Essentiel
Tout se résume dans cette phrase de
Nietzsche: « Quand le scepticisme s'allie au désir, naît le mysticisme. » Le désir du vrai trahi par l'illusion, le désir du bien meurtri par le mal n'ont pas d'autre issue que l'envol vers une transcendance à l'image de leur voeu. C'est dans cette dimension divine qu'a lieu la rencontre nuptiale entre la lucidité qui fait les sceptiques et l'amour qui veut des croyants. Car « la lucidité est le pire des aveuglements si l'on ne voit rien au-delà de ce qu'on voit »: le visible amputé de l'invisible n'est plus que le masque du néant.
Ou, pour reprendre la distinction chère à
Jean Guitton, l'homme qui va jusqu'au bout de la lucidité n'a plus le choix qu'entre le choc mortel contre l'absurde et l'éblouissement devant le mystère - intuition obscure par la disproportion entre la puissance de la lumière et l'infirmité de notre regard : on voit le soleil parce qu'on est ébloui et, pour la même raison, on ne le voit pas - qu'entre le désespoir, nu ou fardé de mirages, et l'espérance surnaturelle qui plane au-dessus de l'égarement des contraires parce que sa source n'est pas dans le temps où tout se sépare, mais dans l'éternel où tout s'unit.