Vladimir Maïakovski le 19 juillet 1893 à Bagdadi (Géorgie), localité appelée aujourd’hui Maïakosvki en son honneur. Poète ukrainien d’origine cosaque, il est une des grandes figures tragiques de l’histoire littéraire du vingtième siècle. En 1906, à la mort du père, garde forestier, la famille s’établit à Moscou où Vladimir, militant bolchevique, fut condamné en 1908 à une année de détention durant laquelle il trouve le loisir de lire les grands auteurs russes, surtout Tolstoï, ainsi que Byron et Shakespeare. À sa sortie de prison en 1910, devenu ami et collaborateur du mathématicien et poète Vélimir Khlebnikov (1885-1921), il publie ses premiers poèmes. Sa taille de géant (il mesurait plus de deux mètres) et sa voix profonde, sa nature joyeuse et ardente, lui ont valu une immense popularité. Par ses sorties dans la rue et ses bains de foule, il introduit dans la poésie la langue parlée et les ruptures de rythme. Anarchiste viril, il devient le meneur du futurisme, mouvement dont il semble avoir inventé le nom, et, par-dessus tout, chantre de la révolution. En 1913, il compose un poème dramatique qui porte son nom «Vladimir Maïakovski». En 1914, sa rencontre avec Lili Brik, la sœur d’Ella Kagan (qui deviendra la poétesse Elsa Triolet, muse d’Aragon), bouleversera sa vie. Il lui dédie son poème lyrique «Nuage en pantalon» suivi de «La flûte en colonne vertébrale» (1915). Mobilisé, pendant la première guerre, il compose «La guerre et le Monde» et son grand poème «L’Homme».
Après la révolution d’octobre en 1917, il fait de son art un instrument politique notamment dans ses poèmes «Mystère-Bouffe» (1918), «150 000 000» (1919-1920) et «Lénine» (1925). Fondateur de la revue Lef (Front gauche de l’art) au service de la N.E.P. (Nouvelle Politique Économique), rédacteur de l’organe central du parti communiste et membre actif de la RAPPP (Association des écrivains prolétariens de la Russie), il fait de nombreux voyages à l’étranger, notamment à New York, Londres et Paris. Dans le train qui le conduit avec Lili de Paris à la ville de Pierre au bord de la Néva, il lit à Lili son chef d’œuvre du lyrisme amoureux: «De cela» (1923). Cependant, il se révolte avec de plus en plus de véhémence contre les bureaucrates: «Je joue des coudes à travers la bureaucratie, les haines, les paperasses et la stupidité.» La critique officielle reçoit très mal ses deux pièces satiriques La punaise (1920) et Les bains publics (1929), tandis que les frasques de Lili le mettent hors de lui. Sa déchirure intérieure entre la poésie et le combat partisan, entre sa passion amoureuse et sa passion révolutionnaire ainsi que sa douleur de perdre sa voix prodigieuse l’empêchant désormais de déclamer ses poèmes, ont fini à créer chez ce titan un désarroi généralisé qui l’a mené à la dépression*. Il se tire une balle dans le cœur le 14 avril 1930, après avoir écrit son épitaphe: «La barque de l’amour s’est brisée contre la vie courante». Voir Vladimir Maïakovski, film de Pavel Longuine. En 1916, dans un poème dédié à Lili, «en guise de lettre», il écrit: «pour moi, toutes les cloches sont sans joie/hormis celle qui sonne le son de ton nom bien-aimé/Je ne sauterai pas dans le vide,/ne boirai pas la ciguë,/n’appuierai pas la gâchette à ma tempe./Sur moi/hormis ton regard,/n’a de force la lame d’aucun couteau» (traduit par Elsa Triolet dans La poésie russe, Paris, Seghers, 1971, p. 339).