Originaires de la Guinée Bissau, les Manjaku habitent le pays manjaku et parlent la langue manjaku. Situé en Afrique de l'Ouest et enclavé entre le Sénégal au nord et la Guinée Conakry à l' est et au sud, ce pays comporte également une soixantaine d'îles. En raison de leurs croyances, les Manjaku sont en majorité animistes, mais parmi la population il y a aussi des importantes communautés chrétiennes et musulmanes.
Le culte des ancêtres
Comme chez la plupart des peuples africains, les morts manjaku sont transférés vers un autre monde appelé « mcaţ » ou séjours des morts. Ils deviennent ainsi des «balugum », des esprits, protecteurs des vivants et exerçant leur pouvoir sur les ennemis et un contrôle moral sur les membres de leur propre famille. Ainsi informent-ils la famille sur certains sacrifices à faire pour se protéger, tranchent-ils lors de différents ou éclaircissent-ils un mystère. Ce privilège de devenir un esprit puissant est réservé aux adultes décédés hommes ou femmes.
Le transfert au monde des esprits se fait au moment du décès. Cependant, si la personne défunte est coupable d'anthropophagie, d' envoûtement, de pacte avec un démon, etc.) il séjourne d' abord dans un lieu où il expiera ses fautes. On dira de cette personne qu'elle subit un «ka ro ukoţ», un jugement. Devenu pur, le défunt accédera au pays des morts et retrouvera ses ancêtres.
Dans chaque famille, ces ancêtres morts sont représentés par des pieux en bois d’ébène, peu élevés et plantés sur un monceau de terre dans un coin de la cour. Un pieu (pëcap) par ancêtre et l’ensemble des pieux (icap) forment le collège des esprits des ancêtres familiaux (icap balugum). Ce groupe de pieux délimitent l'espace d'un sanctuaire où le chef de famille accomplit des fonctions sacerdotales. Médiateur entre les vivants et les morts, il communique avec les esprits, répand des libations et offre des sacrifices sur ces pieux. En l'absence du chef de famille, un autre homme ou un enfant mâle de la famille officiera à sa place. La coutume réserve cette fonction exclusivement aux membres masculins de la famille.
Le retour d'un mort
Dans la tribu des Manjaku, une personne exprimera son regret de mourir en revenant sous la forme d'un esprit vilain, appelé «napër». Dégageant une odeur de chair pourrie et laissant entendre des sons nasillards, il manifestera sa jalousie à l'égard des vivants en se tenant sur les routes avec un fouet pour les frapper. Sa salive sur la peau aurait le même effet que l'eau chaude. Certains de ces esprits seraient plus méchants que d'autres au point d'obliger les villageois à éviter les endroits qu'ils fréquenteraient la nuit. Invisible pour les uns, il pourrait être vu par ceux qui sont capables de voir l'invisible («ba wëra»l).
La fête des morts
«Kakaaw» est la fête des ancêtres et se prépare toute l' année. Chaque six jours (kanëm) tous les pères de famille du village emmènent une bouteille de vin de palme (ubolaţ) au sanctuaire du plus grand dieu du village(Mboos) pour une libation. Cela se fait pendant plusieurs semaines. Après cela, ils décideront du jour où chacun apportera un coq pour un sacrifice. A l'issue de ce sacrifice collectif, le jour de la fête des morts sera fixé et les libations hebdomadaires seront arrêtées.La fête est célébré généralement au mois de mai sur les pieux des ancêtres, le sanctuaire qui leur est dédié.
Tôt le matin les femmes préparent l'offrande(«paay») du «kanukan», plat composé de riz et de poisson séché. Après la cuisson, on asperge le riz d' huile de palme. Avant de goûter au plat, il faut d' abord l' offrir aux ancêtres. C'est au père de famille(«ajug kato») qu'il revient d' officier en qualité de prêtre sur les pieux des ancêtres. Entouré de toute la famille, il fait une libation et s'adresse aux esprits pour demander leur protection pour toute famille..Puis, il prend une poignée du riz de l'offrande et le dépose à coté des pieux, geste par lequel il donne à manger aux ancêtres. Suivent alors les réjouissances: On mange le riz de l' offrande et on se partage le vin de la libation. Ces célébrations se font dans chaque famille, car, dans chacune d'elle, existe un sanctuaire dédié aux morts où chaque pieu représente un ancêtre.
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© Éric Volant
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