Trump: 100 jours de ressentiment
Pour Francis Fukuyama, seule l'analyse psychologique peut donner une certaine cohérence au comportement du président Trump depuis le début de son 2e mandat (3e mandat pour les MAGA purs et durs). Selon l'auteur de la Fin de l'histoire et le dernier homme:
«le trumpisme est essentiellement une mentalité imprégnée de ce que Nietzsche appelait le ressentiment, c'est-à-dire une rancœur aiguë à l'égard des autres, fondée sur une fierté blessée, un manque de considération perçu, des craintes d'inadéquation et un désir de se venger de ceux qui n'ont pas fait preuve d'un respect adéquat.»
«Il est bien connu que Trump a souffert d'un manque de respect : c'était un parvenu effronté et inculte du Queens qui n'a jamais été pris au sérieux par l'élite culturelle de New York. Il pouvait faire la une de l'Enquirer, mais pas du New York Times. Le comble du mépris a peut-être été atteint lors du dîner des correspondants de la Maison Blanche en 2011, au cours duquel Obama s'est moqué de lui en pleine face. Il brûlait de haine pour l'ensemble de l'establishment libéral et comprenait parfaitement le ressentiment partagé par les nombreuses personnes des couches populaires qui faisaient vivre ses casinos et que ce même establishment méprisait. C'est sur cela, plus que sur une idéologie cohérente, que s'est construit le mouvement MAGA.»
Pour étayer sa thèse, Fukuyama fait également appel à la notion de thumos - le siège du courage, du sentiment de dignité, de fierté selon Platon, qui dans le cas de Trump s'est transformé en désir de vengeance et destruction: «J'ai écrit à plusieurs reprises sur l'importance du thumos - le mot grec pour "fougue", ou le désir de reconnaissance - et son importance pour la politique. Dans La fin de l'histoire et le dernier homme, j'ai même parlé de Donald Trump qui, en 1992, semblait n'être qu'un riche homme d'affaires. Je soutenais que dans le système capitaliste américain, on pouvait satisfaire son désir de reconnaissance supérieure à celle des autres en s'enrichissant par des moyens socialement inoffensifs.
Ce que je n'avais pas vu à l'époque, c'est comment le thymos de cet individu particulier le pousserait à rechercher non seulement la richesse, mais aussi la destruction systématique des institutions mêmes qui constituaient la démocratie américaine.»
À lire sur Frankly Fukuyama.