Vers Compostelle

Nous avons reçu un jour par la poste un petit cahier contenant le récit d'une marche de quelques jours sur l'un des chemins vers Compostelle. Son écriture limpide, sa mise en forme en vers libres, la vérité du regard posé sur une nature en grande partie encore inviolée et sur les êtres rencontrés, nous ont charmés. Et nous avons souhaité partager ce charme avec vous.

 

 

  «C'est le chemin qui parle, il faut le rencontrer.»

 26 août 2011 Le Puy-en-Velay

 

Me revoilà dans un dortoir

d'un de ces gîtes pour pèlerins.

Je me sens, ici,

chez moi;

Ces lieux de passages partagés,

où avoir un toit vaut beaucoup

quand on a passé la journée dehors,

sont souvent des foyers chaleureux.

Et j'y ai été amenée par une amie.

 

Elle était comme un passeur,

et nous avons marché ensemble dans la ville,

et dans la cathédrale.

 

J'ai vu la fameuse vierge noire,

illuminée, escortée, magnifiée.

 

Il y a partout des statues représentant

un pèlerin.

Mais les statues, elles, ne marchent pas.

 

Moi je me mets en route

demain.

En attendant il pleut

Comme pour tromper l'impatience.

 

Toute la nuit je me suis tournée, retournée,

le jour qui commençait était une vraie fête.

Ça y est! En route!

J'ai même séché la messe des pèlerins.

Et j'avais pour moi seule les grands escaliers

qui plongent depuis la cathédrale.

 

Une fois dans la campagne

et un peu en hauteur,

Je me suis retournée pour voir Le Puy, de loin,

avec ses trois monuments perchés sur des colonnes

de pierre volcanique...

Derrière, entre les montagnes et les nuages,

le soleil se levait.

Il donnait de fameuses couleurs à la terre

et au ciel

et j'entrais dans le jour et le vent

accompagnée d'oiseaux.

 

Le vent a duré toute la matinée, fort et frais,

et j'aime quand il souffle,

on dirait qu'il nous lave de bien des choses.

 

J'aime aussi les forêts

plus encore que les champs

(Même si les champs sont habités de chevaux

vaches, ânes, biquettes,moutons...)

Parce que les forêts sentent les pins et les sapins,

la résine,

et que je cueillais en passant des mûres

ou des framboises.

 

En sortant des arbres, avant St Privat,

on est au-dessus des vallées,

la route plonge!

 

À St-Privat je n'ai pas voulu m'arrêter.

Mes jambes, ma tête disaient : encore!

Alors, monter jusqu'à Rochegude,

pour attaquer une descente raide,

dans les éboulis d'énormes rochers,

les racines qui font des labyrinthes,

les genoux qui se font forts.

 C'était ce qu'il fallait

pour être heureuse d'arriver : le gîte! Merci!

 

Nous ne sommes pas beaucoup

Et nous nous reposons,

Ici : les gorges de l'Alliers

et le plaisir d'être fatiguée.

 

28 août Le Sauvage

 

J'ai la peau qui brûle un peu de soleil

et les paupières qui tombent

rajoutant toujours une étape

à l'étape que je décidais.

Allez Marie, il fait encore si beau

et ce ne sont que quelques kilomètres,

ils ne sont pas grand chose

quand on a déjà mis tout ce chemin derrière!

 

Tout ce chemin...!

Ce matin il commençait dans la brume

et la montée bien raide,

Juste avant d'entrer dans le bois

je m'étais taillé un bâton

dans une branche de noisetier.

Il rythme la marche, il en change la cadence...

 

Peu à peu je m'élevais au dessus des nuages.

Et le soleil en sortait comme s'il y avait dormi.

Un océan blanc-orange dans les gorges de l'Alliers.

 

 

Arrivée au sommet

J'ai déjeuné aux ombres d'un grand tilleul

et d'un noyer

Contente d'avoir attendu la faim

avant de sortir mes biscuits.

Et j'ai repris la marche

faisant de nombreux arrêts pour vider

les petits cailloux qui ne cessaient de s'inviter

dans mes chaussures.

 

Le sentier s'est adouci

restant longtemps en altitude

puis descendant petit à petit.

