L'Encyclopédie de L'Agora : une vision organique du monde
Selon Marguerite Yourcenar, Marc Aurèle,le sage Marc-Aurèle, le divin Marc, est le Romain de l’antiquité dont il subsiste le plus de sculptures. Preuve qu’il a été le plus admiré, aimé. S’il est vrai que la qualité d’un amour se mesure à la beauté, à la variété et au nombre des œuvres d’art qu’il a inspirées, le christianisme est une prodigieuse histoire d’amour.
J’ouvre le livre d’art le plus près de moi. Il est consacré à Fra Angelico, le peintre du Couvent San Marco de Florence. J’y trouve, dans les couleurs de l’arc-en-ciel, je ne sais combien de visages rayonnant de la présence intérieure du Christ. Et ce n’est là qu’une invitation à découvrir la multitude de peintres, de sculpteurs, de musiciens, d’architectes, de verriers qui, vague après vague, de génération en génération, pendant plus de deux mille ans ont célébré Jésus, sa mère et les saints. Le doux paysage européen a lui-même été l’œuvre des moines.Parmi les livres que j’ai apportés en Amérique latine, en 1961,il y avait les deux volumes du Mystère de l’être de Gabriel Marcel Je découvre aujourd’hui que cette lecture de jeunesse m’a marqué plus profondément que je ne l’ai longtemps cru. Je ne me résignais pas à penser que la vérité ne pouvait exister que dans l’orbite des sciences, lesquelles rendaient tout possible…et tout insignifiant parce qu’elles restaient muettes sur les grandes questions. Quant aux vérités dites philosophiques obtenues par la seule raison elles m’apparaissaient comme des vérités scientifiques amputées de leurs preuves vérifiables. Gabriel Marcel m’a aidé à comprendre qu’à certaines conditions, dans l’ordre des grandes questions, l’expérience personnelle pouvait remplacer l’expérience scientifique, que par suite, la vérité pouvait exister dans l’invérifiable propre au mystère lequel, s’il ne peut être interprété que subjectivement peut être partagé avec autrui dans le cadre d’une rencontre. À ce propos, Gabriel Marcel parle d’intersubjectivité. La rencontre est l’un des thèmes importants de son œuvre.
[i] Aubier 1951
Voilà le cœur de la psychologie de Thibon, Il est nietzschéen en ce sens que Nietzsche et ses principaux interprètes allemands sur ce point, Scheler et Klages, ont placé la perte de la vitalité, sous le choc de la vision mécaniste du monde, au centre de leurs préoccupations.
Moralistes français, psychologues allemands; Thibon a donc adhéré au catholicisme alors qu’il était imprégné de tous les anticorps qui pouvaient le protéger contre ses virus. C’est pourquoi il m’a inspiré une telle confiance à un moment, le début de la révolution tranquille, où comme tant de mes compatriotes, j’étais tenté de réduire le catholicisme à l’étroitesse à laquelle il n’avait pas échappé au Québec.
Tout bénir, ne rien diviniser, pas même « Dieu cet être qu’on trahit rien qu’en le nommant » Ce sont ces paroles de Thibon qui me viennent spontanément à l’esprit quand je pense au rapport à Dieu. Il m’a révélé à moi-même cette soif d’absolu que j’éprouvais dans le clair-obscur. Elle était le lieu de notre foi commune, universelle, sans cesser d’être d’abord chrétienne. Adolescent, j’adhérais à la preuve ontologique de l’existence de Dieu : Si l’idée de perfection habite l’être imparfait que je suis, c’est qu’un Dieu l’a déposée en moi. La soif d’absolu est la preuve ontologique vécue, incarnée.
