Marlowe Christopher

6 / 2 / 1564-30 / 5 / 1593
Chronologie


1564 Naissance le 26 février, à Canterbury, dans le Kent, de Christopher Marlowe, fils de cordonnier. Il semble que les proches de Marlowe aient eu de nombreux démêlés avec la justice. Le jeune Christopher est laissé à lui-même dans une famille aux prises avec des difficultés financières, et dont plusieurs membres sont sujets a des comportements violents. Voir l'article de William Urry, Marlowe and Canterbury, Times Literary Supplement, 13 février 1964.

1579 - 80 Marlowe entre au King's School (14 janvier), et, en décembre, au Corpus Christi College (Université de Cambridge). Il obtient peu après une bourse d'étude grâce à l'intersession de l'archevêque. Cette bourse, concédée par les autorités religieuses, laisse peut-être entendre que Marlowe voulait entrer dans les ordres.

1584 - 87 Reçu Bachelier (B.A.), Marlowe poursuit ses études afin d'obtenir le grade de Magister artis (M.A.), que l'université de Cambridge lui décerne en 1587 après une longue polémique. Marlowe aurait en effet quitté Cambridge pour Reims, où il aurait été à la solde des services secrets de la Reine Élisabeth. Marlowe aurait séjourné en France afin d'espionner les catholiques anglais qui complotaient contre le gouvernement (Babington Plot- 1586). Les autorités de l'université avaient interprété l'absence de Marlowe comme un manquement grave aux règles universitaires, et ce n'est que grâce à l'intervention du Conseil Privé qu'il put être reçu.
Marlowe était toujours à Cambridge lorsqu'il traduisit Ovide (Amores), le premier livre de la Pharsale de Lucain et deux «Sestiades» du poème Hero and Leander, qu'acheva George Chapman après sa mort. Il y aurait également composé sa première pièce Didon, reine de Carthage (vers 1585), et fait le premier essai du célèbre blank verse [un vers de dix pieds qui comporte un syllabe brève et une syllabe longue accentuée. Christopher Marlowe n'est pas l'inventeur du blank verse, celui-ci ayant été déjà employé par le Comte de Surrey dans sa traduction de l'Énéide (1540). Marlowe ne fait que porter le blank verse à un niveau d'achèvement jamais atteint avant lui]. Le choix des thèmes nous découvre un jeune homme amoureux de la poésie latine et fasciné par l'Antiquité romaine.
La même année (1587) paraît à Francfort l'Historia von D. Iohan Fausten, dont la traduction anglaise (peut-être vers 1592), servit de base à la tragédie de Marlowe Doctor Faustus.

1588- 89 Marlowe est à Londres, où il a donné, probablement à la fin de 1587, la première de Tamburlaine ( en français Tamerlan) au Rose Theatre de Philip Henslowe. À travers la voix de Tamburlaine on peut entendre celles de tous ces jeunes universitaires qui, comme Marlowe, furent formés par les classiques et qui, impliqués dans la vie tumultueuse de la City, vouaient un culte au bel esprit et à la saillie. Ils sacrifiaient leur jeunesse à ces passions violentes autant qu'éphémères qui s'abreuvent d'absolu et de démesure. Cette jeunesse, dont faisait partie Marlowe, fut connue sous le nom de «University Wits», et réunissait des écrivains comme Robert Green (1558-92), George Peel (1557-96), Thomas Lodge (vers 1557-1625), et Thomas Nashe (vers 1567-1601). Comme Tamburlaine, cette nouvelle génération pouvaient s'écrier avec les grands esprits de la Renaissance :

Nature, that fram'd us of four elements
Warring within our breasts for regiment,
Doth teach us all to have aspiring minds:
Our souls, whose faculties can comprehend
The wondrous architecture of the world,
And measure every wandering planet's course,
Still climbing after knowledge infinite,
And always moving as the restless spheres,
Will us to wear ourselves and never rest.
(Tamburlaine, II, 7, 18, 26)

Cette vie de bohème comportait ses périls, et Marlowe eut des problèmes avec la justice. En 1589 il fut accusé, avec Thomas Watson (probablement le poète) du meurtre de William Bradley, mais, après quelques jours de prison, considéré comme un simple témoin du crime, il fut relâché. De là vient sans doute sa réputation d'homme violent et intempérant. L'époque semble avoir été propice à la violence, puisqu'un autre dramaturge, Ben Jonson, fut plusieurs fois arrêté pour désordre, et a même assassiné l'acteur Gabriel Spencer.
Durant cette période, Marlowe aurait joint un groupe d'intellectuels connu à Londres sous le nom de School of Night, où l'on discutait des progrès de la science et des défaites de la foi. Sir Walter Raleigh (1552 - 1618), navigateur et écrivain, surtout connu pour son History of the World (1614), en fut un membre important, de même que le mathématicien Thomas Harriot (1560 - 1621) et, pendant quelque temps, le philosophe Giordano Bruno (1548 - 1600). En 1594 des accusations d'athéisme furent portées contre les membres du School of Night.

