Autoproduction

Nous retenons ici la définition de Guy Roustang, co auteur de L'autoproduction accompagnée.

«Le terme d’autoproduction désigne toutes les activités destinées à produire des biens et des services pour sa propre consommation et celle de son entourage, sans échanges monétaires.

Derrière le mot autoproduction il y a plus que la production de biens ou de services. Le fait même d’autoproduire inscrit la personne dans un réseau d’échanges et de solidarité et produit de la plus value sociale et économique dans un quartier, un village, un territoire donné.

Cette part de l’économie qui relève de l’autoproduction est complètement occultée dans nos sociétés, alors qu’elle joue un rôle considérable. On s’en rend compte lorsqu’on cherche à mesurer son importance, ne serait-ce qu’à travers l’économie domestique, en estimant la valeur de ce que produit un ménage pour lui-même et qu’il pourrait sous-traiter à l’extérieur.


Autoproduction accompagnée

Cette note concernera uniquement ce que l’on peut appeler l’autoproduction accompagnée, c’est à dire les politiques volontaristes qui sont menées pour rendre accessible à tout le monde des activités d’autoproduction. En effet « ceux qui en ont les moyens, s’ils en ont envie, produisent des légumes ou des fleurs, bricolent dans leur appartement pour le rendre plus confortable et plus agréable. Souvent par contre certaines personnes ne disposent pas des terrains pour jardiner , il leur est interdit de modifier leur logement, elles n’ont pas les moyens d’acheter les outils ou les matériaux. Inégalité des moyens mais aussi inégalité des savoir-faire. Voilà pourquoi certains n’ont pas accès à toutes les ressources de l’autoproduction, qui pourraient pourtant améliorer leurs conditions de vie. C’est donc au nom de l’égalité qu’il faut faciliter l’accès de tous à l’autoproduction et si besoin est de permettre à chacun de bénéficier d’un accompagnement technique et social compétent.

Le Programme autoproduction et développement social (Pades) s’est donné pour mission au niveau national et régional de promouvoir l’autoproduction accompagnée comme outil de développement social et de solidarité. L’objectif général est de transformer un tissu d’initiatives isolées en une démarche cohérente avec des méthodes d’action mieux définies et de faciliter leur soutien par les politiques publiques. Le Pades développe ses interventions selon quatre axes : suivi et analyse d’actions ; réalisation de guides méthodologiques ; réalisation d’outils de communication ; animation de Journées d’échanges.


Jardins et autoréhabilitation

A Marseille en octobre 2000, le Pades, Les Jardins d’Amélie et Les Compagnons Bâtisseurs ont organisé les Rencontres régionales autoproduction et développement social, qui ont réuni 350 personnes. Deux secteurs de l’autoproduction étaient concernés : les jardins et l’autoréhabilitation accompagnée du logement. Bien d’autres secteurs de l’autoproduction mériteraient l’attention : cuisines collectives, fabrication de vêtements, de meubles, réparation des équipements ménagers et des véhicules etc.
En Aquitaine, un réseau des opérateurs dans le domaine de l’autoproduction accompagnée est entrain de se constituer car il s’agit de rendre visibles les réalisations et de les légitimer auprès des pouvoirs publics. Une charte de l’autoproduction accompagnée a été rédigée et adoptée.

Aucun travail d’inventaire n’a été pour l’instant réalisé en Paca pour connaître les différentes réalisations sauf dans le domaine des Jardins Solidaires Méditerranéens grâce au travail réalisé par Les Jardins d’Amelie en janvier 2005 (58 pages). Il est possible de donner cependant quelques informations tout à fait incomplètes pour d’autres domaines de l’autoproduction accompagnée.

Guy Roustang,
économiste, membre du Pades

Enjeux

Les princiaux enjeux du dépérissment de l'autoproduction ont été bien cernés par Daniel Cérézuelle et Guy Roustang dans L'autoproduction accompagnée, parue aux Éditions Érès en 2010.


Dans notre société technicienne et industrielle, ce qui allait de soi ne va plus tellement de soi ; de nombreux indices suggèrent que les transformations rapides de la civilisation matérielle et du cadre technique de la vie quotidienne favorisent l'inaptitude de beaucoup de personnes à mobiliser les ressources informelles qui conditionnent la maitrise des savoir-faire de la vie quotidienne, et ce dans des milieux sociaux très divers. Malheureusement, c'est chez les publics qui disposent des revenus les plus faibles que les effets de cette inaptitude sont les plus visibles, et les plus graves. Pour les autres ménages plus solvables, la possibilité de payer pour ce qu'on ne sait plus faire atténue en partie, ou diffère quelque temps, les effets de cette panne des savoir-faire de la vie quotidienne A .
Deux siècles après les débuts de la civilisation industrielle, il apparaît que le développement accéléré a débouché sur la montée et la multiplication des problèmes d'environnement. On se rend moins bren compte que le développement s'accompagne aussi d'une crise culturelle. Les équilibres culturels qui organisent la vie humaine, individuelle et collective ne sont pas moins fragiles que les équilibres écologiques, et les ressources culturelles ne se renouvellent pas aisément. C'est ainsi que la modernisation accélérée de nos sociétés s'accompagne d'une panne des savoir-vivre,
Nombreux sont ceux pour qui les processus informels de transmis- sion et d'intégration des savoir-vivre, qui permettent la construction de la personnalité, de la sociabilité, ainsi que la maîtrise de la vie quotidienne, sont en panne Nous évoquerons ici, à titre d‘exem- ples, quelques-uns des effets préoccupants de cette panne. Les problèmes de malnutrition qui affectent les sociétés développées ont des causes économiques, La faiblesse des revenus interdit a un nombre croissant de ménages d'accéder à des aliments frais fruits et légumesl indispensables a l'équilibre alimentaire. Mais, outre le facteur économique, il faut aussi prendre en compte le facteur culturel. Aujourd'hui, un nombre croissant de ménages ne sait plus ni se nourrir ni nourrir ses enfants, de sorte que, par exemple- ple, l'obésité devient un grave problème de sante publique qui va peser de plus en plus sur le budget social comme sur le destin d'un grand nombre d'individus qui ne sont pas forcément des pauvres
D'autres ne maîtrisent pas les règles informelles de coexistence avec autrui, et la montée de l |'incivilité devient un grave problème dans tous les pays développés, ou on n'a lamais construit autant de prisons. D'autres encore ne disposent pas des ressources psychologiques et symboliques informelles qui rendent possibles les relations d'apprentissage, et on assiste également a une crise des institutions éducatives qui, quel que soit le raffinement des techniques pédagogiques, ne peuvent fonctionner efficacement qu'avec des personnalités qui ont été équipées de ces ressources en temps voulu. Enfin, on observe que, faute de transmission de mère a fille, un nombre croissant de jeunes mères ignorent les gestes et les savoir-faire pour s'occuper d'un nourrisson, d'où la multiplication des accouchées affirmant de leur enfant quelles ne savent pas quoi en faire. Généralisons on assiste, dans divers domaines, à une panne de la transmission des savoir-vivre et des savoir-faire, et cette panne affecte des catégories sociales assez diverses, quoique de manière inégale pour des raisons qui restent a clarifier.

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