Il longeait toujours les champs

et les prés où se reposent les vaches

 

À un moment, un petit veau

qui avait dû trouver une brèche

dans les barbelés

se tenait au milieu du chemin,

et sa mère de l'autre côté.

Même si j'approche tout doux, il panique,

et veut se rapprocher de sa mère

il se blesse et elle lui lèche les flancs.

Alors, seulement, il me laisse passer

sans plus avoir peur.

 

Puis, le chemin a rejoint Saugues.

Une ville!

On oublie vite ce que c'est.

Alors je la traverse en hâte

et veux m'en éloigner sans tarder.

 

La piste est large et monte dans les pinèdes.

La chaleur s'est levée

encouragée par les sauterelles et le gravier

très fin et sec pour nous rappeler

que le Sud est tout proche.

 

Je trouve un coin parfait pour mon pique-nique

sur la mousse, bien assise à l'ombre des pins,

je guette le chemin espérant voir

les autres marcheurs.

Mais tout est désert,

c'est entre moi, les vaches et le chemin.

 

J'ai encore traversé des hameaux,

comme ils ont l'air tranquille!

Dans ces bâtisses en pierre

datant d'avant 1900

rien ne semble bouger.

Mais tout vibre d'être ancien et vivant.

Et je me surprends à rêver

de pouvoir, un jour, habiter quelque part,

d'être donnée à un lieu et de l'apprendre

par cœur

De savoir où vont les chemins qui en partent

mais aussi, chaque fois, d'y revenir.

 

Je me demandais :tous ces hameaux

ces villages, ces villes que le chemin de Saint Jacques traverse,

ce chemin qui est comme un courant continu,

comment nous voient-ils, nous,

les pèlerins?

 

 

Tout le long de la marche,

j'essaie de reconnaître les plantes

et les arbres et les animaux

Et je suis triste de connaître si peu de noms

Alors je répète au moins ceux que je connais :

des gentianes, des genêts, des orties (les grandes

aux feuilles sombres et les plus petites plus claires),

des ronces pleines de mûres, des noisetiers,

des pissenlits – un lézard, un oiseau de proie,

une petite sauterelle toute grise,

une grande sauterelle toute verte...

 

Une chose que je comprend mal : j'ai croisé

hier un pèlerin qui marchait

avec des écouteurs...

Oh, tout ce qu'il doit manquer!

Tout ce qu'il y a à entendre,

à commencer par

                                   le silence

Déjà quand on marche on le perturbe

Il faut s'arrêter parfois

pour en prendre la mesure.

 

Et puis il y a les oiseaux...

                                   et le vent dans les arbres...

 

On me demande, parfois étonné. - Vous marchez

seule?!

Mais je ne suis jamais vraiment seule.

Il y a toutes ces choses qui me parlent

même si je n'entends rien à leur langage

Elles me parlent et je les traverse,

et je ne suis pas seule.

 

Enfin, aujourd'hui,

dans la dernière forêt qui n'en finissait plus,

alors que je commençais tout de même

à trouver que la route était longue

J'ai rencontré, sentinelles bien à propos, les Meilleures Framboises du Monde!

Elles apparaissaient à la marcheuse fatiguée

comme un véritable miracle!

 

 

 

 

29 août Lasbros

 

Ouh! Monter ou descendre les escaliers

du gîte, c'est toute une épreuve!

J'ai encore marché bien plus que prévu.

Mais le dehors chante encore en moi

et je suis heureuse rien qu'à la pensée de ce lit

qui m'attend là-haut, dessous les toits!

 

Le réveil ce matin à s'extirper des rêves

étranges et profonds.

Partir presque en cachette

alors que tout le monde dort encore

Adieu Annie, Québécoise francisée

par quinze ans à Paris

Adieu Joana, Danoise amoureuse de la France

Adieu David et sa femme,

refaisant le chemin et parlant de tant d'autres pèlerinages;

Il était bon de partager un repas

avec vous tous, hier soir,

après la marche plus intérieure.

 

J'ai traversé aujourd'hui des paysages

de plus en plus secs,

de la forêt de pins, genêts et sauterelles,

et parfois le bitume des départementales.

 

Et cette fois-ci, des pèlerins partout.

