Ceux par qui le malheur sur les innocents tombe
Et qui n'ont pas de repentir,
Voudront après la mort voler hors de leur tombe,
Dieu juste, et n'en pourront sortir.
Hélas ! on se regarde avec des yeux funèbres,
Grands et petits, jeunes et vieux,
Et le riche orgueilleux se sent dans les ténèbres
Mordu par le pauvre envieux.
On crache sur Caton, on bave sur Socrate:
Le fort est bon; le faible a tort;
Le déshérité rampe, et la terre est ingrate.
Il pleut, c'est la nuit, l'enfant dort.
– Enfant, debout ! Va-t'en à ton travail ! C'est l'heure. –
Triste, il part; nul ne le défend,
Et le ciel effrayant qui sanglote et qui pleure
Glace de ses larmes l'enfant.
Les femmes sont aux fers dans les lois inégales;
L'homme entend leurs cris de courroux
Sans plus s'en émouvoir que du chant des cigales
Dans les chaumes des sillons roux.
Des beautés sans pudeur, à leurs festins venues,
Disent aux oppresseurs: merci !
On frémit en voyant ces Vénus toutes nues,
L'âme étant toute nue aussi.
Peuple libre, est-ce bien sous ton ciel que nous sommes ?
Écoutez ces hideux abois:
Le nègre fuit les chiens monstrueux, et les hommes
Chassent aux hommes dans les bois.
Partout vont gémissant les opprimés sans nombre
Dans les cités et dans les champs... –
File, Ô ver du sépulcre, et fais ta toile sombre
Où se prend l'âme des méchants ! »