Conte

«Les contes populaires sont des récits libres, purs produits de l'imagination, qui sont passés de bouche en bouche, défiant des générations de conteurs depuis des temps immémoriaux. Ils dépeignent les relations humaines dans un style flattant le goût du merveilleux et riche de symboles. Comme toute bonne littérature, ils puisent aux sources de la vie quotidienne, mais se tiennent toujours en deça de la réalité ou de ce que le commun des mortels considère comme véridique et raisonnable. Ils franchissent souvent les limites du surnaturel et du prodigieux.

Le style des contes

Les contes ont un style et une structure propre. Ils se caractérisent notamment par une formule introductive. Parmi les plus courantes, relevons «Il était une fois...», «Il était une fois un Roi et une Reine...», ou encore «Au temps où toutes les choses parlaient...».

De même, les contes se terminent généralement par une formule de clôture qui est souvent un moyen de nous faire quitter le monde des chimères et de nous ramener d'un coup de baguette magique à la réalité. De nombreuses sorties de contes prennent la forme de jeux verbaux et de terminaisons rimées liées par la forme du son évoqué au sens du conte qui précède. La plus simple est (...) «Trois petits tours et puis s'en vont, et ainsi finit l'histoire». La formule finale nous indique parfois ce qui s'est passé après que l'histoire principale se fut terminée: «Et s'ils ne sont pas déjà morts c'est qu'ils sont toujours en vie.», ou bien «Et à ce jour, le moulin à sel repose toujours au fond de l'océan et n'a jamais cessé de moudre, et c'est pour cette raison que la mer est salée. »

La simplification et la schématisation sont courantes dans la littérature populaire. Le conte a un nombre limité de personnages: un roi ou une reine, la fille ou le fils d'un roi, trois frères ou bien trois trolls. Les personnages sont d'autant plus schématiques qu'ils ont valeur de modèles. (...) On note aussi que les faits sont souvent simplifiés et que, généralement, seuls deux personnages à la fois y prennent part.

Le conte donne des descriptions courtes et utilise la technique de la répétition pour tenir le lecteur en haleine et donner plus de poids aux passages importants. Le nombre trois est récurrent. (...) La répétiton est souvent accompagnée d'une escalade de l'intensité dramatique: le niveau de difficultés et les dangers croissent chaque fois qu'ils sont mentionnés ; le dénouement de l'intrigue à lieu à la troisième reprise.

L'histoire commence sereinement et s'achève sereinement. La justice est toujours rendue avec poésie: il va de soi que le bon est récompensé, le méchant puni, et que tout est bien qui finit bien.

Les divers types de contes

Les contes peuvent être classés en divers groupes, ou même sous-groupes. Nous distinguons généralement trois groupes principaux: les contes animaliers, les contes surnaturels et les contes facétieux.

Les contes animaliers ont pour principaux caractères des animaux domestiques et des bêtes sauvages qui sont doués de la parole. Ils se comportent comme les humains, tout en conservant certaines caractéritiques propres à leur animalité. (...) Certains des contes les plus célèbres sont consacrés uniquement à l'un d'entre eux.
Plusieurs contes retracent l'origine d'un trait caractéristique de l'animal en question.
(...)

Les contes surnaturels, ou contes féeriques constituent le groupe le plus fourni de la littérature fantastique. Ces contes nous parlent d'un monde de créatures qui ont pour nom géant, dragon, troll et sorcière, et d'êtres humains doués de forces surnaturelles. Ils décrivent également des phénomènes prodigieux: des bottes de sept lieues, des créatures de l'invisible, des nappes qui se déploient et se chargent miraculeusement de mille mets, des montagnes de verre, des châteaux d'or et maintes choses tout aussi fantastiques que merveilleuses. Ils se réfèrent à des événements particuliers: un voyage de sept heures à travers sept royaumes, des gens plongés dans un sommeil de cent ans, ou encore métamorphosés en animaux ou en pierres.

Les contes surnaturels ont une structure particulière. Les événements s'enchaînent en séquences se succédant dans un ordre fixé. Ils commencent par un accident, une perte ou une disparition: une princesse a par exemple été enlevée par un troll. Puis le héros ou l'héroïne sont dotés de pouvoirs fabuleux ou bénéficient d'une assistance surhumaine. (...) Le conte se termine par le triomphe du personnage principal sur l'adversité, ou sur tous ses opposants. Il gagne enfin «le cœur de la princesse et la moitié du royaume». (...)