On passe son temps à se dépasser

parce que l'un casse la croûte,

l'autre fait une pause; tiens, c'est votre tour,

et moi qui m'attarde encore avec les

framboisiers!

 

J'ai voulu m'arrêter à Aumont-Aubrac,

me disant qu'il fallait être raisonnable.

Mais le gîte sentait le tabac

Et les fenêtres donnaient sur la route.

Fracas des voitures,

comme la violence des villes nous frappe

quand on a marché longtemps dans les forêts!

 

Alors j'ai dit à mes pieds:

Encore un peu!

Retournons dans la campagne!

Ils étaient d'accord, mais les voilà fatigués.

 

Ce soir, la patronne du gîte plie son linge,

le soleil sèche le mien;

 

C'était encore une belle journée.

 

 

 

 

30 août St Chély d'Aubrac

 

Voilà déjà quatre jours

que je marche

Et aujourd'hui enfin

je ne pensais plus à rien

 

Dans les premiers jours

je me demandais même si je faisais bien

d'emprunter le chemin des pèlerins

sans être pèlerine

Pour une semaine à peine,

avec des choses qui m'attendent à Douai.

 

Et puis aujourd'hui, enfin,

j'ai été entièrement donnée

au présent de la marche.

Peut-être était-ce d'entrer en Aubrac,

de changer de paysage,

de se retrouver sur ce plateau immense

d'où l'on voit loin,

paysage sans arbre, de l'herbe et de la roche

et les vaches bien sûr, toujours les vaches.

 

Aux premiers pas le matin,

bien tôt, encore,

c'était le dernier bout de forêt.

Et comme j'ouvrais le chemin

je récoltais tous les fils d'araignée

tendus d'un bout à l'autre

Garder la bouche fermée

pour ne pas avaler une tisseuse!

Mais je me disais, j'imaginais,

que les fils devaient faire une sorte de traîne,

flottant au rythme de la marche...

 

L'herbe du plateau brillait encore

de givre tant qu'elle était dans l'ombre

et c'est tout doucement qu'on s'est réchauffé.

Alors j'ai sorti mon bonnet, lui

que j'avais hésité à emmener.

 

J'ai encore traversé de tout petits villages.

Et aujourd'hui une sorte de réponse

à ma question de l'autre jour :

À Fynréols, des panneaux sévères

qui interdisent aux marcheurs

d'entrer dans les prairies.

Et devant une maison : «Pouvez-vous SVP soulever vos bâtons!»

Les pèlerins dans les villages

sont donc une nuisance sonore!

Ne me suis pas sentie la bienvenue.

Avancer vite et retrouver les vaches,

plus tolérantes!

 

 

Toute la matinée,

j'ai essayé de semer

un troupeau de marcheurs belges.

Une dame qui m'explique :

-Ah oui, nous on préfère les gîtes plus

confortables!

Ils ont un itinéraire minuté,

des réservations dans les hôtels.

Ils font des parties en voiture et jamais

trop chargés...

S'ils savaient ce qu'ils manquent eux aussi!

Ah, ne pas savoir quand on s'arrête,

avoir très peu mais l'avoir avec soi,

être léger et libre, oui, infiniment libre.

Pauvres marcheurs belges!

 

Moi j'aime mieux

ce pèlerin allemand

qui porte sa tente et campe au bord du chemin.

Ou ce pèlerin français

parti du palier de sa maison

Ou ce couple de Montluçon

dont le mari a fait un infarctus

ce couple qui dit : «On verra bien si on arrive,

on prend notre temps, et si on arrive ce

sera à notre rythme!»

 

Il y a tant de façons d'être sur le chemin,

mais nous ne sommes pas tous pèlerins.

 

À la sortie de Nasbinals

où beaucoup se sont arrêtés pour manger,

j'ai retrouvé ma solitude.

Et le chemin entrait dans les pâturages

Tout en altitude

 

Cette fois-ci pas de clôture

entre moi et les vaches.

Je me méfiais un peu en passant

au milieu des troupeaux.

Et les veaux plus curieux, l’œil doux,

qui ont l'air de chercher à comprendre.

 

J'ai fait une pause à Aubrac.

La belle église aux voûtes hautes

des nids d'oiseaux à l'intérieur

et presque rien sur les murs

juste les chaises et de l'espace

pour faire résonner des voix.

