Les arnaques de la lunetterie: pour y voir clair

La myopie est mauvaise conseillère

L’occasion fait le larron. Nos législateurs tiennent-ils assez compte de la sagesse de ce proverbe? Pourquoi, par exemple, la cohabitation d’un optométriste et d’un opticien est-elle autorisée? Cette occasion de collusion rappelle l’époque où les médecins vendaient eux-mêmes les médicaments. L’intérêt des opticiens, surtout s’il s’agit d’une grande entreprise comme NewLook ou Greiche & Scaff, c’est de vendre le maximum de lunettes au prix le plus élevé, ce en quoi ils sont si habiles qu’on ne s’étonne plus de devoir payer des lunettes ordinaires 1000 $ et plus. La mission de l’optométriste en tant que membre d’un ordre professionnel dont l’acte est payé au moins partiellement par l’État est de protéger le public. Peut-il remplir cette mission adéquatement quand il occupe des locaux appartenant à l’opticien? S’il arrivait en outre qu’il puisse toucher une part du profit de la vente, ne serait-t-il pas doublement tenté d’être complice de l’opticien en omettant, par exemple, d’indiquer au client qu’il n’est pas obligé d’acheter des lunettes griffées?

Pour diverses raisons, soit manque de confiance en eux-mêmes ou crainte de perdre leur permis de conduire lorsqu’ils sont âgés, les gens n’osent pas exiger que l’optométriste leur donne la formule des verres dont ils ont besoin, ce qui leur permettrait ensuite de faire un achat rationnel en se donnant du temps pour comparer les prix de divers fournisseurs.

Pour en finir avec cette situation, il suffirait d’interdire la cohabitation de l’opticien et de l’optométriste et d’obliger ce dernier à prendre l’initiative de donner la formule au client. Peut-être faudrait-il pour cela accroître la rémunération de l’optométriste? Tous y gagneraient y compris les opticiens, lesquels, à cause de leurs excès, perdent de nombreux clients au profit des lunettiers en ligne. Ce que semblent avoir compris les propriétaires de la chaîne Entrepôt de la lunette. Ils ne cohabitent pas avec des optométristes et font concurrence à Internet en offrant toute la gamme des montures et en proposant des prix raisonnables pour les verres.

Selon un reportage de CBC en 2012, les verres ordinaires sont l’objet d’une production de masse et peuvent être fabriqués pour aussi peu que $2 à $12 pièce. Quant au coût de la production des verres plus sophistiqués, il se situe entre $20 et $50. L’expert cité, Bruce Gergez, un opticien retraité de Hamilton, a aussi été propriétaire de la chaîne Great Glasses. Source

P.S. Le grand philosophe Baruch Spinoza, auteur de L'éthique, était aussi polisseur de lentilles et de toute évidence il y avait un lien entre les deux métiers. Ce lien apparaisse dans un poème de Jorge Luis Borges sur Spinoza.



Elles taillent les translucides mains
Du juif, dans la pénombre, les cristaux.
Le soir est peur et froid en son déclin.
(Au soir qui vient chaque soir équivaut).

Ses mains comme l’espace de jacinthe
Qui aux lisières du Ghetto pâlit
Existent peu pour l’homme qui construit,
calme, le songe clair d’un labyrinthe.

La gloire ne l’émeut pas, cet espoir
De songes au songe d’un autre miroir,
Ni le craintif amour des jeunes filles.

Métaphores et mythes, il les oublie
taillant son cristal: la carte infinie
De Qui dans toutes ses étoiles brille.




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