Fin d'été

Albert Lozeau
Août donne le désir et l'espérance de septembre. Sa chaleur raisonnable, sa profonde lumière, ses soirs moins longs, ses fraîches nuits, tout indique que les jours s'acheminent lentement vers l'automne, et marcheront bientôt sur les feuilles mortes.

Le soleil enveloppe la terre d'une clarté plus fine, et les arbres vert foncé se détachent sur l'horizon en lignes nettes, comme gravés à même le ciel. De grands nuages blancs animent l'espace où se creusent des golfes d'azur aux berges neigeuses; des pigeons traversent ce paysage aérien et tournoient sur cette eau bleue dont la masse se forme et se déforme indéfiniment.

Lumière dans les yeux ! Lumière dans le coeur ! Le regard monte vers l'infini, et l'infini descend dans l'âme ! L'étendue est si vaste que toute la pensée de Dieu paraît rayonner sur le monde ! Tout semble s'élancer en une aspiration universelle, et, seul, un pétale de rose que la brise a blessé choit légèrement sur le sol humide.

Sans le bruit intermittent du travail nécessaire et les appels des oiseaux, ce serait le triomphe du silence lumineux et de la prière muette, de l'admiration et du recueillement. Ce triomphe éclatera bientôt sur la montagne, qu'habite la paix souveraine, où vont rêver les hommes las de la vie ardente et les amants fatigués par l'amour importun !

Quelques heures encore, des heures plus courtes que celles que mesurent les horloges, et la féerie commencera, - quand le mois d'août, en un dernier soupir d'azur, rendra son âme à la nature, son âme pleine de nuages et d'étoiles! ...

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