De nombreux contes surnaturels (...) ont pour motif des métamorphoses. (...) Les contes de métamorphoses rapportent que des hommes peuvent notamment se muer en animaux. Østenfor sol og Vestenfor måne («À l'est du soleil et à l'ouest de la lune») est le plus connu. (... Ils) ont leurs origines dans les légendes grecques sur Amour et Psychée. (...)

Les contes facétieux constituent le troisième grand groupe. De façon générale, les éléments surnaturels reviennent moins fréquemment dans le conte facétieux que dans les autres types de conte. (...)»

Birgit Hertzberg Johnsen, Contes et légendes populaires de Norvège (Rédigé par Nytt fra Norge pour le Ministère des Affaires étrangères de la Norvège. Reproduction autorisée. Imprimé en août 1996; site ODIN)

Essentiel

«Un conte! Savez- vous rien de plus aimable ou de plus français; et y a-t-il, en littérature, une vocation plus tentante que celle de faiseur de contes? Donner à de chères idées, oubliées ou combattues, une forme vivante, les produire au cours d'une légère intrigue et les mener ainsi par une route mystérieuse à l'intelligence insouciante ou rebelle ; ou bien, confier, sans en avoir l'air, le plus cher de nos souvenirs à un personnage de rêve et, ainsi, discrètement faire aimer aux autres ce que soi-même on aime par-dessus tout ; amuser les petits au récit d'étranges aventures et distraire, apaiser, consoler les grands enfants que nous restons tous par une transposition spirituelle et bienveillante des tristesses et des vulgarités de la vie, c'est le privilège des conteurs, du vieil Homère, gonfalonier de la confrérie, et de cet autre qui s'est assis près de la tour du lépreux, et de celle enfin qai a cueilli d'une main diligente les légendes de Trianon. Hélas! les vrais contes sont rares. Il ne suffit pas pour avoir la vocation d'être incapable d'écrire un roman ou de bâtir une tragédie. Ces quelques pages ailées veulent un art délicat et sûr. Dans ces feuilles si courtes, chaque ligne et chaque mot ont leur prix. On pardonne encore aux romanciers leurs descriptions minutieuses et leurs monologues infinis. On passe et cela allège d'autant la lecture. Mais un conteur ennuyeux est comme une cloche fêlée. Il doit se taire et nous faire grâce de ce qui traîne et menace de languir. Une phrase, pour nous fixer le décor; deux ou trois coups d'une fine plume, et déjà nous connaissons les personnages; vite, qu'ils marchent, qu'ils parlent, qu'ils disparaissent, le conte est fini. Encore si cette oeuvre d'art pouvait être laborieuse et fouillée comme le sonnet des Conquérants. Mais non; un conte, — en France, j'entends, — c'est une lettre, et toute vraie lettre est un conte. Si vous n'avez pas reçu le don très rare, aucun maître, aucun travail ne vous enseignera le fini de cette ciselure alerte, la grâce rapide de cet abandon.»

Henri Bremont, L'enfant et la vie, Victor Retaux, Paris 1902, p.36-37

Enjeux

Le conte renouvelé

Au Québec comme ailleurs, on constate l'intérêt des nouvelles générations pour le renouveau du conte oral. Quelles sont les ouvertures offertes aux conteurs d'aujourd'hui? L'interaction entre le conteur et son auditoire n'est-elle pas anachronique dans une ère aussi axée sur la technologie?

Le conte en région

Bien qu'à saveur universelle souvent, les contes sont rarement de nulle part: ils revendiquent le coin de pays qui les voit naître et leur donne couleur; les contes sont par naissance régionaux. Mais qu'en est-il du conte dans les logiques d'un «développement local»? Et pourquoi cette difficulté paradoxale à retrouver aujourd'hui sa place dans le circuit des régions?

Christian-Marie Pons (dir.), Contemporain, le conte? ...Il était une fois l'an 2000. Montréal, Planète rebelle, 2001.

Synthèse

 

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