 

Mais Aubrac n'était pas encore

la fin de l'étape.

J'ai entamé la descente

raide et pleine de cailloux

vers la vallée.

 

On retrouve les arbres, les fougères

les chênes et des cours d'eau,

et l'on reste concentré pour voir où

on met les pieds.

Effort d'attention tout particulier

qu'on interrompt parfois :

Regarder autour de soi...

                        Tendre l'oreille...

                                               Sentir l'air...

 

Ce soir me voilà dans un dortoir avec trois québécois

Évidemment!

Mais je me couche déjà.

Le corps aime aussi le repos.

Oh la belle journée

inégale et pleine de lumière!

Ce soir, encore, je suis au bord

de me coucher fourbue, ça oui.

Mais si heureuse d'être sur ce chemin!

 

Ce matin

partie encore tôt

dans la forêt toujours différente.

Des arbres que je ne sais nommer.

Un tapis de feuilles mortes.

Surprendre des biches!

 

Passer sur la route

puis les chemins d'entre les prés.

Et rentrer de nouveau dans le bois.

Retrouver les chênes

et la bruyère qui se fait plus rare

mais toujours des mûres

et plein de nouvelles choses.

Ceci, c'est bien de la menthe!

Cela, c'est du thym serpolet...

 

Et j'entends qu'on tape dans du bois.

C'est un oiseau qui, de son bec, attaque une branche.

Un pic-vert? C'est sûrement trop petit

pour être un pic-vert. Alors Quoi?

 

J'aimais bien la forêt

et j'y étais décidément seule.

Mais j'ai été attaquée-sauvagement!-

par une sorte de mouche,

entre la mouche et le taon orange,

la vilaine bête venant piquer dans la nuque!

 

Je me mets en colère, je me débats!

Je profère des déclarations de guerre

tout haut, la forêt entière pour moi,

je l'insulte la mouche!

Et je cours! Je fais toute la descente

en courant!

 

Des marcheurs au retour de St-Jacques

arrivent dans l'autre sens...

 

Ah nous avons bien ri.

Et plus tard j'ai recroisé des vaches

elles qui ont plus d'une centaine de mouches

qui butinent leur museau

elles ont dû rire de moi.

Et j'ai ri avec elles.

 

Le chemin plus loin débouchait sur un hameau

encore tranquille, mal réveillé.

J'ai marché jusqu'à une maison

où «Muriel» proposait un repas.

Allez, cette fois,

pour changer du sempiternel sandwich.

 

Je m'asseois à l'une de ses tables.

Vue sur la vallée et sur ses vergers.

Le vent qui venait fort.

Et Muriel qui dit : «Quand le vent vient

de par là, c'est qu'il va pleuvoir!»

Ce bon repas qu'elle m'a servi!

Je lui dis : C'était délicieux.

Et elle, rajoutant un dernier petit gâteau

encore tiède:«Je suis là pour ça!»

 

J'étais bien

mais dans la descente

et jusqu'à St-Côme d'Olt

me suis laissée atteindre par une drôle

de fatigue.

J'ai senti que le corps, quand même,

me rappelait ses limites.

Le frottement du sac ou des vêtements

Le lèvres sèches et le dessous des yeux qui brûle

Les jambes lourdes.

 

J'ai insisté auprès de mes pieds

Poussons au moins jusqu'à Espalion...

Et comme je leur parlais de tout ça

penchée sur le pont qui traversait le Lot

j'ai été rattrapée

par un pèlerin suisse.

 

Moi qui avais, jusqu'ici,

marché tout à fait seule

tout à fait en moi-même

voilà que j'avais, sans l'avoir demandé

et pourtant juste comme j'en avais besoin,

de la compagnie.

 

Belle,

Belle compagnie,

celle de Freddie, Suisse-allemand parti,

lui aussi, de chez lui, de Zurich.

Un mois, déjà, qu'il marche.

Alors il va tout de suite à l'essentiel

Il ne demande pas : «Où avez-vous dormi

cette nuit? Combien de kilomètres déjà?»

Non, il s'arrête à côté de moi et nous

regardons couler le Lot,

ses reflets et sa fraîcheur,

l'envie qu'on a de s'y baigner.