« Deux choses, écrit Thibon, me restent et me relient à la source à travers mes épaisseurs sans fond de bassesse et de mensonge : l'admiration et la tendresse, le frisson du regard devant la beauté du monde, le brisement: du cœur devant la misère de l'homme. C'est par là que j'existe : tout le reste n'est qu'illusion et péché. » [i]
[i] Gustave Thibon, L’Ignorance étoilée, Montréal, Boréal Express, 1984, p. 109
La science, l’hypothèse déterministe en particulier, avait ébranlé en moi la foi de cette humanité enfant qui avait besoin d’un Dieu interventionniste n’hésitant pas à briser la chaîne des causes secondes pour manifester son amour, mais aussi sa puissance et jusqu’à sa vengeance. Comment l’existence d’un tel Dieu pouvait-elle être compatible avec ce déterminisme que les Grecs appelaient Nécessité et dont notre vie quotidienne, envahie par les produits de la technoscience, nous administrait constamment la preuve ?
C’est cette contradiction entre une certaine science et une certaine religion qui, depuis des générations a détourné tant de jeunes croyants, parmi les plus éclairés, vers l’agnosticisme ou l’athéisme. Simone Weil m’a permis de découvrir une science et un Dieu qui pouvaient être compatibles, une science qui tout en gagnant en rigueur se donne comme objet la beauté du monde et un Dieu dont la puissance s’efface devant sa pureté et son amour. Le grand peintre et le grand musicien respectent les lois de la matière de leur art, mais tel un soleil rayonnant à travers un nuage, leur inspiration nous atteint à travers cette matière. On est alors touché, dira Simone Weil par « quelque chose d’analogue au sourire d’un être aimé. »
C’est Jeanne Parain-Vial, directrice et amphitryon de mon doctorat, qui m’a immunisé contre le matérialisme déjà triomphant en attirant mon attention, avec insistance sur ce passage du Phédon (97 b) où Socrate distingue la cause de la condition, Les esprits réductionnistes de l’époque soutenaient devant lui, juste avant qu’il ne boive la cigüe, que ce sont les muscles et les os qui sont la cause des mouvements humains.
« Car, par le Chien, je vous promets qu’il y a beau temps que ces muscles et ces os se trouveraient du côté de Mégare ou de la Béotie, là où les aurait transportés une certaine opinion sur le meilleur, si je n’avais pas jugé plus juste et plus beau de préférer, à la fuite et à la désertion, la soumission à la Cité, quelle que soit la peine fixée par elle. Non, je vous assure, donner à de pareilles choses le nom de causes est vraiment trop absurde. »
«Toutes les civilisations anciennes ont exprimé, chacune à sa manière, un sentiment d'admiration devant la beauté de la terre. Aristote essaya d'imaginer comment des hommes vivant comblés de richesses, mais dans des cavernes, auraient réagi s'ils avaient eu pour la première fois l'occasion de contempler le ciel, les nuages et les mers. Assurément, écrit-il, “ ces hommes penseraient que des dieux existent, et que toutes les merveilles du monde sont leur œuvre ”. L'un des aspects les plus négatifs de la civilisation technologique est l'oblitération progressive de cet attrait qu'exerce la beauté de la terre. En tant qu'hommes les savants sont aussi portés que quiconque à apprécier les qualités sensibles de notre planète. Mais dans leurs recherches, ils tendent à éprouver moins d'intérêt pour le caractère unique de la terre, du fait qu'elle se meut dans l'espace en fonction des mêmes lois physiques que les autres planètes. Il est possible que cette banalisation de la terre en tant qu’objet céleste ait joué un rôle dans la dévaluation de la nature et de la vie humaine. Or la terre a cessé d'être un simple objet astronomique dû 'jour où, voici plus de trois milliards d'années, elle a commencé à engendrer la vie. La preuve visuelle fournie par l'exploration spatiale donne aujourd'hui sa pleine signification à l'image d'Aristote. Bien que la terre ne soit qu'une île minuscule dans l'indifférence illimitée de l'espace, elle est la seule à se présenter, dans le système solaire, comme un jardin enchanté dont les fleurs — les myriades de créatures différentes ont ouvert la voie aux êtres humains capables de réflexion. »
