Brissa Christiane

27 février 1945

"Christiane Brissa (Ougrée, 1945) est parfaitement consciente du lourd héritage sémantique qu’elle manie avec ses motifs floraux. Férue de littérature, elle assume ces connotations multiples, sans pour autant en faire une finalité absolue. Leurs sens symboliques potentiels ne sont pas occultés, ils sont simplement secondaires. D’ailleurs, il ne s’agit pas des seuls thèmes qui retiennent son attention : les fruits, les oiseaux, le paysage peuvent également l’occuper au gré de son inspiration. Les choix de motifs à réaliser relèvent d’une longue maturation, d’une « nécessité qui point lentement » dit-elle et qui a besoin d’être patiemment élaborée. Le thème, une fois adopté, déclenche souvent un travail en série, dans laquelle chaque tableau répond à l’ensemble, tout en conservant une autonomie propre.

Les motifs sont alors occasion d’adroites constructions qui exploitent les possibilités intrinsèques de la peinture. Les formes sont longuement décantées, pour aboutir à une épuration, à une simplification à la lisière de l’abstraction, où la bidimensionnalité le dispute en permanence à la tridimensionnalité. Des toitures de maisons, traversés d’une percée de lumière, peuvent ainsi passer pour de pures déclinaisons géométriques. La peinture est ainsi amenée au point d’équilibre entre ses deux réalités, celle d’objet et celle de représentation. Christiane Brissa dit se livrer à une lente décoction des formes afin d’arriver a ce qu’elle appelle« L’authenticité du motif» . Comme la Fleur des artistes Symbolistes de la fin du XIXe° siècle, ses peintures comprennent à la fois un élément figuré, singulier, et la totalité du spectre d’évocations affectives et sémantiques qu’il recense. Sa fleur est à la fois une fleur et toutes les fleurs possibles.

Ainsi épuré, le motif partage la primauté avec les rapports entre les couleurs, les effets de texture. Ceux-ci sont de préférence mats, râpeux, résultats de l’application d’acrylique sur des panneaux, afin d’accrocher la lumière et d’affirmer leur matérialité picturale. La touche est tantôt discrète, tantôt diluée et aérienne. La déclinaison sérielle des thèmes contribue à la création d’une partition visuelle aux capacités d’évocations multiples. Cette répétition d’un motif, ce désir d’en épuiser toutes les possibilités, trahit peut-être une angoisse de la disparition des choses. Et avec le corollaire de cette angoisse : le besoin d’en conserver, si pas les états éphémères, au moins le souvenir le plus affûté possible des émotions intenses qu’elles peuvent générer."

d'après Pierre-Olivier ROLLIN, Historien d’Art, Chef de secteur des Arts Plastiques de la province du Hainaut (BE)

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