 

Plus tard il chantera pour moi

un hymne en allemand qui remercie Dieu

des beautés du monde

et une jolie chanson, en français :

«Au bord de la rivière je me suis allongé...

J'ai écouté chanter l'herbe et le vent...»

 

Ça monte fort au-dessus de St-Côme

mais le temps passe vite

Nous parlons peu et de mille petites choses

traversons une sorte de carrière de pierre sombre.

Freddie:«C'est comme la lune»

 

Freddie, qui avait pensé dormir là

décide de m'accompagner jusqu'à Estaing.

Alors nous racontons encore.

Nous remplissons nos gourdes

au cimetière de Bessuéjols

Il dit : «Ce que le chemin m'apprend

c'est que ce ne sont pas

la nourriture, le travail ou l'argent

qui sont importants

C'est l'eau.

Das wichtigstes ist wasser,»

 

Il parle aussi de son frère

mort il y a deux ans.

Un accident en sport de rivière.

Il dit : c'est difficile encore

et je devine qu'il pleure, devant moi,

dans une nouvelle montée.

 

La route est longue interminable,

heureusement que nous sommes deux.

Encore des vaches : Freddie les appelle.

Il crie quelque chose qui fait

«OM-SA-SA-SA-SA!»

Et toutes les vaches se retournent

le regardent de leurs grands yeux.

L'une s'approche même un peu.

 

Quand enfin nous sommes arrivés à Estaing

nous avons retrouvé le Lot

fait quelques courses de fête

pour nous soulager de cette si longue marche.

À la boulangerie, pendant que Freddie

ne regarde pas, j'achète du vin et du nougat.

 

 

1er septembre .Train pour Marseille

 

C'est drôle

Le train que j'ai pris

le wagon où j'ai ma place.

C'est aussi là qu'est assis un groupe

d'adolescents.

Un retour de colonie de vacances.

Et les étiquettes des valises

qui les trahissent : ils viennent de Pujols

où j'ai travaillé, il y a trois semaines.

Il y a même quelques jeunes

que je connais déjà, ils se souviennent

de mon prénom, moi qui ai oublié les leurs.

J'ai vu tant d'autres enfants, depuis!

 

Leurs présences rendent mon retour

plus doux

Ce matin, j'avais décidé de m'arrêter de marcher

Je suis triste maintenant

de n'être plus sur le chemin.

Et d'avoir laissé Freddie.

 

Hier soir, le beau repas

dans le gîte qui était une ancienne chapelle transformée

avec des lits séparés comme dans un ancien hôpital.

De jolies couleurs, en bleu et blanc, sous les arches.

Il y a eu de l'orage, des éclairs,

mais nous étions à l'abri

et le vin nous réchauffait.

«Das ist lieb,»a dit Freddie.

 

La nuit, j'ai mal dormi,

et j'ai fini par me dire

que je ne pourrais marcher

le dernier jour qui me sépare de Conques.

Tant pis : en cinq jours, j'ai été trop gourmande.

J'ai marché obstinée

mais je sais que je vais revenir.

 

C'est dire au revoir qui était difficile.

Passé le pont du Lot

où j'ai jeté mon bâton

qui continue ainsi de voyager

Freddie a entamé la montée

vers Golhinac et j'ai murmuré pour lui

des sortes de prières.

Il s'en va à Santiago; comme j'aimerais,

moi aussi, reprendre ce chemin,

sans penser à l'après, n'ayant en tête

que la destination, St Jacques

ou le Cap Finistère, le bout du monde.

 

Ces cinq jours, j'avais des souvenirs

de septembre dernier, tel paysage

me rappelait tel autre, et le précieux

des rencontres; et un début d'ampoule,

presqu'au même endroit!

 

Pour repartir,

deux dames m'ont embarquée.

Et sur l'autoroute, dans sa vitesse effrayante,

nous avons passé d'autres promesses de marche

le Larzac ou les Gorges du Tarn,

St Guilhem-le-Désert...

 

Mais le train, à présent, m'emmène

Nîmes a brisé le silence

Il y a du monde partout

Et ils ont tous l'air si contrariés!

 

Je voudrais vous donner

De cette paix qu'apporte le chemin

Mais elle ne se dit pas.

C'est le chemin qui parle

Il faut le rencontrer.




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