llich l'historien de l'Église a saisi très tôt que les institutions séculaires de la société moderne étaient incompréhensibles sans l'antécédent historique d'une communauté de vivants et de morts qui se concevait comme corps du Christ. Le point d'où se révèle l'unité des excursions récentes d'Ivan est sa confiance en l'ensarcosis tou logou. Mentionner le terme français équivalent aiderait à peine les jeunes lecteurs, dont la difficulté n'est pas tant le manque de confiance que la désincarnation de leur expérience du monde et d'eux-mêmes. Pour Ivan, l'ensarcosis rend le verbe et la chair proportionnels ou, comme disait Thomas d'Aquin, analogues. 4 C'est ici que l´historien prend le relai de l'homme de foi. La société moderne est le résidu désincarné de communautés rassemblées autour de la foi en l'ensarcosis: ceci est une réalité historique indépendante de la foi. La lente marche à la modernité peut alors être décrite comme une perte progressive de la proportionalité ou analogie entre le mot et la chair, l´homme et la femme, le corps et le monde, les sens et la matière, les pieds et le sol. C'est cette perte que, dans ses entretiens avec David Cayley l'an dernier, Ivan comparait à ce pire qui est la corruption de ce qu'il y a de meilleur. Le résultat de cette corruption est l'inhospitalité de la modernité que nous connaissons, le divorce entre la parole et la chair (cf le bruit quotidien de paroles non prononcées), la désincarnation de l'expérience du monde et de soi dans une société issue d'une foi bimillénaire en l'incarnation du verbe et incompréhensible historiquement sans cette foi trahie. Seule la pratique de l'amitié peut rendre capable d'affronter ensemble cet abîme sans y sombrer.
Si elle est une sainte pour notre temps, c’est d’abord parce qu'elle a pressenti les misères et le sens du long vieillissement devenu la règle; c'est aussi parce qu'elle elle a surmonté un mal caractéristique de son siècle : la mésestime de soi. Petite, sauvageonne, repliée sur elle-même, conformiste, casanière et même laide parfois à ses propres yeux, mais au lieu de dériver ainsi vers l’acédie, ce vague à l’âme désespéré pouvant conduire au suicide, elle se laisse aspirer vers des hauteurs d’où elle survole ses lacunes en disant : c’est ainsi. Et voici mes chansons, voici ma joie!
Crépuscule
…
Ils diront que j’ai perdu ma lumière
Parce que je vois ce que nul œil n’atteint :
La lueur d’avant mon aube la première
Et d’après mon soir le dernier qui s’éteint.
(Marie Noël, Chants d’arrière-saison, 1961)
Une renaissance du christianisme est-elle possible ?Nous semblons croire que c’est le Christ et son Église qui ont besoin de nous pour revivre, alors que c’est nous qui aurions besoin d’eux pour renaître à notre humanité, à cette vocation de la vie éternelle qui nous distingue des machines et, dans une moindre mesure, des animaux.
(...)
«Quand viendra la fin des temps, il faudra aux derniers chrétiens plus de foi et plus de grâce qu’aux premiers.Jeune, la Religion eut des amants. Ils l’embrassèrent par passion. Ils l’épousèrent par espérance. Avec elle ils épousaient son royaume du lendemain qui merveilleusement allait croître au monde.
Vieille, elle n’aura plus que des fils, des soutiens de famille qui la garderont, la nourriront, l’entretiendront comme une mère appauvrie et tombée à leur charge.
Pour elle, jadis, pour son espérance terrestre, joyeux ses amants sont morts.Pour elle, demain, sans autre espérance que le Ciel,ses fils, généreusement, mourront aussi.
Et il y aura moins de fraîche passion, mais plus d’amourhéroïque dans la dernière mort que dans la première.»
