semblent plutôt vouloir maintenir leurs privilèges.

Jean Mailhot

Secteur Grand-Mère

Shawinigan

 

 

 

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