Enjeux
"L’emploi des méthodes destinées à l’analyse des gaz a toujours joué un rôle capital dans les études chimiques, depuis l’époque demi-légendaire des
alchimistes qui confondaient les gaz sous le nom d’
esprits avec les matières volatiles, l’ensemble des gaz étant assimilé à l’air, c’est-à-dire à l’un des quatre éléments fondamentaux des anciens philosophes naturalistes.
C’est surtout aux XVIIIe et XVIIIe siècles qu’ont eu lieu les découvertes des physiciens de l’École de Galilée, en Italie, de Boyle, en Angleterre, de Mariotte et des savants français: alors ont été énoncées les lois qui permettent de mesurer et de peser les gaz. Mais on distinguait mal entre les matières supposées impondérables de la chaleur et de la lumière, qui traversent les parois des vases, et les matières pondérables proprement dites, qui y demeurent enfermées dans les conditions ordinaires; distinction n’ayant été définitivement éclaircie que par le génie de
Lavoisier, à la fin du XVIIIe siècle. Vers la même époque, d’ailleurs, les différentes espèces de gaz, déjà entrevues par les alchimistes, et surtout par van Helmont et par Hales, ont été clairement distinguées dans les travaux mémorables de Priestley, de Scheele et de Cavendish.
Le nom même de
Chimie pneumatique, attribué à la réforme de Lavoisier, témoigne de l’importance acquise à ce moment par les corps gazeux.
Bientôt les relations générales qui existent entre la composition des gaz et leurs équivalents ou poids atomiques furent établies: principalement au commencement du XIXe siècle, par Dalton, sous une forme surtout théorique, et par
Gay-Lussac, sous la forme de lois physico-chimiques rigoureuses.
Depuis, l’étude des gaz est demeurée dans la tradition universelle des chimistes, et spécialement dans celle des savants français."
Marcellin Berthelot,
Traité pratique de l’analyse des gaz, Paris, Gauthier-Villars, 1906, p. v-vii