(Marie Noël, Notes intimes)
Les grandes idéologies se sont effondrées. L’espoir qui les animait est-il mort? Le philosophe français Jean-François Mattéi soutient l’idée que les grandes utopies sont les fruits de la sécularisation de l’espoir chrétien en la venue du royaume de Dieu. L’échec de ces idéologies était inévitable, parce qu’elles traitent comme absolu ce qui n’est que relatif: les biens matériels, l’identité nationale. Le christianisme, et peut-être plus largement, la spiritualité, met l’humain en relation avec l’absolu. Mattéi entretient l’espoir que le retour du christianisme est possible, parce que le christianisme est en définitive la possibilité du retour de l’espoir.
Socrate meurt sans douleur à soixante-dix ans, porte lui-même la coupe à ses lèvres, fuit probablement un quelconque mal physique, ou à tout le moins, les maux de la vieillesse ( Xénophon est on ne peut plus clair à ce sujet dans son Apologie de Socrate ), souriant et ironisant, entouré d’amis qui l’adulent. Le Christ boit de force la coupe qu’on lui tend, meurt dans des douleurs atroces, en santé, dans la force de l’âge, seul et méprisé, pardonnant à ses bourreaux et réconfortant un assassin. Seule la subjugation des lecteurs par les chants envoûtants de Platon et de Xénophon peut expliquer cette méprise, cette confusion entre deux morts bien distinctes
Rien ne remplace l’exécution vivante de cette musique. Le plus souvent, elle ne nous est cependant accessible que grâce au disque. J’aime écouter le chant grégorien dans l’obscurité. Cela laisse toute la place à la lumière qui émane. C’est comme si je suivais le vol d’un oiseau intérieur qui s’élève au gré de la psalmodie. Mais cette image est sans doute par trop profane, par trop concrète. Elle fait la part trop belle à l’imagination et au mental. Je dirais que c’est plutôt d'une pulsation, celle du cœur de l’Être, du cœur de Dieu, qu'il s’agit. Notre respiration s’apaise, entre en résonance avec la voix des moines et le rythme de la musique. Le calme se fait. C’est une musique qui aboutit paradoxalement au silence.
Dans cette communication, l'auteur entend donner un aperçu de la pertinence de la pensée de Fernand Dumont (philosophe, sociologue, théologien et chrétien engagé) en regard des débats contemporains en philosophie de la religion. La première partie fait ressortir les principaux points de désaccord entre Dumont et Marcel Gauchet (Le désenchantement du monde, 1985) quant à la place et au rôle du christianisme dans une société sécularisée
Pendant son séjour à Rome il soutiendra une autre thèse de doctorat en théologie, rédigée en anglais, et intitulée Religion and religious on the meeting of hinduism and christianity, qui paraîtra plus tard dans diverses langues sous le titre Le Christ inconnu de l’Hindouisme 9. Cette thèse fut son premier apport majeur au dialogue hindou-chrétien. Il y soutient que le Christianisme n’a pas l’exclusivité de l’expérience christique et que le Christ se manifeste et se fait présent ailleurs que dans le christianisme, sous des formes et des contenus qui diffèrent souvent de ceux propres à cette religion.
Interrogations, tensions, contradictions, puits de lumière dans la pensée d’une philosophe incorrecte, libérale et donc moderne sur le plan politique, catholique traditionnaliste sur le plan religieux, comme le fut un certain Québec qu’elle connaît bien.
Ce livre, une contribution majeure à la réflexion sur l’avenir de la Chrétienté et de l’Occident, a retenu mon attention parmi bien d’autres. Simone Weil, Gustave Thibon, Ivan Illich, Ludwig Klages, Jacques Ellul, James Lovelock, Michel Villey, tant de mes auteurs préférés y sont présents que j’ai eu le sentiment de poursuivre un long dialogue amical avec Chantal Delsol, mais en même temps j’ai découvert une terre nouvelle me donnant l’occasion de voir enfin, parfois pour m’en dissocier, des idées que je n’avais fait qu’entrevoir, telles celles qui ont rapport à John Lovelock et à L’hypothèse Gaia.
