L'appel de la rivière de Ketil Bjørnstad, traduit par Jean-Baptiste Coursaud. Chez Jean-Claude Lattès. Parution le 12 mai 2010. 400 pages.
«Le jeune Aksel Vinding peine à accepter la perte de son grand amour, Anja Skoog. Après la mort de celle-ci, il doute de sa carrière de pianiste, de la musique sur laquelle il a tout misé, et se demande s’il a fait le bon choix. Prix aux fers de cette situation, il initie parallèlement une relation avec Marianne Skoog, la mère d’Anja, sans savoir si c’est au fond de la fille décédée qu’il ne parvient pas à se détacher.
Publié en Norvège en 2007, L’appel de la Rivière est la suite indépendante de La Société des Jeunes Pianistes, traduit en français en 2006 et couronné du Prix des Lecteurs du Livre de Poche en 2008. C’est un roman d’amour dans lequel le lecteur suit l’attachement et les sentiments d’un jeune homme pour une femme plus âgée que lui, ainsi qu’un roman sur les choix existentiels et les dilemmes moraux. C’est également un récit sur la place de l’art dans nos vies, sur le combat mené par certains pour devenir visibles, tant dans la vie des autres que dans leur propre vie. C’est enfin un roman sur la passion, le deuil et le chagrin.
Ketil Bjørnstad, qui est à la fois auteur, compositeur et musicien, a été découvert à 14 ans lorsqu’il a gagné le Grand concours des jeunes pianistes à Oslo. Sa trilogie consacrée au personnage d’Aksel Vinding, saluée par la critique norvégienne, connaît un vif succès en Europe, tout particulièrement au Danemark, en Allemagne et enfin en France où L’appel de la rivière est le second volet traduit, après La société des jeunes pianistes (paru en septembre 2006 chez Jean-Claude Lattès)» (Quatrième page de la couverture)
Le narrateur est un jeune musicien de dix-huit ans, appelé Aksel Vinding qui se prépare à un grand concert public de piano qui aura lieu à Oslo le 9 juin 1971 et dont l'issue décidera de sa carrière future. Aksel essaie de se frayer un chemin à travers les multiples deuils qui hantent ses souvenirs d'un passé récent, parmi les plus pénibles sont la chute mortelle de sa mère alcoolique et la mort lente d'Anja, son amie intime devenue anorexique. Il tente également de trouver sa voie entre les exigences légitimes de deux femmes. D'une part, un amour passionné et réciproque l'attache à Marianne, la mère d'Anja, 17 ans plus vieille que lui et médecin qui souffre de troubles bipolaires. D'autres part, l'obéissance qu'il voue à Selma, la célèbre pianiste qui lui manifeste sa confiance dans ses talents musicaux et dans sa détermination de relever le défi de gagner le grand concours qui ouvrira sa carrière professionnelle.
Les chagrins et les regrets, qui, du début à la fin, ponctuent les pages de ce roman, émeuvent le lecteur et élèvent son âme. Ils habitent intensément les divers personnages de cette longue narration et sont scrutés à la loupe par le regard sensible et délicat d'Aksel, narrateur empathique de ce récit dramatique. Celui-ci, tout en éprouvant lui-même en son for intérieur les passions et les souffrances comme une expérience de mort, parvient non seulement à survivre, mais à vivre et à acquérir une maturité. Et, au-delà des multiples visages de la souffrance qui se meuvent dans ce récit, l'eau de la rivière qui danse et chante, est un personnage important auquel Aksel revient sans cesse comme un point de référence vital. Mais, par- dessus les abîmes et les naufrages existentiels, vécus par les nombreuses personnes impliquées, la musique omniprésente révèle son pouvoir d'accompagnement de l'âme humaine dans la démesure de ses joies et de ses peines, de ses passions et de ses désirs, et manifeste aussi son pouvoir de modération et de réconciliation. Les oeuvres de Beethoven, Brahms, Ravel, Chopin et de bien d'autres compositeurs sont répétées par Aksel dans les sept heures par jour qu'il consacre à son piano. Le romancier Bjorndal, grand musicien lui-même, crée un Schubert aussi loufoque que fraternel qui vient surprendre Aksel par ses visites nocturnes où fusent des éclats de rire et des conseils lumineux. (Éric Volant)