À la disparition de son père, Ptolémée XII Aulète, «le joueur de flûte», elle devient la souveraine d’Égypte à quinze ans. Son dessein politique consiste à restaurer l’autorité de la monarchie lagide et à faire d’Alexandrie la capitale du monde antique. D’après la légende, Marc Antoine se tua, persuadé de la mort de Cléopâtre, et celle-ci se donna la mort quand elle apprit la mort de Marc Antoine*. Selon des sources historiques estimées plus plausibles, dont Plutarque*, la fin de vie dramatique des deux amants est plus complexe. En effet, Marc Antoine s’étant volontairement blessé, après la défaite à Actium, se fit transporter au mausolée funèbre où la reine le rejoint et, le cœur déchiré d’une intense douleur, prend soin de son amant mourant tout en étant confortée par lui. Marc Antoine expire entre les bras de son amante qui déchire ses vêtements, plonge son visage dans le sang du mort et lui murmure les mots les plus tendres. Dès que le corps d’Antoine a été enseveli, Cléopâtre s’enferme avec Iras et Charmion dans le mausolée qui communique avec le temple d’Isis. Quand enfin Octave fait son apparition, elle se jette aux pieds du vainqueur de la bataille et essaie de prouver, par la correspondance intime qu’elle lui montre, «ce qu’elle a été» pour César, son père. Lorsqu’elle voit qu’Octave demeure insensible à ses prières, Cléopâtre se fait apporter secrètement au mausolée un petit serpent noir, dissimulé dans un panier de figues. Elle pose l’aspic contre son sein et s’endort à jamais. Ses compagnes Iras et Charmion suivent son exemple (B. Méchin, Cléopâtre ou le rêve évanoui, Paris, Perrin, «Histoire», 1977).
Dans l’imagination populaire, les deux amoureux appartiennent aux couples célèbres dont l’amour est plus fort que la mort (pacte* de suicide). Le poète Horace* lui consacre une ode dans laquelle il chante le geste de la reine comme un acte de paisible courage: «Elle voulut une mort plus belle: elle n’eut pas, comme les femmes, peur d’une épée; elle ne chercha pas à profiter de la vitesse de sa flotte pour gagner des rivages inconnus. Elle eut le courage de regarder en face son pouvoir écroulé, et, le visage calme, bravement, elle prit les serpents redoutables et absorba, de tout son corps, leur noir venin, avec une intrépidité grandie par la mort qu’elle avait choisie. Sans doute ne voulait-elle pas, déchue de son pouvoir, mais non point diminuée comme femme, se laisser traîner sur de cruelles liburnes à un superbe triomphe» (Ode, i, xxxvii, 21-32). André Gide* a traduit en français, parmi les œuvres de William Shakespeare*, Antoine et Cléopâtre (Paris, Lucien Vogel, 1921). Les traductions les plus récentes de cette tragédie, sont celle d’Yves Bonnefoy, Antoine et Cléopâtre, précédé de «La noblesse de Cléopâtre» (Paris, Gallimard, 1999) et celle de Daniel Mesguich (Paris, Verdier, 2003). Ce drame shakespearien est l’histoire d’une déchirure «au seuil de l’automne du corps» (Y. Bonnefoy).
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La mort de Cléopâtre, de Reginald Arthur (1892)
© Éric Volant
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