L'Encyclopédie de l’Agora n’est pas une somme des connaissances établie par une myriade de spécialistes sans grandes affinités entre eux. Elle est une œuvre, celle d’un auteur principal entouré d’amis ayant des affinités intellectuelles avec lui et ébauchant séparément leur propre synthèse. [En savoir davantage]
Plus nous avançons sur le chemin de la paix intérieure et de l'intégrité, plus le sens de l'appartenance croît et s'approfondit. Ce n'est pas seulement l'appartenance [...] à une communauté qui est en cause, mais aussi l'appartenance à l'univers, à la terre, à l'eau, à tout ce qui vit, à toute l'humanité.
À l’heure où les astrophysiciens décrivent la farandole des galaxies et la valse des étoiles, la conception dominante de l’univers se réduit au mot Big Bang, évoquant une explosion, comme celle d'Hiroshima. La tradition, et une certaine science depuis peu, nous invitent à lui préférer, métaphore pour métaphore, celle de l'éclosion, associée à celle de l'oeuf cosmique. S'il est incontestable qu'il y eut violence à l'origine, faut-il en conclure que cette violence doit être absurde comme dans une explosion, faut-il exclure qu'il puisse s'agir d'une violence ayant un sens, comme celle de l'éclosion?
«Seule la vie peut donner la vie. L’intelligence peut façonner, mais étant morte, elle ne peut donner une âme. De la vie seulement peut jaillir le vivant.» Goethe, Zahme Xenien
«Est dit éternel ce qui par soi ne peut changer ni vieillir ni périr. Une sublime amitié est éternelle en ce sens qu'elle ne peut être atteinte qu'obliquement et par des événements qui lui sont tout à fait étrangers. L'amour prétend être éternel. Les pensées les plus assurées, comme d'arithmétique et de géométrie, sont éternelles aussi. La durée, au contraire, est essentielle à tout ce qui change et vieillit par soi. L'idée de rassembler tout l'éternel en Dieu est raisonnable, quoique sans preuve à la rigueur, comme au reste tout éternel, amitié, amour, arithmétique.» (Alain, Les dieux et les arts)
«On va à Dieu par des commencements sans fin», écrit un Père de L’Église. Cette page est notre premier commencement… Une parfaite définition de Dieu par le plus grand des théologiens serait moins à sa place ici que nos balbutiements. Étant les auteurs d’une oeuvre qui comporte déjà mille allusions à Dieu, c’est à nous, cohérence oblige, qu’il appartient d’évoquer le foyer vers lequel convergent ces allusions.
L’humanisme est une vision du monde où tout gravite autour de l’homme comme tout gravitait autour de Dieu dans la vision antérieure en Occident. Ainsi défini, l’humanisme est le produit d’une révolution copernicienne inversée: l’homme, auparavant satellite de Dieu, devient l’astre central.
La plante est immobile et choyée. Sa nourriture lui est donnée. Il lui suffit pour l’accueillir de laisser croître ses racines dans la terre et dans le ciel. L’animal doit chercher sa nourriture, et pour cela, il est libre dans ses déplacements. Sans doute est-ce la raison pour laquelle on l’a associé étroitement à l’homme, mais ainsi amputé de sa dimension plante, ce dernier n’allait-il pas s’éloigner de ce qui deviendrait un jour un idéal pour les jeunes et pour les vieux une nécessité i : contempler et à cette fin rester immobile.
Tout dans l’univers, et l’univers lui-même, tend vers le froid uniforme, et un désordre qui n’est rien d’autre que la rupture des liens unissant les éléments constitutifs du vaste ensemble. Dans ce monde qui se défait, les êtres vivants sont des points d’ordre qui contredisent la loi générale. En eux l’énergie, qui se dégrade tout autour, se concentre pour former tantôt une plante qui grimpe, tantôt un animal qui vole, tantôt un animal qui pense... qui aime, qui aime ô merveille! au-delà de ce que l’espèce exige de lui pour assurer sa propre reproduction.
