«Loin d'être un facteur décentralisateur, comme le déclare la majorité des analystes, l'intégration des marchés, qu'elle soit continentale ou mondiale, repose sur la participation de plus en plus active du gouvernement fédéral. L'effet Gulliver, omniprésent dans la littérature universitaire en tant que facteur d'explication de l'obsolescence du gouvernement fédéral, pose plusieurs problèmes. L'insistance sur l'efficacité économique, qui inclut, entre autres choses, une harmonisation ou une homogénéisation des politiques fiscales/budgétaires et de l'environnement socioéconomique, est contraire au fédéralisme, qui, par définition, favorise la diversité profonde et la reconnaissance du caractère distinct des régions et des provinces. Autrement dit, la contradiction entre l'intégration continentale et la forme fédérale devient évidente lorsque l'on comprend que l'intégration est synonyme d'homogénéisation et que le fédéralisme est synonyme de diversité. Chercher à accomplir les deux simultanément semble impossible. Insister sur l'un, c'est négliger l'autre, pour ne pas dire nier l'autre. L'intégration économique néolibérale et le fédéralisme sont pris dans un jeu où tout s'annule.» (François Rocher et Christian Rouillard, «Le processus d'intégration continentale: une redéfinition du lieu de pouvoir au Canada», dans George Hoberg (dir. de l’éd.), La capacité de choisir. Le Canada dans une nouvelle Amérique du Nord, Les Presses de l’Université de Montréal, 2002, p. 269.)