1590 Parution en un seul volume, et sans nom d'auteur, des deux parties de Tamburlaine. Avec Tamburlaine, inspiré d'un conquérant turc, Timur Lang (Kech 1336 - Otrar 1405), Marlowe débute la série de personnages titanesques qui, déchirés par des passions profondes, sont amenés par leurs désirs insatiables à défier l'univers entier, et à mourir, victimes de leur indomptable démesure (hybris); Tamburlaine veut conquérir le monde, Barabas, le juif de Malte, est le jouet de cette volonté de vengeance qui, d'ailleurs, entraînera sa ruine, Faust veut atteindre la Vérité et cherche l'absolu de la beauté, prêt pour cela à sacrifier l'éternité entière. C'est du reste la force des personnages principaux qui affaiblit, au détriment du jeu dramatique, le caractère des personnages secondaires. L'importance des personnages principaux permettra cependant à Marlowe de cultiver, à un niveau que seul Shakespeare égalera, l'art de ce monologue dans lequel la conscience humaine s'agite en une quête perpétuelle de sens et de vérité sur elle-même. Marlowe s'intéressa à l'autodestruction comme élément récurrent de l'esprit humain. Cet intérêt fait du dramaturge anglais notre contemporain.
La même année Marlowe donne Le juif de Malte.

1591 - 92 Marlowe présente Le Massacre de Paris et Édouard II. Il est sommé par les autorités policières de garder la paix.
En 1592 s'éteint Robert Green, ami de Marlowe, et l'un des University Wits. De son lit de mort, il écrit à Marlowe afin de le conjurer d'abandonner ses attitudes d'athée qui lui viennent «de ce venin qu'est la philosophie de Machiavel». Cette lettre, et l'appartenance présumée de Marlowe au School of Night, servirent à le convaincre d'athéisme aux yeux des hommes de son époque. La lecture critique de ses oeuvres ne permet pas toutefois de poser un jugement aussi radical.
Marlowe rédige et monte Docteur Faust.

1593 - Le 12 mai un ami de Marlowe, avec qui il avait d'ailleurs déjà habité, le dramaturge Thomas Kyd (1558-94), auteur de The Spanish Tragedy (vers 1585), est arrêté pour trahison. Un essai sur l'athéisme est découvert chez lui et, sous la torture, il dénonce Marlowe comme étant l'auteur de cet essai. Le 18 mai, Marlowe est arrêté tandis qu'il se trouve chez Sir Thomas Walsingham, responsable des services secrets. Il est sommé de rester à la disposition des autorités jusqu'à avis contraire. Le 30 mai, Marlowe passe la journée chez Eleanor Bull, une veuve joyeuse, à Deptford Strand, en banlieue de Londres, en compagnie de trois hommes dont son meurtrier, Ingram Frizer. Le but de la rencontre ne fut jamais établi, mais nous savons qu'au moins deux des trois hommes qui accompagnaient Marlowe, étaient impliqués dans des affaires d'espionnage. L'un deux avait même participé au Babington Plot, sur lequel Marlowe aurait enquêté en France. Selon la version du procèsverbal, une querelle se serait élevée entre Marlowe et Ingram Frizer au sujet du paiement du repas. Marlowe en colère aurait pris une dague et, dans la bataille, Frizer aurait réussi à l'enfoncer dans l'oeil du dramaturge.
Bien des doutes subsistent sur la version officielle de la mort de Marlowe. Il est possible qu'il ait été victime d'un guet-apens dans le but de l'éliminer, lui, l'écrivain dangereux pour ses idées, le poète à la verve trop éclatante. En outre, le jour même de la mort du dramaturge, un rapport était déposé au Conseil Privé accusant Marlowe d'athéisme, de blasphème et d'homosexualité, autant de charge qui aurait suffit individuellement à conduire l'écrivain sur l'échafaud. La recommandation du rapport était à l'effet que la voix d'un membre aussi dangereux devait être éteinte. L'assassin de Marlowe, Ingram Frizer, obtint son pardon de la Reine le 18 juin de la même année, et aucune charge ne fut retenue contre lui.
Christopher Marlowe fut enseveli en l'église Saint Nicolas de Deptford, le 1er juin 1593. Il avait vingt-neuf ans.

1594 Publication d'Édouard II et de Didon, reine de Carthage, la première pièce portant comme auteur le nom de Marlowe et la seconde, celle de Marlowe et de Nashe, bien qu'il n'y ait aucune évidence qu'il participât véritablement à la rédaction de la pièce.

1598 Publication de Hero and Leander.

1599 (?) Publication en Hollande de All Ouids Elegies: 3 books. By C.M. (traduction d'Ovide faite par Marlowe).

1600 Publication de Lucans First Booke translated Line by Line.

1601 (?) Publication de Le Massacre de Paris.

1604 Publication de la première version de Doctor Faustus (TexteA).

1616 Publication de la seconde version de Doctor Faustus (TexteB).

1633 Publication de Le Juif de Malte.

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