Qu’est-ce que la vérité ? Pourquoi nous donnons-nous tant de mal pour la trouver, la défendre et la répandre ? Tentons d’abord de répondre par le recours le plus simple et le plus spontané à la raison. La vérité c’est la vie, ce qui assure sa persistance et sa croissance : distinguer la plante toxique de la plante nourricière, la vraie beauté, celle qui élève par opposition à celle qui dégrade. La preuve est dans le résultat, dans le degré d’accomplissement des êtres en cause.
En bas de cette échelle, l’élan impétueux de l’animal sauvage bondissant hors de sa cage-piège; en haut un sage ébloui par ses principes, un mystique ravi par son Dieu. Impulsion dans le premier cas, contemplation dans le second. Point de choix en ces extrêmes. «Les instincts des animaux survivent dans l’homme à l’état d’ébauche.» (K.Lorenz). À leur place, un grand vide angoissant. Ce vide est le lieu de naissance de la liberté.
Le mal dont le bien doit triompher en nous pour nous rendre meilleur n’est pas une simple carie dentaire qu’on peut obturer en quelques secondes, mais une infection centrale résistant aux antibiotiques. La vie de celui qui désire vraiment en guérir ressemblera à un chenin de croix ou à la marche d’un Bouddha à recherche de la voie du milieu.
« C'est à coups de tonnerre et de feux d'artifice célestes qu'il faut parler aux sens flasques et endormis. Mais la voix de la beauté parle bas: elle ne s'insinue que dans les âmes les plus éveillées. Doucement mon bouclier a vibré et a ri aujourd'hui : c'était le frisson et le rire sacré de la beauté! » Nietzsche
«Si les citoyens pratiquaient entre eux l'amitié, ils n'auraient nullement besoin de la justice; mais, même en les supposant justes, ils auraient encore besoin de l'amitié.» ARISTOTE, Éthique à Nicomaque
Proche du scepticisme sur le plan intellectuel, la neutralité est aussi proche de l'indifférence sur le plan affectif et de l'indifférentiation sur le plan physiologique.
D’abord la justice et bien commun! Il sera souvent question de la démocratie dans cette synthèse. Trop peut-être, car en ce moment, dans les démocraties occidentales du moins, dont certaines sont en voie de désintégration, on a recours au concept de démocratie lui-même comme critère pour juger de la situation concrète dans les démocraties en cause. Funeste tautologie contre laquelle Aristote nous avait mis en garde.
C'est dans l'indignation devant l'injustice qu'il faut d'abord chercher la voie de la justice. Il faut toutefois au préalable pouvoir distinguer le sentiment authentique et universel d'injustice de l'insatisfaction personnelle qui est à l'origine des revendications.
Quelques regards critiques dans un contexte, celui du progrès technique, où l’approbation inconditionnelle et universelle va de soi, en dépit de cette mise en garde maintes fois formulée : « ce qui est possible devient nécessaire.» Qui donc en ce moment veut et peut s’opposer aux innovations, souvent discutables pourtant, dans le domaine des techniques de reproduction humaine?
Sapere : goûter et savoir. Associer ces deux expériences pour mieux comprendre l’une et l’autre et s’habituer ainsi à distinguer la vraie culture, nourricière, de la fausse, réduite au divertissement. Deux sujets vastes.
La perspective historique la plus longue possible est la voie royale pour préciser le diagnostic et trouver les meilleurs remèdes au mal qui frappe l’éducation.
La caractérologie, une science en plein essor au début du XXème siècle, semble être aujourd’hui en voie d’extinction. Ne serait-ce pas parce que le caractère des personnes a disparu ? Certains maîtres en cette discipline, dont Ludwig Klages, en avaient prédit l’extinction pour cette raison.
Le mot ordinateur a des origines théologiques. Celui qui a proposé de traduire computer par ordinateur, Yves Perret, a justifié son choix en précisant que le mot ordinateur se trouve dans le dictionnaire Littré comme adjectif désignant Dieu en tant qu'Il est celui qui met de l'ordre dans le monde. L'ordinateur ressemble pourtant moins à Dieu qu'à l'homme [...]
Plus un sport est naturel, plus il y a de chances qu'on puisse le pratiquer longtemps, parce qu'on en aura toujours le goût et les moyens. Quel que soit le sport choisi, il ne restera durable que si on le pratique avec mesure, dans le respect de l'ensemble de l'organisme et de chacun des organes et des muscles sollicités, avec en outre le souci de rendre toujours plus harmonieux les rapports de l'âme et du corps.
«C'est par le truchement de l'expression artistique que les valeurs les plus hautes acquièrent une signification éternelle et une force capables d'émouvoir l'humanité. L'art possède la faculté illimitée de transformer l'âme humaine — faculté que les Grecs appelaient psychagogia. Seul, en effet, il dispose des deux éléments essentiels à l'influence éducative: une signification universelle et un appel immédiat. Parce qu'il combine ces deux moyens susceptibles de faire autorité sur l'esprit, il surpasse à la fois la réflexion philosophique et la vie réelle.» Werner Jaeger, Paideia: la formation de l'homme grec
Faire acte de science c’est échapper à la contrainte sous toute ses formes : préjugés personnels, conformisme, tradition, pression sociale, financière, opinion majoritaire, y compris celle des pairs. Serait-ce la raison pour laquelle la science a fleuri dans la Grèce antique puis dans l’Europe moderne. Et n’est-ce pas en raison de l’oubli de cette règle qu’elle tombée en disgrâce dans la Russie stalinienne et les États-Unis de Donald Trump ?
L'attente active, celle qui consiste à soumettre à la critique les réponses imparfaites, Socrate l'appelait philosophie, mot qui signifie amour (philein ) de la sagesse (sophia). Cet amour s’accomplit à deux conditions : la rigueur dans la pensée et le souci de la purification dans la vie personnelle.
Quelques regards critiques dans un contexte, celui du progrès technique, où l’approbation inconditionnelle et universelle va de soi, en dépit de cette mise en garde maintes fois formulée : « ce qui est possible devient nécessaire.» Qui donc en ce moment veut et peut s’opposer aux innovations, souvent discutables pourtant, dans le domaine des techniques de reproduction humaine?
Le mot ordinateur a des origines théologiques. Celui qui a proposé de traduire computer par ordinateur, Yves Perret, a justifié son choix en précisant que le mot ordinateur se trouve dans le dictionnaire Littré comme adjectif désignant Dieu en tant qu'Il est celui qui met de l'ordre dans le monde. L'ordinateur ressemble pourtant moins à Dieu qu'à l'homme [...]
Selon Marguerite Yourcenar, Marc Aurèle,le sage Marc-Aurèle, le divin Marc, est le Romain de l’antiquité dont il subsiste le plus de sculptures. Preuve qu’il a été le plus admiré, aimé. S’il est vrai que la qualité d’un amour se mesure à la beauté, à la variété et au nombre des œuvres d’art qu’il a inspirées, le christianisme est une prodigieuse histoire d’amour.
Ce catholicisme qui nous a faits ! Plusieurs sont d’avis qu'il nous a défaits à la fois politiquement et psychologiquement. Depuis 1960, ils ont eu toutes les tribunes dont ils pouvaient rêver pour exposer leurs regrets et leurs doléances. Dans cette synthèse, nous voulons donner la parole à ceux qui, sans avoir renoncé à leur esprit critique, veulent bien reconnaître que le catholicisme nous a aussi faits… un peu, a contribué à notre épanouissement et à notre accomplissement, en tant que peuple comme en tant qu’individus. Même si elle ne devait être qu’un dernier adieu reconnaissant, cette synthèse est nécessaire [...]
Le Québec est un microcosme. Se trouve-t-il un seul groupe humain sur la planète auquel il ne ressemble pas par quelque côté?
On y parle les deux langues qui ont le plus contribué à faire le monde tel qu'il est aujourd'hui: le français et l'anglais. La société de ce Québec était traditionnelle, médiévale même, il y a à peine cinquante ans; elle devance aujourd'hui la Californie dans certaines expérimentations.